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Crédit photo : Danny Gauthier
D’où provient Maryla Sobek, cette artiste multidisciplinaire aux multiples facettes et au parcours tout aussi varié?
«Tout d’abord, la première chose que vous devez savoir c’est que je suis d’origine polonaise et, qui plus est, je suis avant tout une architecte puisque j’ai effectué mon cours en architecture en Pologne avant de poursuivre, également en architecture, en Algérie, endroit où résidait et travaillait ma famille. (…) J’ai également fait des études à Paris en mode, alors que la première école de mode ouvrait ses portes, puisque avant cette époque, pour faire ses classes dans ce domaine, il fallait travailler dans les maisons des couturiers et apprendre sur le terrain. (…) J’ai également travaillé pour la maison Balenciaga et Lanvin pendant un certain temps avant d’emménager au Canada.»
Nous supposons que votre immigration au Canada a concordé avec beaucoup de changements personnels et professionnels?
«Effectivement, puisque lorsque je suis arrivé ici, je devais recommencer à zéro, mais j’ai eu la chance d’être appuyée et aidée par de nombreux amis ici qui m’ont aidé à me lancer dans la mode québécoise qui, disons-le, était très différente de ce qui se passait en Europe à l’époque.»
L’exposition Taller: Les Traces donne suite à l’exposition Taller: L’Objet vêtement, présentée par Mme Sobek en 2010. C’est lors d’un voyage de plusieurs mois au Mali que la designer et professeure émérite de l’école Supérieure de Mode de l’UQÀM Maryla Sobek décide, à partir de son savoir en architecture et en mode, d’étudier la culture des Dogons, peuple du Mali. Subventionné par le Fonds Québécois de la recherche sur la société et la culture (FQRSC) dans le secteur des projets novateurs, elle analyse l’architecture de cette ethnie afin de recréer dans son exposition des vêtements architecturaux aux fibres organiques, reflet de cette culture malienne.
«À mon retour ce que j’ai retenu c’est que la matière utilisée pour la construction est organique avec des traces importantes de matières animales. (…) Tout est organique, animal et construit dans un mouvement similaire à celui du pétrissement du pain (…), une réutilisation constante de la matière.»
Mais, au final, quelle matière avez-vous utilisée pour votre exposition puisque les matières organiques et animales sont relativement variées?
«J’ai utilisé seulement les matières organiques animales. Ça n’aurait pas été très original d’utiliser, par exemple, de la laine, alors j’ai utilisé le crin de cheval, une matière merveilleuse (…) qui est très contraignante étant donné qu’elle est très peu produite et qu’elle ne peut excéder une certaine largeur puis, pour finir, fibre de laine et soie. J’ai par la suite utilisé les cinq figures emblématiques Dogons pour illustrer et fabriquer cinq vêtements. L’extérieur du vêtement est fait de crin de cheval; pour l’intérieur, j’ai développé une méthode de feutrage particulière du vêtement. Comme dans la culture Dogons, il n’y a pas de brique dans la construction ou rien qui perce et s’assemble; il n’y a aucune couture dans mes vêtements et en faisant des recherches, j’ai trouvé une méthode de fusion du vêtement qui, sous haute pression et chaleur, rassemble les deux parties du vêtement.»
Donc, aucune aiguille n’est utilisée?
«Non, aucune aiguille mais chaque vêtement peut être porté de 19 façons différentes et, ce qu’il faut retenir, c’est que chaque vêtement est le reflet d’un dessin architectural et d’une culture d’ailleurs.»
Vous pourrez retrouver le chef d’œuvre multidisciplinaire et le travail incommensurable de Maryla Sobek à la Galerie T (4710, St-Ambroise) du Centre Design & impression textile de Montréal (CDITM) du 27 mars au 26 avril. C’est un rendez-vous à ne pas manquer pour tous les amateurs d’art, de culture, d’architecture et de mode.