La pièce «Ita L. Née Goldfeld» au Théâtre du Petit Saint-Martin à Paris – Bible urbaine

ThéâtreCritiques de théâtre

La pièce «Ita L. Née Goldfeld» au Théâtre du Petit Saint-Martin à Paris

La pièce «Ita L. Née Goldfeld» au Théâtre du Petit Saint-Martin à Paris

Une immersion dans le Paris de la Seconde Guerre à travers la vie d’une femme juive

Publié le 6 février 2013 par Pauline Guyau

Crédit photo : Théâtre du Petit Saint-Martin

Ita L. Née Goldfeld, cette nouvelle pièce d’Eric Zanettacci, mise en scène par Julie Lopes Curval et Hélène Vincent, cristallise toute la tension et la peur de la guerre dans cette heure où Ita doit prendre la décision de sa vie.

La lumière s’est tamisée, les voix se sont tues et Ita L. Née Goldfeld (Hélène Vincent) est apparue sur la scène du Théâtre du Petit Saint-Martin. Elle s’est assise sur une chaise en face d’un petit bureau et a commencé à raconter une partie de sa jeunesse avec son mari Salomon, mort au combat pendant la Première Guerre mondiale.

Ita est chez elle, au 4e étage du 30, rue du Petit Musc à Paris. Cela fait maintenant trente cinq ans qu’elle a quitté la Moldavanka, en Ukraine. Elle se parle à elle-même, elle fait le point sur sa vie. Ses enfants sont partis; Jacques est en voyage à Dachau, Léon et Anna sont dans le sud de la France, il paraît que c’est plus sûr.

Et Ita est seule dans sont petit appartement, lorsque soudainement on toque à sa porte. C’est à partir de cet instant que le destin de la vieille femme entre dans une sorte de fatalité. Deux jeunes soldats allemands entre chez elle pour tout inspecter et lui poser diverses questions. Elle répond naïvement. Ces deux derniers laissent une heure à Ita pour faire sa valise et lui conseille de bien profiter de cette heure qu’on lui accordait. Durant cette heure se bousculent l’espoir, l’incrédulité, la lucidité, la terreur et le renoncement. Tous ces états qui la traversent avant ce voyage en train dont elle ne connaît que trop la destination…

La mise en scène de la pièce est très minimaliste. Quelques meubles (un petit bureau et deux chaises) sont positionnés sur l’espace d’un tapis. Celui-ci représente la surface de l’appartement d’Ita. Cela exprime à quel point elle ne prend pas de place et reste très discrète. Tous les autres éléments sont gardés dans l’imaginaire d’Ita et du spectateur.

Hélène Vincent sort quelquefois de ce carré qui représente sont appartement pour parler de son passé, des joyeux instants jusqu’à son hésitation à quitter l’appartement et descendre dans la rue; mais pour aller où? Son étoile juive cousue à son manteau et sa valise à la main ne l’emmèneront nulle part. Les soldats allemands sont dans toutes les rues de la ville et il ne semble pas y avoir d’issue possible.

L’heure de questionnement que subi le personnage correspond exactement à la durée de la pièce. Cette symétrie temporelle permet au spectateur de se sentir auprès d’Ita dans ses réflexions sur le monde et de vivre en même temps qu’elle l’horreur de sa décision. Ainsi, le public se met facilement à la place du personnage et voyage dans ce temps de la France occupée. Hélène Vincent est physiquement seule sur scène, bien que nous sentions sa connexion permanente avec l’âme d’Ita L. qui la regarde jouer.

Le jeu d’Hélène Vincent est époustouflant de vérité, rythmé par les émotions qui la percent. Cela fait quelques années que la comédienne a rencontré ce texte, et le spectateur sent parfaitement que la vie d’Ita l’habite depuis longtemps.

Bien que ce thème soit assez récurrent au théâtre en France, l’idée de parler de l’Histoire à travers le parcours d’une femme simple balaye d’un seul coup tous les clichés.

C’est parce qu’a priori Ita L. est devenu aujourd’hui un nom sur un mur parmi tant d’autres que son arrière petit-fils, Eric Zanettacci en décide autrement en lui écrivant cette pièce de théâtre.

La pièce Ita L. Née Goldfeld joue au Théâtre du Petit Saint-Martin à Paris à partir du 5 février 2013, et ce, pendant soixante représentations.

L'avis


de la rédaction

Vos commentaires

Revenir au début