L’exposition LES PASSAGERS – The World Around Us, Chapitre II de Michaël Bakouch à L’espace contemporain

Il y a quelque chose de cinématographique dans les images de l’artiste d’origine belge Michaël Bakouch prises à la station de métro Laurier en juillet 2013. Normal, direz-vous, puisque la direction photo est directement liée à la qualité esthétique d’un film. Peut-être aussi parce que Bakouch nous convie à pénétrer dans un lieu que plusieurs fréquentent quotidiennement, c’est-à-dire le métro, et que dans ce cas-ci, un nouvel angle de vue se présente sous les yeux des regardeurs. Comme plonger dans l’histoire d’un cinéaste.

D’emblée, le projet photographique de l’artiste belge occupe l’entièreté de L’espace contemporain à Montréal, qui expose le travail de divers artistes en grande partie dans le but de les faire découvrir au public. Lorsque le spectateur débute son immersion dans la production du photographe, il ne décrochera point des images qu’il a devant lui. Un texte débutant par la phrase «Je suis un passager sur terre» sert de préambule et de mise en contexte.

La photographie n^o1 donne le ton esthétique de l’ensemble des clichés. Du noir et blanc, mais surtout du noir qui tapisse et envahit le centre, le haut et le bas de la photo. Le blanc qui éblouit est ici à droite du cadre. Il s’agit de l’extérieur de la station de métro Laurier, plus précisément la porte qui permet d’entrer à l’intérieur du lieu qui fait l’objet d’une création artistique. Déjà, des zones sont marquées par le manichéisme (le terme ici n’est pas péjoratif) des couleurs et la texture de l’architecture de la station de métro se détaille.

LES PASSAGERS favorise une interprétation personnelle de chacune des photos. À titre d’exemple, la photographie n^o2 illustre un pan de ce lieu éphémère pour tous. Le nom «Laurier» est bien en évidence sur la bande noire, les cinq bancs rattachés au mur à différentes hauteurs sont vides et les passagers sont absents. Pourtant, des zones plus noires sur le mur, illustrant presque des cercles au-dessus de chaque siège, nous laissent imaginer que les humains passés par là ont laissé des traces…

Souvent associé à ce qui effraie, à la laideur et aux ténèbres, le noir est plutôt dans le cas présent majestueux, esthétiquement parlant. Il évoque la grandeur et le pouvoir d’une couleur sur un corpus et sa possibilité évocatrice; un peu comme l’est le travail de mise en scène. Même l’espace théâtral semble être représenté dans la photographie n^o3. On ne voit que le corps d’une femme de face, son chandail ainsi qu’un sac sur l’épaule droite, car presque tout est noir. Les lumières au plafond ainsi que la bande blanche qui délimite le début du quai forment un cadre rappelant celui du théâtre. Il s’agit d’une scène et nous sommes les spectateurs de cette pièce. Le public est convié dans le noir.

Avec un, deux ou zéro personnage, la photo frontale prise des cinq bancs, de la bande noire avec le nom «Laurier» en blanc est récurrente dans l’œuvre de cet artiste né à Charleroi en Belgique. Les photographies mettant en vedette une seule personne sont plus fascinantes parce que, le noir englobant tout, le protagoniste devient l’attrait central de l’image. Le décentrement des passagers est aussi visuellement plus intéressant, tout comme le choix de laisser un assez grand espace au-dessus de la tête sur le plan du cadre photographique. La photographie n^o13 est un bon exemple avec cet homme vêtu d’un tee-shirt assis sur le quatrième banc vers la droite.

La photographie n^o21 nous montre la sortie — c’est le cas de le dire puisque l’exposition se termine à ce moment visuel — de la station de métro Laurier. Les enseignes «Sortie» et «Laurier» sont bien en évidence, les rampes dans les escaliers ainsi que les fins néons au plafond sont ici telles des lignes tracées à même l’image. Pour le regardeur, c’est la fin d’un film, d’une pièce, d’une série.

L’exposition LES PASSAGERS, The World Around Us, Chapitre II est présentée à L’espace contemporain jusqu’au 16 février. La galerie d’art sera accessible au public les mardis et mercredis de 12h à 18h, jeudi et vendredi de 12h à 20h ainsi que samedi et dimanche de 12h à 17h. Entrée libre. Pour de plus amples informations sur l’exposition et les heures de présence de l’artiste, veuillez consulter le site web lespacecontemporain.com.