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Crédit photo : Victor Diaz Lamich
Oubliez l’image de chanteuse timide ou effacée que vous auriez pu vous faire jusqu’ici de Basia Bulat. Sur la scène du Club Soda, jeudi soir, c’est plutôt une artiste en grande maîtrise de ses moyens, confiante, et tout à fait rayonnante et flamboyante, qui est apparue toute d’or scintillant vêtue. Et ce large sourire qui témoignait de son bonheur d’être sur scène chez elle: il a été présent de la première à la dernière note. Bulat est charmante – adorable, même -, et dès les premiers éclats de «Fool» entendus, ainsi qu’une introduction toute en français, le public savait qu’il aurait droit à toute l’authenticité et à la sincérité dont cette artiste est capable.
Car rien n’est caché chez Basia Bulat: ses chansons sont livrées avec tellement de sensibilité et d’émotion dans la voix que chaque morceau nous happe, d’autant plus qu’avec son assurance nouvelle, l’artiste nous regarde en chantant, comme pour nous interpeller davantage encore, comme pour qu’on pénètre avec elle dans son intimité. Car elle est là, et a tout à livrer. Et il faisait plaisir de constater que, sur scène, les chansons de Good Advice se révélaient plus saisissantes que sur disque, où les enrobages artificiels nuisent parfois au propos.
C’est aussi sans doute la façon qu’a la chanteuse de performer qui nous saisit: que ce soit devant son pied de micro, laissant danser ses bras, ou micro à la main, bougeant ici et là sur la scène, près de ses musiciens ou près de la foule, chantant à un jet de pierres d’un spectateur – presque pour lui, pendant un instant -, avec une tambourine, une guitare acoustique, une autoharpe, un charango ou, encore, assise au clavier, Bulat impressionne. Non seulement elle maîtrise parfaitement un bon nombre d’instruments, mais en plus elle le fait avec une aisance presque déstabilisante, tout en occupant bien la scène et tenant son public en laisse constamment.
Une vraie magicienne, envoûtante.
«Tout est correct? Est-ce qu’il y a des questions ou commentaires?», a demandé l’artiste après avoir fait taper les gens des mains pendant «In The Name Of», déclenchant des rires. Entonnant la dansante «La La Lie», tambourine à la main, se laissant elle-même aller à quelques pas de danse, Bulat a ensuite enchaîné avec celle qu’elle présente comme étant son slow dance. «So you can find someone close to you. You don’t have to know them! But ask first!», a-t-elle prévenu, en invitant son auditoire à danser langoureusement sur «Time». Après que les rires du public se soient estompés, c’est à un sublime numéro que les spectateurs ont eu droit, aux doux éclairages mettant en valeur les bras dansants de la chanteuse.
«Maybe we’ll play some folk music, now!», a-t-elle ensuite offert au public, changeant complètement l’ambiance en prenant sa guitare acoustique pour interpréter d’abord «Heart Of My Own» puis «Run» et «In The Night», des succès de ses deux premiers disques, Heart of My Own (2010) et Oh, My Darling (2007). L’autoharpe bien en place dans ses bras, la chanteuse a même offert un solo chaudement applaudi durant «In The Night», qui a vu des faisceaux lumineux se braquer sur Bulat, créant un magnifique moment intime – ses musiciens ayant quitté la scène pour ce numéro -, durant lequel le public s’est spontanément mis à taper des mains pour suivre le rythme.
S’arrêtant à un moment pour annoncer qu’elle prenait les demandes spéciales, Basia Bulat a fait bien des heureux en interprétant «Five, Four» et «Paris or Amsterdam», non seulement car plusieurs personnes lui ont crié ces suggestions, mais aussi parce que ces deux interprétations furent tout simplement remarquables. Ne sachant plus où donner de la tête devant tant de demandes, ce sont seulement ces deux morceaux que l’artiste a décidé de livrer, mais les deux l’ont été de façon si sensible et touchante que nul n’aurait pu se plaindre.
Si le passage de Tim Kingsbury, membre du populaire groupe Arcade Fire et aussi réalisateur du précédent album de Basia Bulat, Tall Tall Shadow (2013), est plutôt passé inaperçu pendant «Tall Tall Shadow» (malgré tout appréciée du public), la performance globale de Bulat, elle, n’a certainement pas pu l’être. Revenant au rappel avec son charango à la main, «un instrument bolivien, qui n’est pas habitué à nos -38°C de la semaine dernière», pour interpréter une hyper touchante «It Can’t Be You», la chanteuse nous aura conquis jusqu’à la toute fin, de par sa polyvalence, sa voix poignante, son charme certain, son authenticité, son aisance et sa joie d’être là, sur scène, à Montréal.
D’une générosité infinie, elle n’a pas hésité à remercier de nombreuses fois ses musiciens et son public, et même à descendre parmi la foule durant l’ultime «Wires», comme dans une tentative de la séduire, comme si elle ne se doutait pas que c’était fait depuis longtemps, déjà.
L'événement en photos
Par Victor Diaz Lamich
L'avis
de la rédaction
Grille des chansons
1. Fool
2. Let Me In
3. Long Goodbye
4. In the Name Of
5. La La Lie
6. Time
7. Heart Of My Own
8. Run
9. In The Night
10. Five, Four
11. Paris or Amsterdam
12. Good Advice
13. Tall Tall Shadow
14. Infamous
Rappel
15. It Can't Be You
16. Someday Soon
17. Wires