C'est la première fois que j'assistais à un concert d'Alexandra Stréliski... – Bible urbaine

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C’est la première fois que j’assistais à un concert d’Alexandra Stréliski…

C’est la première fois que j’assistais à un concert d’Alexandra Stréliski…

…et ce ne sera assurément pas la dernière!

Publié le 15 février 2020 par Éric Dumais

Crédit photo : ©Frédérique Ménard-Aubin, Festival International de Jazz de Montréal

Il y a quelque temps déjà que la douceur de son plus récent album Inscape accompagne mes balades solitaires à travers la ville. À force de l’écouter en boucle comme un mantra, il m’est revenu en tête une jolie citation de Voltaire que j’ai toujours trouvée pleine de poésie: «la beauté plaît aux yeux, la douceur charme l’âme». Voilà qui, à mon sens, décrit à merveille l’univers d’Alexandra Stréliski, cette pianiste néo-classique que j’ai enfin eu le bonheur de croiser lors d’une soirée intime sous le signe de l’émotion pure au Théâtre Maisonneuve de la Place des Arts.

En première partie: l’humour décomplexé de Léa Stréliski

«Sa musique, c’est un miracle. Un voyage au plus profond de notre cœur», nous a confié avec un léger trémolo dans la voix sa sœur aînée Léa Stréliski, qui a eu l’audace d’ouvrir la soirée avec un stand-up comique (!) d’une quinzaine de minutes devant les 1 400 spectateurs prêts à se laisser envoûter par la musique de la pianiste, sacrée Révélation de l’année au plus récent gala de l’ADISQ.

Je l’admets, je me sens un peu coupable. Car au moment où Alexandra Stréliski a annoncé sur sa page Facebook qu’elle avait lancé l’invitation à sa sœur humoriste, plus tôt cette semaine, j’avoue avoir été un peu surpris et sceptique qu’elle ait eu l’idée d’ajouter une pincée d’humour à un programme classique. Mais il faut la voir et l’entendre pour y croire:  avec sa drôle de dégaine – qu’on se le dise, elle parle un peu comme si elle était au bout de sa vie – et son naturel décomplexé, Léa Stréliski m’a (nous) a fait rire sans complexes.

Les sceptiques seront confondus, comme on dit.

Celle qui n’a pas du tout honte de jouer dans la cour de l’autodérision pour rendre un vibrant hommage à sa benjamine a lancé, au moment où on s’y attendait le moins, «Dans la famille, elle est Céline, je suis Claudette!». Je garde aussi en tête d’autres moments savoureux, dont sa lecture d’une chronique de Richard Martineau parue dans le Journal de Montréal, Les enragés, où le chroniqueur parle de la «méthode Stréliski», comme baume essentiel pour contrer la rage au volant. «Ma sœur LE calme!», elle a lancé. Ça, c’était bien envoyé, Léa.

Elle est fière de sa petite (grande) sœur, et ça paraît.

Puis, après un entracte d’une vingtaine de minutes, j’avais l’esprit un peu plus allégé et le corps plus détendu. J’allais bientôt avoir droit au moment que j’attendais tant.

Incursion dans le paysage intérieur d’Alexandra Stréliski

«Ma sœur ne vous a pas trop traumatisés?», a lancé Alexandra Stréliski, avec un sourire dans la voix, après avoir interprété quelques-unes de ses pièces derrière son instrument de prédilection. C’est avec la magnifique «Ellipse» qu’elle a ouvert le bal, une pièce qui fait belle figure au centre de son deuxième album, Inscape.

C’est que la pianiste et compositrice de 35 ans se fait un devoir, à l’instar de son contemporain Jean-Michel Blais, que j’aime tout autant, de démocratiser la musique classique pour que ce genre musical reste le plus accessible à tous. «J’ai juste pas envie que ce soit un récital de piano… Vous avez le droit de respirer et de tousser sur le beat», a-t-elle ajouté, un brin espiègle.

Plus la soirée avançait, et plus Alexandra Stréliski prenait ses aises.

Car même si elle était enfin de retour chez elle après une série de concerts l’ayant menée jusque sur le vieux continent, elle a avoué avoir eu le trac, plus tôt, dès son réveil. «J’avais comme l’impression que j’allais donner un concert de salon, mais avec 1 400 spectateurs!» Et si elle était autant nerveuse et fébrile, c’est bien parce que, pour elle, la Place des Arts est un lieu sacré. Sa première communion avec cette salle de spectacle date de 2013, année charnière où Laurent Saulnier l’a invitée à participer au prestigieux Festival International de Jazz de Montréal.

Plus elle ouvrait grandes les portes de son intériorité, et plus j’ai réalisé qu’Alexandra Stréliski était une artiste au grand cœur, près de ses émotions, et près de son public. L’espace d’une soirée, elle a su nous accueillir, en mots et en musique, dans ce paysage intérieur, cet inscape, qui représente en quelque sorte ce que les bouddhistes appellent le samsāra, ce cycle de la vie duquel les êtres qui n’ont pas encore atteint l’éveil sont pris.

Depuis Pianoscope, son premier album datant de 2010, elle en a vécu, des choses, cette Alexandra Stréliski. C’est en tout cas ce qu’elle a laissé entendre, lors qu’elle nous a confiés: J’ai frappé un mur; je me suis ramassé par terre».  En mode confidences, elle a souligné l’importance de ne pas renier son passé («sinon, mon show aurait été bien trop court!») et de tout mettre en œuvre pour atteindre ces points qui représentent en quelque sorte nos objectifs, nos idéaux.

«Aimez-vous donc tabar***! C’est ça, le néo-classique!»

Voilà, c’était dit. Et Stréliski, par cette affirmation, nous a confirmé qu’elle avait trouvé son amour propre, en plus d’atteindre son but ultime, devenir musicienne et en vivre.

Après nous avoir fait voyager à travers une odyssée musicale divisée en quatre chapitres, Alexandra Stréliski a invité sa sœur à revenir sur scène, cette fois pour chanter, en guise de rappel, une bonne fête à sa maman. Une façon toute «stréliskiesque» de clore ce moment spécial sous le signe de l’humour… et de l’envoûtement!

De cette soirée, je retiens la douceur et l’émotivité des mélodies jouées, mes favorites étant «Plus tôt», «Prélude», «Par la fenêtre de Théo» et «Burnout Fugue», qui m’ont à plusieurs reprises fait monter les larmes aux yeux.

Et jamais je n’oublierai cette voisine de siège qui a eu la merveilleuse idée, durant l’un des moments les plus envoûtants du concert, de se déballer une… gomme. Elle a poussé l’audace jusqu’à en offrir une à sa fille, qui a eu la bonne idée de décliner.

Vous vous en doutez, je l’ai remerciée silencieusement.

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