Un vent contestataire au Métropolis de Montréal avec Tryo

Touchant un public intergénérationnel depuis plus de deux décennies maintenant, Mali, Guizmo, Manu et Danielito poursuivent leur marche en avant, dans leur engagement écologique et citoyen comme dans la mise à mal des stéréotypes, «de la bourgeoise à la fermière» comme du fumeur de joints. Vent debout insuffle non pas un nouveau positionnement sur les questions politiques et sociales, mais bien une mise à jour des sujets invoqués inlassablement par le groupe. Et ce Tryo 2.0 continue de vivre, de rêver, de résister, de dénoncer tout en s’alignant sur les débats actuels.

Jeudi soir, dans un Métropolis capitonné d’un public aussi éclectique que concerné, la formation française a réussi son retour en terres québécoises dans le cadre de Montréal en Lumière. Une grande partie des classiques y sont passés, de «La main verte» ou «Yakamoneyé», de leurs débuts aux tubes du troisième album Grain de sable (2003), avec «Sortez-les», «Dans les nuages», sans oublier les «Ce que l’on s’aime» ou «Serre-moi» de Sous les étoiles (2009). Sans surprise, donc, Tryo est revenu expressément sur ses plus de vingt ans de carrière comme chef de file du reggae acoustique en français ravissant les plus érudits du groupe.

Si la soirée a culminé comme on s’y attendait avec «L’hymne de nos campagnes», repris d’une seule voix par tout le Métropolis, c’est bien au détour que l’on espérait le quatuor avec la présentation échantillonnée de leurs nouvelles compositions. Et là, c’est grâce à la même recette qui fit le succès que Tryo a «soufflé» son message d’amitié, de tolérance et d’espoir, cafardant sur les années Hollande ou rendant hommage à ce «Watson» aux accents écologiques et dressant un portrait humain tout en poésie du fondateur de la Sea Sheperd, le Canadien Paul Watson. «Rassurer Finkielkraut» utilise avec ardeur les mêmes ingrédients, s’emportant parfois; alors que «La Demoiselle» calme celles-ci par un témoignage poignant sur le handicap d’une femme vivante et tenace.

Peut-être plus intemporel que les opus précédents, ce Vent debout est inévitablement marqué par ces quatre années de désillusion vécues par la gauche française. Pourtant, c’est toujours avec optimisme, dans la joie et la bonne humeur que Tryo tient la barre, debout la tête haute. Musicalement, c’est aussi un retour aux sources après les ouvertures vers la folk ou le jazz, et Tryo propose de nouveau ses guitares acoustiques pour servir un message universel, aux accents organiques et d’ouverture.

Les actualités sont donc bien au coeur de la démarche artistique du groupe et à en croire le groupe, la chanson engagée va bien. On l’a vu jeudi sur scène, la ferveur est intacte, certes elle est idéaliste, voire utopique, mais les quatre musiciens assument fièrement la conduite qui est la leur depuis le milieu des années 90.

Sans se réinventer, Tryo est de retour pour éveiller nos consciences, se plaire à rêver et même si leurs textes auront du mal à embrigader la jeunesse libertaire française et au-delà des frontières, il nous offre un peu de répit dans le plaisir et l’amusement.