SortiesHumour
Crédit photo : Louis Longpré
Moins de cabotinage, sauf au début du spectacle, qu’il commence en s’exprimant en ces termes: «Les gens me demandent souvent: “Fred, si ton humour était une paire de mollets, ce serait celle de qui?” Question classique, vous en conviendrez. Si mon humour était une paire de mollets, ce serait celle du Doc Mailloux, parce qu’il y a une partie concrète et il y en a une que tu dois imaginer!»
Plus crû et plus vulgaire que lors de son précédent spectacle, il garde tout de même la formule de base, c’est-à-dire d’énoncer des faits et de laisser parler l’absurdité de ceux-ci sans trop en ajouter. Fred Dubé ne fait pas rire aux éclats, mais c’est loin d’être négatif. Au contraire, les sujets abordés sont tellement lourds et graves, qu’insérer trop de blagues entre ceux-ci n’aurait eu pour effet que de tenter de dédramatiser des sujets qui ne peuvent l’être. Il suscite plutôt des réflexions, avec des commentaires punchés et très personnels. «Dans la société dans laquelle on vit, si on tue une personne, on fait de la prison, mais si on en tue des milliers, on est décoré. Un meurtre, t’es un meurtrier. Criminel de guerre, t’es un héros. Donc, mon conseil, si tu as déjà tué quelqu’un, ben lâche pas!»
Dans le même esprit, il parle aussi de son voyage au Vietnam, où l’agent orange lancé par les États-Unis pendant la guerre fait encore des victimes. «Ça s’est même étendu jusqu’au Cambodge. Mais ça, on en parle encore moins du Cambodge. Là, il y en a qui vont peut-être me dire que l’agent orange a quand même fait 250 000 morts au Cambodge. Oui, mais c’est parce que vous comptez en Cambodgiens. Transférez ça en argent américain, et ça fait seulement 2500. C’est quasiment rien. Une médaille!»
Mais Fred Dubé ne cherche pas à culpabiliser les gens. «Le gars qui va au Walmart. C’est pas de sa faute. C’est pas lui qu’il faut accuser. Il ne fait qu’agir en fonction de la société dans laquelle il vit et qui le dépasse. Il ne peut rien contre ça. D’où l’invention de la «petite part». On demande à tout le monde de faire sa petite part. Mais c’est tellement juste une façon de nous déculpabiliser, parce que c’est pas en faisant chacun dans notre coin notre petite part qu’on va arrêter le conflit israélo-palestinien. Comment on peut vivre dans une telle société et ne pas plus se révolter? On fait chacun notre petite part.»
On pourrait écouter Fred Dubé parler pendant des heures tant il maîtrise la langue et son sujet. Il parle de tout, avec éloquence, joue sur les sonorités des mots et réussit à formuler ses phrases de telle façon qu’on a pas besoin d’un punch au bout de la ligne. Définitivement, il est dans une case à part des autres, sauf pour ce numéro sur les magasins qui demandent trop d’informations personnelles à l’achat d’un objet quelconque (un siphon à toilette, dans ce cas-ci). Louis-José Houde a fait le même numéro dans son Show caché. La formulation, le sujet et même le punch final sont quasiment identiques. Seul l’objet en question change (une spatule, dans le cas de Houde). Étrange.
Dommage également que le spectacle se termine sur l’imitation de l’agonie de Philip Seymour Hoffman après l’overdose qui l’a tué en février dernier. De plus ou moins bon goût. Heureusement, à part ces quelques petits écarts, Fred Dubé sait garder le rythme durant son spectacle et l’attention de son public, qui boit ses paroles. Quasi littéralement.
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de la rédaction