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Crédit photo : Le Carré 150
Un huis clos sous tension
«On parle d’un thriller sur fond de comédie noire, car on va rire, mais on va rire comme on rit dans un salon funéraire. C’est souvent des rires nerveux», a lancé Pierre-François Legendre un sourire dans la voix. La pièce d’Emmanuel Reichenbach, mise en scène par Jean-Simon Traversy, débute deux heures avant l’arrivée des invités. Pour l’instant, seuls les deux frères, incarnés par Pierre-François Legendre et Louis-Olivier Mauffette, sont présents. «Il y a la nervosité, la tristesse, on se dit des choses maladroites», raconte l’acteur.
«Mais assez rapidement, il y a une femme (interprétée avec aplomb par Geneviève Rochette) qui fait son apparition et qu’on ne connait pas ni l’un ni l’autre, ce qui n’est jamais bon signe dans des funérailles», ajoute-t-il. «Elle nous apprend qu’elle connaissait très bien notre père, et ça nous met dans une situation assez embarrassante, car elle détient des informations qui pourraient facilement faire couler notre famille. Il faut savoir que notre père était un homme très influent dans sa communauté. Il y a le maire du village et aussi des journalistes qui vont être présents aux funérailles.»
L’Homme dans toute sa complexité
Au fur et à mesure que les révélations font surface, les personnages vont devoir faire des choix. D’un côté, l’homme d’affaires froid et cynique, dans la continuité du père, incarné par Pierre-François Legendre, et en face, son frère, campé par Louis-Olivier Mauffette, au profil plus bohème. «Ce qui va être intéressant, c’est de savoir jusqu’où mon personnage peut aller pour ne pas tomber dans l’opprobre. Au niveau dramatique, c’est intéressant d’avoir deux personnages qui ne sont pas forcement diamétralement opposés, mais qui sont très différents quand même, car souvent, dans les familles, c’est ça qui arrive. Il y a toujours un mouton noir», déclare l’acteur.
«Ce qu’il faut savoir aussi, c’est que les deux frères reçoivent également une bonne prime d’assurance, donc ça envoie le spectateur sur différentes pistes. Quand j’ai reçu le script, j’ai commencé à le lire tard le soir, mais je n’ai pas pu aller me coucher sans savoir comment ça allait se terminer! Dans le sang? Les larmes? Il fallait que je sache!»
Un rôle de composition
Totalement à l’opposé de son personnage dans la vie, Pierre-François Legendre, lequel a incarné de nombreux rôles divers et variés dans sa longue carrière, prend un malin plaisir à rentrer dans la peau de cet être sans scrupules. «Bien sûr l’histoire est passionnante, mais le personnage, je n’ai pas eu à jouer ça si souvent, un être aussi complexe, méchant et mal dans sa peau. J’ai une fascination pour ces gens-là, qui sont capables de faire abstraction des problèmes et de vivre dans le déni total, alors que moi, dans la vie, si j’ai quelque chose en tête qui me chicote, je ne suis pas capable de dormir sans avoir réglé le problème», révèle le comédien.
Bien entendu, le texte et la mise en scène jouent une part fondamentale dans l’interprétation de la psychologie des personnages. «Dans un huis clos, ça se passe en temps réel; d’ailleurs, au début de la pièce, on dit que les invités arrivent à 13 h, et la mise en scène prévoit une vraie horloge qui tourne. On ne peut pas trop prendre de largesse avec le temps; on est à la virgule près», affirme Pierre-François Legendre.
«Cependant, on la chance d’avoir l’auteur avec nous pendant les répétitions, donc on s’adapte en fonction de sa vision et de notre interprétation du personnage, tandis que le metteur en scène est là pour calibrer l’intensité de jeu.»
Le théâtre, un métier et une passion
«Il faut savoir que le théâtre, en été, c’est quand même assez prenant. C’est un vrai don de soi, mais moi, c’est quelque chose qui me garde en forme», affirme Pierre-François Legendre. «Ce métier-là est formidable pour les rencontres. Je ne connaissais pas personnellement Louis-Olivier Mauffette, mais je savais que c’était un joyeux clown. On s’amuse vraiment beaucoup, et la complicité entre frères est visible», ajoute le comédien.
«Je ne connaissais pas non plus Geneviève Rochette, mais elle me donnait l’impression d’être une femme qui m’intimidait un peu, ce qui marche très bien avec son personnage! Car en réalité, c’est une personne hyper simple, hyper accessible. Puis, il y a Luc Boucher; c’est celui qui n’est au courant de rien et qui va tout découvrir. Quand il arrive, on retombe plus dans le comique; c’est la soupape pour désamorcer la tension.» Et de conclure: «C’est important de bien s’entendre, car emmener les scènes au climax, ça se fait à deux, ou à trois!»