ThéâtreCritiques de théâtre
Crédit photo : Matthew Fournier
Lorsque la musique d’ambiance s’arrête, Éric Robidoux entre en scène en tuxedo, et nous présente le premier tableau d’une série de dix. La pièce durera une heure, sans interruption, et j’imagine que pour les deux interprètes, qui ne disposent sans doute pas d’une énergie inépuisable, c’est bien assez. Est-ce suffisant pour le spectateur? Oui et non.
«Si tu cherches du sens, y’en a pas». On nous martèle des phrases-chocs pendant toute la durée du spectacle, tels des leitmotivs obsessifs, et de nombreuses ruptures de ton viennent déstabiliser le public. Quand Ève Pressault vient rejoindre son partenaire sur scène, vêtue d’une robe de mariée, les monologues sont déclamés en parallèle, puis deviennent un dialogue.
Il faut mentionner la performance très énergique des deux interprètes; avec des codes gestuels qui reviennent sans cesse, des mouvements brusques et affirmés, une lecture parfois parlée, parfois scandée, et souvent criée, je n’étais guère surpris de voir que Robidoux nageait dans la sueur lors d’un amusant passage dans la salle, où il s’est saisi de la coupe de vin d’une pauvre spectatrice.
Une question demeure en suspens, même après que les lumières se soient allumées et que la musique – hypnotique mais un peu «passée», composée par le metteur en scène Christian Lapointe – se soit tue: quel est le sujet de cette pièce?
Les mensonges que nous racontons aux autres et à nous-mêmes? Le combat constant des multiples facettes de notre personnalité? La mince distinction entre l’amour et le sexe chez les jeunes adultes d’aujourd’hui? Tout ça, et plus encore. Ivan Viripaev, le dramaturge russe qui a écrit le texte, s’amuse avec des paradoxes contemporains de façon parfois très adroite, mais n’échappe pas à une certaine confusion passagère devant l’aspect «fourre-tout» de son oeuvre; que viennent faire les Arabes et les Juifs dans sa réflexion?
C’est sans doute dû à un élan créatif très authentique, qui frôle parfois l’hystérie (la voix d’Ève Pressault s’aventure dans des territoires très nasillards par moments, et cause de la distorsion dans son micro, rendant parfois ses propos inaudibles), que nous avons droit à ces moments un peu étranges. Mais nous suivrons le conseil de Robidoux, et ne chercherons pas de «sens» pendant cette expérience hautement sensorielle, qui nous donne envie d’à notre tour nous poser beaucoup de questions sur notre vie.
La pièce Oxygène est présentée au Théâtre Prospero jusqu’au 3 octobre 2015. Pour plus de détails, visitez le lien suivant: theatreprospero.com.