ThéâtreCritiques de théâtre
Crédit photo : Eugene Holtz
Un après-bal qui tourne mal, on a déjà vu ça, entre autres dans Doggy dans gravel d’Olivier Arteau, à l’automne 2017 au Théâtre Denise-Pelletier. Si vous croyez que la prémisse tombe légèrement dans le cliché, détrompez-vous; la structure du récit, très éclatée, regorge d’ellipses, de ruptures de ton et de séquences oniriques.
Le spectateur se questionnera souvent en cours de route et comprendra certaines choses seulement bien après être sorti de la salle.
Dans un registre très éclaté, on a tout d’abord droit à la présentation des personnages, des archétypes bien définis, qu’on retrouve sans doute dans toutes les écoles. Il y a la zélée, le sportif ahuri, le rejet… Une élève d’origine cubaine, qui fait tout pour s’intégrer, tombera dans l’œil de tous les garçons de sa classe, et sera un prix particulièrement convoité pour le bal des finissants.
On pourrait en dire long sur les dynamiques malsaines qui s’installent entre les élèves et qui mènent à «l’Événement». Voir quelqu’un comme une personne inférieure peut facilement nous conduire à lui manquer de considération, et cette vision réductrice est bien souvent le moteur de beaucoup d’agressions – et c’est ce qui trouble le plus dans ce récit, cette acuité dans l’observation, ces dialogues qu’on pourrait entendre dans la rue, et dont la poésie ne parvient pas à dissimuler toute la laideur.
La mise en scène époustouflante de Marylin Perreault, qui a choisi ses acteurs en fonction de leur versatilité – ils dansent, jouent et se prêtent à quelques acrobaties – et qui a fait appel à Mélanie Whissel à la direction technique, redouble d’inventivité et de moments forts. Avec la configuration des chaises, une caméra au plafond et un écran qui occupe une bonne partie du mur du fond, elle parvient à plusieurs reprises à carrément couper le souffle du public et à l’hébéter de surprise.
L’ambition de la forme vient cependant rapidement prendre le dessus sur la cohérence du récit, et plusieurs éléments demeurent inexpliqués, ou laissés à l’interprétation d’un public perplexe et mystifié. Il semble y avoir un important décalage entre ce que l’auteure désire véhiculer comme message et ce que le spectateur moyen retirera de l’expérience en fin de compte.
Il est donc préférable de profiter des vives impressions que nous laisse le récit, sans trop chercher à en comprendre les moindres détails.
«Fiel» de Marylin Perreault en 3 photos
Par Eugene Holtz
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