«Gars» de Marie-Ève Perron au Théâtre d’Aujourd’hui – Bible urbaine

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«Gars» de Marie-Ève Perron au Théâtre d’Aujourd’hui

«Gars» de Marie-Ève Perron au Théâtre d’Aujourd’hui

Mourir d’une overdose de smoothies aux fruits

Publié le 21 mars 2013 par Valérie Lachaîne

Crédit photo : Justin Laramée

Écrite, mise en scène et jouée par Marie-Ève Perron, Gars est une pièce complètement ancrée dans notre époque moderne. Des points d’interrogation partout, ô combien justes et éloquents de notre «génération de perdus», créant un mélange de rires aux lèvres et de mottons à la gorge.

Dans la salle Jean-Claude Germain, ça sent les «je sais pas, je sais pu, shu pu sûre de rien» à plein nez! Fille est là, en crise d’asthme et de rage de comprendre, le pourquoi du comment du départ de Gars. Ce même gars qui a claqué la porte, sans qu’on le voie, pour un ailleurs à l’herbe plus verte et aux parfums exotiques. La comédienne s’adosse au mur, se demande si elle doit lui avouer qu’elle a frôlé la mort 12 314 fois à cause de lui, «c’était pas correct», qu’elle se dit, «ton amour est gluant», qu’il lui répond.

Même seule sur scène, on croirait la voir accompagnée, tellement les émotions et les états d’âme virevoltent de tout bord tout côté. Dans un décor sens dessus dessous, de lendemain de fête et de restants de confettis, la comédienne joue avec l’espace en l’occupant dans ses moindres recoins. La tête à l’envers sur le divan ou les poings nus au mur, Perron, convaincante, ne laisse aucun spectateur se prêter à l’éclipse lunatique.

Avec sa satire de fille désespérée au karaoké, utilisant comme micro la lampe de chevet, c’est toute la salle qui s’y reconnaît, certains plus que d’autres encore. Même chose lorsque Fille débarque chez sa mère, soupe poulet et nouilles au rendez-vous, suivi du fameux discours maternel: «y’a ton avenir qui s’ennuie de toi». Moment magique: la scène du dépanneur, où Fille se tape trois smoothies banane-fraise en alarmant Gars au téléphone de son trop plein de vitamines.

Et que dire du texte poétiquement à vif qui sort directement du cœur sans passer par quatre chemins. «Fallait pas le niaiser le ça, le s’aimer, fallait le célébrer, lui faire des partys». Phrases coups de poing, cris de révolte, chaque mot est un petit monde qui fait surgir le plus profond de l’être. Aucunement dans la déprime, le monologue tient plutôt dans l’inondation de ponctuation suspendue, de points manquants sur les «i».

Sur une note un peu plus humoristique, chapeau pour le «mais/où/et/donc/car/ni/or» savamment placé là où le public veut rire. Enfin, même si dans son texte Perron avance: «shu mal élevée quand j’ai pu de colonne», il va sans dire qu’elle en a pour deux dans cette aventure périlleuse qu’est le sujet de l’engagement, ou plutôt du non-engagement.

Plus récente création de Marie-Ève Perron, la pièce Gars est présentée sur la scène Jean-Claude Germain du Théâtre d’Aujourd’hui jusqu’au 6 avril 2013.

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