SortiesConcerts
Crédit photo : Mathieu Pothier
Il est déjà impressionnant de voir la complicité entre les musiciens de Groenland pendant leur installation. Le sextuor n’est pas un groupe torturé, il a au contraire du plaisir à jouer ensemble, à jouer pour les gens, à jouer tout simplement. Sa musique festive en est déjà un bon indicateur sur disque, mais de voir l’énergie et le dynamisme des membres du groupe en prestation mène le tout à un autre niveau. Chantant en sautant et en souriant à tout moment, la chanteuse Sabrina Halde s’est visiblement éclatée lors de leur dernier spectacle à Montréal pour cet album et a aisément rejoint la foule qui a eu envie de la suivre dans cette fête.
Même si la formation n’a offert aucune nouveauté – on aurait pu le croire, puisque leur seule offrande, The Chase, est parue il y a plus de deux ans déjà –, le fait d’entendre chacune des chansons de l’opus a rappelé à quel point cet album est truffé de pièces entraînantes qui auraient mérité plus d’expositions. «The Chase», livrée sans instruments électroniques mais pas sans énergie, «26 septembre», Halde au tambour en sautant, «Superhero» où les cordes se mêlent de magnifique façon au ukulélé de la chanteuse et au mélodica de Jean-Vivier Lévesque, et «Our Last Shot», notamment, n’ont pas manqué de faire taper la foule des mains et d’en faire danser quelques-uns.
Mais des morceaux plus posés, de style ballades, ont aussi ponctué la soirée, comme la belle «Daydreaming», qui a bien mis en évidence le violon de Ariane Gruet-Pelchat et les talents de Halde au ukulélé. Ce fut aussi le cas pour «Immune», avant laquelle la violoncelliste Gabrielle Girard-Charest a offert un moment instrumental tout à fait singulier en frottant son archet sur une longue scie, bougeant la pointe de l’outil pour changer de note, donnant un son chancelant mais étonnant, comme celui du thérémine. Deux reprises ont aussi été offertes au cours de la prestation, soit «Retrograde» de James Blake, et «Oblivion» de Grimes, toutes les deux présentées à la sauce Groenland, mais sans sons électro, et collant parfaitement à leur style.
Groenland est un groupe qu’il fait plaisir à voir aller. Quand le bassiste Simon Gosselin se balance avec son instrument en semblant chanter silencieusement toutes les paroles avec Sabrina Halde ou quand le batteur Jonathan Charrette quitte sa batterie pour aller au clavier avec Jean-Vivier Lévesque terminer la soirée avec un piano à quatre mains pour la douce «Our Hearts Like Gold» avant le rappel, on prend conscience de l’importance de chaque membre et de l’unité du groupe. Même si, il faut le souligner, Sabrina Halde a une voix singulière et irréprochable, et qu’à elle seule, elle assure comme personne.
Safia Nolin
«Allo! Ben vas-y, Joseph!» Telle fut l’introduction de Safia Nolin avant d’entamer «La laideur», deuxième pièce de son album à paraître le 11 septembre prochain, Limoilou. C’est vraiment sans cérémonie que Nolin se présente, en compagnie de Joseph Marchand à la guitare électrique. Peut-être parce qu’elle n’en a déjà plus besoin, surtout parce qu’elle est visiblement plus à l’aise derrière sa guitare et ses textes torturés que devant une foule et des interventions improvisées. Qu’à cela ne tienne, la timidité, voire la naïveté de la chanteuse ne saurait nuire à ses ballades mélancoliques qui nous prennent aux tripes.
D’ailleurs, le travail effectué avec Marchand est magnifique; aucun manque n’est ressenti malgré la livraison à deux guitares seulement, et l’ambiance créée est parfaite pour l’intimité du toit d’Ubisoft. Après «Valse à l’envers», «Acide» et «Si seulement», toutes présentes sur l’opus à venir, Nolin a réussi à faire rire l’audience en déclarant son amour à la fête de Noël avant de chanter «Noël partout», et en racontant une anecdote. «La prochaine, pour moi, c’est la chanson la plus deep ever, pis la semaine passée, je l’ai envoyée à la personne concernée et elle m’a répondu que c’était cute…!», s’est-elle presque offusquée, avec un ton rieur.
Safia Nolin ne pouvait évidemment pas clore cette performance d’une trentaine de minutes sans offrir «Ce matin» et «Igloo», les deux premiers extraits de son disque, mais ce qu’elle devrait faire, aussi, c’est de se faire confiance. Semblant beaucoup se fier à Marchand, ayant toujours l’air un peu incertaine et riant beaucoup avec nervosité, Nolin n’a visiblement pas encore assumé sa place sur scène et le fait qu’elle puisse attirer des foules. Oui, ses chansons sont béton et l’émotion véhiculée nous rentre dedans; oui, les gens viennent pour elle. La jeune auteure-compositrice-interprète gagnerait donc à ne pas avoir l’air de s’excuser, à laisser la gêne de côté et à assumer pleinement ses ballades sombres et profondes comme on les aime.
L'avis
de la rédaction