ThéâtreCritiques de théâtre
Crédit photo : Pierre Desjardins
Quelle est l’influence de l’autre dans notre quotidien?, se demandent les Éternels pigistes dans la pièce Après moi, encore présentée pendant quelques jours à La Licorne. Qu’y a-t-il avant moi? Et qu’y a-t-il après? Comment l’autre peut-il changer mon destin, et comment puis-je changer le sien? Si je ne l’avais pas croisé, serais-je arrivé à la même place? Ces vastes questions ont servi de point de départ – et d’arrivée – à cette pièce écrite par Christian Bégin et mise en scène par Marie Charlebois, deux comédiens qui tiennent également des rôles dans Après moi.
Seuls trois lits sur la scène, placée au milieu de la salle, font office de décor. La pièce est découpée en quelques scènes, reprises plusieurs fois. Chaque fois, on va un peu plus loin, on en apprend un peu plus. Chaque fois, un des personnages en croise un autre. Et pas toujours le même. Les cinq comédiens sont constamment sur scène, et on alterne entre les chambres et les histoires qui, parfois, s’entrechoquent. Le concept de répétition des scènes est intéressant, quoique parfois un peu répétitif. Plus la pièce avance, moins on y pense, pour finalement arriver à la dernière scène, la meilleure du spectacle. Celle où on se rend compte à la fois de l’immensité des destins de chacun et de la petitesse du monde dans lequel on vit.
Peu de choses à redire sur le jeu de Marie Charlebois en épouse amère et malheureuse et celui d’Isabelle Vincent, la coiffeuse tantôt altruiste, tantôt aguichante. Si le rôle de l’intellectuel un peu maladroit convient bien à Christian Bégin, on remarque tout de même dans son jeu quelques tics qu’on retrouve également chez le docteur Roche, son personnage de Trauma, ou chez Pierre-Paul, le rôle qu’il a tenu pendant six ans dans Rumeurs. Quant à Philippe Lambert, les scènes de grande intensité semblaient mieux lui convenir que les conversations banales que tenait son personnage avec sa femme. Malheureusement, certaines répliques manquent un peu de naturel. Par contre, c’est Pier Paquette qui convainc le plus en homme seul et désespéré, un poseur de fenêtres dont la femme l’a quitté, et qui tente tant bien que mal d’entretenir une relation, même simplement téléphonique, avec son fils. Celui qui passe pour le malcommode s’avère finalement être le plus touchant des personnages.
Après moi fait réfléchir sur soi, mais surtout sur les autres. La détresse, la souffrance parfois invisible des autres, la solitude qu’on peut parfois faire disparaître avec quelques mots, mais que souvent on n’ose pas approcher par peur de se retrouver confronté à ses propres «bibittes». Mais, parfois, il ne suffit de presque rien, juste un homme qui dit: «Hey, tant qu’à être là, vous voudriez pas venir dans ma chambre? On va se faire monter des gins tonic. Parce qu’on est là, ici, maintenant, tous ensemble».
«Après moi» est encore présentée à La Licorne jusqu’au samedi 21 septembre.
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de la rédaction