«La fin de l’homme rouge» de Svetlana Alexievitch au Théâtre de Quat’Sous – Bible urbaine

ThéâtreCritiques de théâtre

«La fin de l’homme rouge» de Svetlana Alexievitch au Théâtre de Quat’Sous

«La fin de l’homme rouge» de Svetlana Alexievitch au Théâtre de Quat’Sous

Humiliés et offensés

Publié le 7 mars 2024 par Pierre-Alexandre Buisson

Crédit photo : Frédérique Ménard-Aubin

L’essai «La Fin de l’homme rouge» de Svetlana Alexievitch a remporté le prix Médicis en 2013. L’autrice et journaliste y a rassemblé de multiples témoignages sur la dissolution de l’URSS de diverses personnes l’ayant vécu, et elle s’en sert pour affûter son regard sur cette période chaotique et répressive de l’histoire de la Russie, accueillie comme une libération pour certains, et comme l’écroulement complet d’un monde pour d’autres.

On peut donc se permettre d’être surpris en découvrant que l’adaptation qu’en fait Catherine de Léan sur les planches du Quat’Sous ces jours-ci dure seulement une heure et vingt minutes.

Cela s’explique par le fait qu’elle a choisi quatre témoignages et qu’elle en a fait quatre monologues d’environ vingt minutes chacun, qui se succèdent sur scène sans réelle interaction entre les personnages.

Dominique Quesnel, Vitali Makarov, Laurence Dauphinais et Micha Raoutenfeld jouent dans des registres différents, parlant lucidement de la fin du rêve soviétique avec une certaine nostalgie, et parfois avec une douleur cuisante.

Les monologues sont tous intéressants, voire percutants, mais n’ont pas vraiment de liens entre eux. Ce sont les paroles des témoins de l’histoire, des ruines d’un idéal, d’un effondrement social, mais rien d’autre ne les unit.

Côté mouvements, il y en a peu, outre quelques étirements incongrus de Micha Raoutenfeld.

Notons qu’il est plutôt audacieux de laisser les comédiens sur scène, même une fois que leur temps de parole est échu, quitte à les laisser avoir l’air de faire une petite sieste (comme c’est le cas avec Dominique Quesnel, couchée sur une structure qui n’a pas l’air trop confortable, et ce, pendant soixante minutes).

Sur scène, on retrouve un échafaudage avec des parties amovibles et des surfaces de projection qui nous permettent, pendant les transitions entre les monologues, de visionner des images montées serrées de la chute du régime, au son de pièces russes entraînantes de divers genres musicaux.

Le personnage interprété par Laurence Dauphinais trône au-dessus de la mêlée, au propre comme au figuré, tant par son opportunisme que par son dynamisme – c’est la pièce de résistance de la soirée, la couleur piccolo de la production.

Pour sa première mise en scène, Catherine de Léan propose des idées scéniques inusitées, et c’est fort louable, mais ces choix inhabituels nous laissent parfois perplexes. On ne peut s’empêcher de sentir, à la toute fin, qu’il manque quelque chose pour que l’expérience soit mémorable.

On quitte donc la salle avec un sentiment d’incomplétude: oui, on a pu entendre de très bons textes, finement interprétés, mais la structure qui les rassemble est un peu chancelante.

La pièce «La fin de l’homme rouge» en images

Par Frédérique Ménard-Aubin

  • «La fin de l’homme rouge» de Svetlana Alexievitch au Théâtre de Quat’Sous
  • «La fin de l’homme rouge» de Svetlana Alexievitch au Théâtre de Quat’Sous
  • «La fin de l’homme rouge» de Svetlana Alexievitch au Théâtre de Quat’Sous
  • «La fin de l’homme rouge» de Svetlana Alexievitch au Théâtre de Quat’Sous
  • «La fin de l’homme rouge» de Svetlana Alexievitch au Théâtre de Quat’Sous
  • «La fin de l’homme rouge» de Svetlana Alexievitch au Théâtre de Quat’Sous
  • «La fin de l’homme rouge» de Svetlana Alexievitch au Théâtre de Quat’Sous

L'avis


de la rédaction

Nos recommandations :

Vos commentaires

Revenir au début