«Lux» de Brian Eno: et la lumière fut – Bible urbaine

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«Lux» de Brian Eno: et la lumière fut

«Lux» de Brian Eno: et la lumière fut

Publié le 21 novembre 2012 par Simon Fortin

Plus de trente ans après le classique Ambient 1: Music for Airports (1978), Brian Eno effectue un retour aux sources. Toujours sur le label électro Warp Records mais bien loin de l’hybride techno-ambient Small Craft on a Milk Sea (2010), Lux est un album dans la plus pure tradition de la musique ambient, d’une sobriété et d’une simplicité désarmantes qui contrastent avec les normes de l’industrie musicale actuelle.

D’abord claviériste pour le groupe glam rock Roxy Music, Brian Eno s’est surtout fait connaître par son travail de producteur. Il a travaillé, entre autres, avec David Bowie, les Talking Heads, U2, Depeche Mode et plus récemment Coldplay. Eno est donc avant tout un ingénieur du son bien plus qu’un musicien. C’est dans cette optique que son premier disque de musique atmosphérique Ambient 1: Music for Airports a été conçu: comme une pièce d’architecture sonore dont la fonction est de détendre les passagers en transit à l’aéroport. Un pièce musicale avec un son discret qui sert de musique de fond reposante sans être intrusive. Cet album a défini le genre musical ambient (terme inventé par Eno lui-même) et inspiré des milliers d’artistes du son.

Tout comme Music for Airports, Lux a été d’abord conçu comme une installation sonore. Elle fut d’abord diffusée dans le Palais royal de Venaria près de Turin, en Italie. Par la suite, l’installation a fait le tour du monde et a été diffusée dans plusieurs galeries d’art. C’est donc sans réelle surprise que l’album a joué, après son lancement, à l’aéroport de Tokyo. Il faut approcher Lux un peu comme le petit frère de Music for Airports et des autres installations sonores de Eno (The Shutov Assembly et Thursday Afternoon). C’est un opus bien loin des normes de la musique ambient contemporaine comme l’a défini la nouvelle génération de créateurs qui expérimentent beaucoup avec les effets d’écho, de dégradation sonore et de feedback (voir Tim Hecker et William Basinski).

Le son de Lux est doux, léché, presque cristallin. Des notes de piano minimalistes accompagnent des accords de violon qui se déploient dans le temps avec lenteur. Certains passages évoquent une ambiance mélancolique, mais l’album ne sombre jamais dans la tristesse. Il s’en dégage, au contraire, une sorte d’atmosphère sereine et contemplative. Il faut écouter cette œuvre comme on écoute le son de la pluie; c’est un environnement sonore enveloppant, calme et reposant. Lux est constitué de quatre pièces d’une vingtaine de minutes chacune, mais on peut facilement l’envisager comme une boucle qui recommence à la première pièce lorsque la quatrième se termine et le faire jouer en loop chez soi comme musique de fond.

La simplicité de cette œuvre déstabilise à la première écoute. Mais Lux est un disque contemplatif dont l’appréciation grandit à chaque fois qu’on le fait jouer. C’est, en somme, un disque au-delà des modes qui sera toujours actuel dans dix ou vingt ans. Plusieurs reprochent à Eno de ne pas s’être réinventé avec cet album, d’avoir appliqué la même recette qui l’a rendu populaire et c’est effectivement le cas. Si vous cherchez les innovations musicales et l’expérimentation, tenez-vous loin de cet album. Par contre, si vous appréciez la musique dans ce qu’elle a de plus simple, jetez-y un coup d’œil. Lux distille l’essence même de la musique. Quelque chose d’antérieur à la découverte du rythme par les premiers hommes: l’appréciation des sons qui nous entourent.

Appréciation: ****

Crédit photo: Warp Records

Écrit par: Simon Fortin

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