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Crédit photo : Sébastien Roy, Daniel Wong, Frédéric Chais et Nathalie Duhaime
Un bassin circulaire trône au centre de la Satosphère, dans la pénombre. Peter Trosztmer agit à titre d’hôte et nous propose littéralement de prendre place sur les coussins disséminés autour de la pièce. L’humour du chorégraphe et interprète est palpable et partagé avec son complice Zack Settel: on instaure une atmosphère agréable, saine et conviviale. Une petite lumière est passée de main en main jusqu’à ce qu’elle ait fait le tour du public. Le geste sera repris plus tard avec une bougie, comme pour mettre en lumière la beauté d’être ensemble, de partager un moment présent avec des inconnus, tous venus dans le même désir d’être témoin d’une bulle hors du temps. Collectivement.
Aqua Khoria offre une plongée dans un univers où les perceptions sont au-delà du réel. Par un système de caméra optique, la technique crée une sensation de faire partie du monde dans lequel Peter Trosztmer se meut. Au-dessus d’un océan infini, de multiples bouées résonnent et se balancent au gré des vagues. La magie opère lorsque le corps du danseur devient maître de l’océan. Par une construction progressive de mouvements de plus en plus amples, l’interprète au centre du bassin orchestre une tempête grandiose qui viendra l’engloutir magnifiquement jusqu’aux profondeurs des eaux. L’image est incroyable, enrichie par la composition sonore de Zack Settel qui alimente l’environnement visuel.
Le voyage ressemble à un jeu vidéo géant, dans lequel on entre dans différents niveaux, différents décors. Visite d’une épave, grotte de glace, caverne préhistorique ou tunnel, les mondes changent, transformant aussi la danse et la musique. Parfois méditatif, parfois impétueux, le corps de Peter Trosztmer ondule et se sculpte de façon très précise et organique dans l’environnement qui l’accueille. La qualité du mouvement est virtuose tant par les nuances proposées que par la pureté de chaque détail – musculaire, osseux, énergétique. Le créateur a su imprégner l’univers de sa trace et inversement.
Qualité ou faiblesse selon les moments, les transitions sont assez abruptes. Le design d’un monde à l’autre change souvent par l’utilisation du noir dans le dôme, d’où l’impression de transportation plutôt que de transformation dans un voyage fluide. Pourtant, les créateurs réussissent à surprendre lorsque dans le noir complet, on entend une goutte, puis deux, trois… Une lumière rasante éclaire alors le bassin et notre œil comprend. Une chute d’eau provenant du sommet de la Satosphère offre un nouveau jeu pour le corps – presque nu – du danseur. L’image est poétique et renouvelle l’utilisation thématique de l’eau; organique, tourbillonnante, flottante.
Le duo de concepteurs semble avoir ouvert une nouvelle porte dans les possibilités de rencontre entre mouvement, son et technologie. Eux-mêmes s’étonnent encore de «l’immense potentiel de ce mélange de médiums». L’expérience est réussie et donne envie d’en voir davantage.
Ce n’est que le début d’un grand voyage… sans fin.
L'événement en photos
Par Sébastien Roy, Daniel Wong, Frédéric Chais et Nathalie Duhaime
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de la rédaction