«Coma» de Patrice Chéreau: une lecture théâtrale sombre et pesante – Bible urbaine

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«Coma» de Patrice Chéreau: une lecture théâtrale sombre et pesante

«Coma» de Patrice Chéreau: une lecture théâtrale sombre et pesante

Publié le 2 novembre 2012 par Olivier Boivin

Le passage à Montréal de Patrice Chéreau, d’origine française, reconnu notamment pour ses quelques 33 mises en scène, 14 opéras et 11 long-métrages, s’est non seulement fait remarqué par les représentations de ses œuvres cinématographiques au cinéma Excentris depuis quelques jours, mais bien aussi par la pièce Coma, présentée au TNM du 30 octobre au 4 novembre. La douleur derrière ce texte de Pierre Guyotat nous est dévoilée avec une présence particulière et une réelle incarnation des sens. On y parle de dépression, de maladie et d’idées suicidaires. Voici une heure et demie d’émotions lourdes.

Son corps est entré en symbiose avec l’émotivité du personnage, ça se voyait et se ressentait. Sans décor ni costume, Chéreau se pointe seul. Une lecture brute et plutôt austère du texte de Pierre Guyotat nous est alors présentés avec un ton constant et quelques sautes d’humeur que toute maladie mentale engendre.

Le fond du baril solidement frôlé, on va tous connaître ça un jour. Mais, à un moment donné ou à un autre de notre vie, l’envie psychique humaine désire plus que tout dépasser le stade de la victime et quand cette volonté prend le dessus, tôt ou tard, on y voit de la beauté dans cette noirceur. Quand le fond du baril est atteint, l’homme déboussolé a envie de rigoler. 

L’homme auquel nous faisions face, dans Coma, était muni d’un cynisme puissant, tout en étant empreint de lucidité et, comme s’il avait calculé le tout, il nous a ouvert ses veines de pure folie, une page à la fois. Hélas, on le suit dans son monde. Contagieux ce Guyotat? L’homme âgé louange son état et son vieillissement puis sa décente aux enfers devient ni plus ni moins délirante. Rien n’est drôle, pourtant. C’est comme si la chose la moins drôle du monde ne pouvait au bout du compte qu’être risible.

Avec comme accessoire de scène le texte et une chaise brune rustique, c’est le corps tout entier de l’acteur qui a fait la lecture vive et enracinée d’une colère et d’une folie passagère, bien que profondément lucide, d’un cri du désespoir concret, humain et somme toute, presque humble. Habillé sobrement de noir et sans décor réel, sinon un mur de briques très éloigné, on peut dire que c’était une heure d’émotions pesantes et souffrantes. Une souffrance, qui, d’un point de vue du spectateur, devient des plus thérapeutiques puisque partagée en groupe, dans une contexte théâtral.

Outre son curriculum vitae exhaustif, Patrice Chéreau s’intéresse à la transmission du texte par le corps et cela est tout à fait réussi. Un jeu d’acteur d’expérience qui maîtrise avec brio la scène. Décidément pour les amateurs de théâtre assumés et déconseillé aux débutants. La mise en scène, signée Thierry Thieû Niang, était certes dénaturée et fort épurée, mais se prêtait bien à l’ambiance inconfortable de la pièce.

Coma est présentée au Théâtre du Nouveau Monde jusqu’au 4 novembre seulement dès 20h, à 17h et 20h le samedi et 15h le dimanche.

Appréciation: **1/2

Crédit photo: Ros Ribas

Écrit par: Olivier Boivin

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