ThéâtreCritiques de théâtre
Crédit photo : Valérie Remise
Des réflexions qui, vous le savez si vous me lisez depuis quelques années, m’intéressent vivement.
Son œuvre précédente, Post-humains, présentée au Théâtre Espace Libre en 2017, faisait l’exploration du mouvement transhumaniste et de ses singuliers apôtres. Leclerc avait une idée bien précise derrière la tête pendant son enquête, celle de trouver une alternative au traitement quelque peu vieillot de son diabète.
Cet angle personnel rehaussait nettement la qualité humaniste de la démarche.
Dominique Leclerc réfléchit au futur et au futur des technologies, mais aussi à l’impact qu’elles auront sur notre qualité de vie, tout en offrant une mise à jour de ses découvertes et de ses rencontres avec divers intervenants du milieu.
Pendant l’écriture de la pièce, toutefois, deux événements ont contribué à l’éclatement de sa création: la santé de son père invalide s’est détériorée, et la pandémie a paralysé la société.
Changement de cap
L’angle a donc légèrement changé et lui a permis de dresser un magnifique parallèle entre la fragilité des êtres humains et leur santé, ainsi que l’essor fulgurant de la technologie. Et quoi de mieux pour illustrer son propos à divers niveaux que de faire appel à la technologie, en s’amusant de celle du passé, pour nous montrer, avec des preuves à l’appui, que la vitesse de son évolution est plutôt vertigineuse?
Sommes-nous la dernière génération à avoir des souvenirs privés, qu’ils soient sous forme d’objets, de photos analogues ou d’images mentales?
Tous ceux qui sont nés alors que l’internet existait déjà verront sans doute une partie de notre existence être archivée, sans qu’ils n’en aient nécessairement fait la requête. C’est aussi ça, le danger de l’omniprésence des géants du web.
La mise en scène, co-signée par l’auteure elle-même et Olivier Kemeid, est généralement au service du propos et plutôt fluide, bien qu’elle fasse preuve de quelques flottements qui disparaîtront sans doute après quelques représentations. Sur scène, la présence de Patrice Charbonneau-Brunelle, qui a aussi signé la scénographie, ainsi que Jérémie Battaglia, qui s’occupe des projections vidéo en temps réel, ajoutent un peu de féérie au processus.
Il faut un certain talent pour parler de science-fiction, de moins en moins fictive, à l’échelle humaine, tout en vulgarisant des concepts technologiques parfois assez abstraits, pour en faire au final une création axée sur l’intime.
C’est en somme un spectacle qui se tient loin des clichés alarmistes sur le monde qui nous attend et qui a surtout pour effet de réchauffer notre cœur transi par l’automne.
«i/O» de Dominique Leclerc en images
Par Valérie Remise
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de la rédaction