Neutral Milk Hotel à L’Olympia de Montréal – Bible urbaine

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Neutral Milk Hotel à L’Olympia de Montréal

Neutral Milk Hotel à L’Olympia de Montréal

Un rendez-vous unique auquel on voulait décidément assister

Publié le 19 janvier 2014 par Emmy Côté

Crédit photo : Merge

Le charme opérait entre Neutral Milk Hotel et le public montréalais qui s’étaient donné rendez-vous à L’Olympia de Montréal samedi soir. Pour cause, Jeff Mangum et sa bande de musiciens hyper talentueux n’ont pas eu de misère à se rallier leurs plus grands admirateurs. Ceux-ci se savaient bien que trop choyés d’assister à un concert du band pionnier de l’indie rock, séparé peu de temps après la sortie du classique instantané In the Aeroplane Over the Sea en 1998.

Après quinze ans sans nouveau matériel, on ne croyait plus tellement à une réunion du groupe indie folk mythique. Alors, pour les fans de NMH, le concert d’hier soir était perçu comme un beau cadeau inespéré. La salle bondée de monde, l’atmosphère transpirait d’exaltation: on souhaitait être au rendez-vous et pas ailleurs. Même si la plupart des personnes qui assistaient à la prestation étaient probablement trop jeunes au moment de la sortie de l’album culte à la fin des années 1990, il était plus que certain que les chansons de l’œuvre remarquable, de cacophonie bouleversante et glorieuse, avaient fait leur chemin, comme intactes, sans avoir vieillies, jusqu’aux années 2010.

On ne saurait minimiser l’impact d’In the Aeroplane Over the Sea sur ceux qui ont adoré cet album. C’est un disque personnel comme on n’en conçoit pas beaucoup, un album qui détient une place toute spéciale dans une collection, un album dont on ne peut se détacher même avec le temps. L’écouter demeure chaque fois un voyage époustouflant et accablant, la musique étant capable de nous arracher tantôt quelques larmes, tantôt de nous insuffler une dose d’espoir, tantôt encore de nous faire ressentir la plus grande des passions avec son accordéon mélancolique, ses percussions frénétiques et ses cuivres endiablés, qui plongent souvent dans une distorsion magnifiquement orchestrée.

Le leader du groupe, Jeff Mangum, a ouvert seul le concert dans une ambiance intimiste avec l’émouvante «Two Headed Boy». Voilà une introduction qui surprenait. On ne s’attendait pas à ce que le chant nasillard et en dents de scie de Mangum donne la chair de poule dès les premières minutes du concert. Mais on n’allait pas regretter cette émotion particulière. Lorsque la horde de musiciens est entrée sur scène et que les airs cuivrés de «The Fool» se sont fait entendre, on se sentait déjà transporté par la musique de celui qui raconte ses rêves noirs et surréalistes à propos d’Anne Frank. On oubliait que NMH n’avait pas pris le soin de monter un décor, la musique suffisait à elle-même, aucun artifice ne paraissait donc nécessaire, voire utile.

La foule a véritablement levé lorsque les premières notes de guitares de «Holland 1945» ont été grattées. Mangum y chantait dans une urgence qui nous tenait en haleine et les instruments se soumettaient à ses élans. Le public ne pouvait rester de marbre, cédant lui aussi à l’attraction qu’exerçait le chanteur. Il lui fallait suivre la danse pour rejoindre l’imaginaire de Mangum: «The only girl I’ve ever loved / Was born with roses in her eyes / But then they buried her alive / One evening 1945 / with just her sister at her side/And only weeks before the guns / All came and rained on everyone».

Puis Neutral Milk Hotel a renoué avec plusieurs chansons lo-fi de son premier LP Avery Island (1996). L’excellente «Baby For Pree / Glow Into ou» a fait valser Julian Koster à l’accordéon, sautillant et tournoyant avec sa tuque bleue originale, semblable à celle d’un petit lutin. «Gardenhead / Leave Me Alone» a été superbement interprétée, même si la foule ne s’est pas montrée aussi démonstrative que sur les titres correspondant à l’album de 1998. En effet, immédiatement après, «Kings of Carrot Flowers Pt 1, 2 et 3» ont eu le don de réanimer la foule, en particulier la dernière partie. La finale accélérée, mi-folk mi-punk, a fortement plu à la foule qui rejoignait le leader de NMH à s’en rompre les poumons. La chanson titre «In the Aeroplane Over the Sea» est venue adoucir les ardeurs, avant que «Naomi» soit allée chercher les plus grands adeptes de NMH.

«Oh Comely» s’est révélé sans surprise le clou spectacle. Les paroles fredonnées sur le bout des lèvres par quelques-uns, hurlées à tue-tête par d’autres, prouvaient que la formation de Georgie n’avait laissé personne indifférent au cours des dernières années. Ce moment rappelait grandement le concert de Mangum en solo à Montréal en 2011. À la finale épique tant attendue, les cuivres ne boudant pas leur plaisir, le spectacle était frissonnant. Les cris fusaient de toutes parts suite à ce morceau enlevant. Le band a ensuite interprété «Song Against Sex», un concentré de rock interminable, typique de l’alternatif des années 1990.

En rappel, NMH a livré les trois derniers titres manquants d’In The Aeroplane Over the Sea. «Ghost» et «Untitled» ont été quelque peu décevantes, en raison du brouhaha sonore qui ensevelissait les nuances, cachant la présence de plusieurs trompettes. Sinon, la présentation de «Two Headed Boy Pt 2» nous permettait d’oublier cette légère contrariété. Rares sont les chansons qui éveillent notre fibre sensible comme celle-là, le titre pénétrant par sa vulnérable délicatesse jusqu’à la moelle. Finalement, le concert s’est éteint sur «Engine», une composition minimaliste signée dans les années 1990, figurant sur le second EP paru en 2011.

En somme, le concert de Neutral Milk Hotel a séduit la foule compacte rassemblée à L’Olympia, acquérant les teintes de In the Aeroplane Over the Sea. Bouleversant, outrageant et délirant, on a eu droit à un rendez-vous sonore presque sans faille rempli d’une charge émotionnelle distincte.

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