«Les albums sacrés»: les 10 ans de good kid, m.A.A.d city de Kendrick Lamar – Bible urbaine

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«Les albums sacrés»: les 10 ans de good kid, m.A.A.d city de Kendrick Lamar

«Les albums sacrés»: les 10 ans de good kid, m.A.A.d city de Kendrick Lamar

Un album concept qui s'écoute comme une œuvre cinématographique

Publié le 25 octobre 2022 par Jean-Benoit Perras Nolet

Crédit photo : Aftermath / Interscope

Peu d’artistes peuvent se vanter d’avoir créé une œuvre faisant partie de cursus universitaires. C’est le cas de Kendrick Lamar avec «good kid, m.A.A.d city». Est-ce vraiment une surprise pour un artiste qui, deux albums plus tard, s'est vu remettre le prix Pulitzer en musique, prix qu’il est le seul à avoir gagné à ce jour dans son genre musical? Kendrick Lamar Duckworth est un artiste spécial qui a changé le paysage musical dès qu’il est débarqué avec son deuxième opus.

Ne faisant rien comme les autres, Lamar choisit de présenter un album concept: good kid, m.A.A.d city.

La pochette indique la mention «A short film by Kendrick Lamar». C’est un sous-titre judicieux, puisque l’œuvre se laisse écouter à l’instar d’un film.

On y suit les tribulations du protagoniste, K-Dot, alors qu’il est en train de passer à l’âge adulte. Il rencontre des filles, chill avec ses amis, vole une maison et s’interroge sur son avenir dans un endroit comme Compton, où les gangs font la loi et où son innocence s’effrite.

«Everybody sit yo’ bitch-ass down and listen to this true motherfuckin’ story told by Kendrick Lamar on Rosecrans, ya bitch»

L’opus s’ouvre sur«Sherane aka Master Splinter’s Daughter», qui sert plutôt d’introduction à l’histoire que Kendrick Lamar s’apprête à nous raconter. Ça fait penser à la scène d’ouverture de Reservoir Dogs, au moment où les voleurs discutent de pourboire et de «Like A Virgin» de Madonna, ou encore celle du mariage de la fille du parrain dans The Godfather. En vrai, ce ne sont pas des moments qui font avancer l’histoire, mais ils sont très importants pour que l’auditeur (ou le spectateur) saisisse bien l’univers dans lequel il s’apprête à entrer.

«Bitch, Don’t Kill My Vibe» est davantage un constat sur l’état de la musique hip-hop du moment qu’une partie de la trame narrative, mais elle demeure importante dans l’établissement de l’état d’esprit de K-Dot, et également de Lamar. Il y critique la superficialité des gens dans l’industrie musicale et explique comment il veut s’élever plus haut avec son art.

Avec «Backseat Freestyle», l’un des meilleurs morceaux de l’album, c’est à ce moment précis que l’histoire prend réellement son envol. Notre protagoniste s’amuse avec ses amis dans sa voiture jusqu’à ce tout dégénère lors d’un cambriolage, dans «The Art of Peer Pressure», duquel il échappera à la police de justesse.

«Brace yourself, I’ll take you on a trip down memory lane, This is not a rap on how I’m slingin crack or move cocaine»

À cet endroit précis du disque, le choix artistique de Lamar l’éloigne encore plus du reste du contingent hip-hop. Dans les chansons qui suivent, on sent le rappeur troublé par ce qui se passe autour de lui. Et plus encore, on n’entend pas, à travers ses textes, la bravade d’autres rappeurs. De fait, il ne glorifie ni le sexe, ni la drogue, ni la misogynie, ni le style de vie gangsta.

Il s’adonne surtout à une sérieuse réflexion sur ce style de vie et sur sa propre place dans cet univers qui l’entoure.

«Good Kid» et «M.A.A.D City», plus particulièrement, font état de ce combat intérieur qui le ronge et qui pourrait l’emmener vers la mort: s’il ne se joint pas à un gang, il se retrouvera alors sans protection, et s’il le fait, il deviendra un homme marqué par les gangs adverses…

Quelles sont les issues possibles pour le jeune K-Dot?

«Now everybody serenade the new faith of Kendrick Lamar, This is King Kendrick Lamar»

Le single «Swimming Pool (Drank)» peut paraître comme une simple chanson festive, mais elle est essentielle pour la trame narrative du disque, alors que les amis de K-Dot souhaitent le venger après qu’il ait été tabassé.

Et les évènements qui suivent mènent au décès de l’un de ses proches…

«Sing About Me, I’m Dying of Thirst» et «Real» servent de conclusion à sa réflexion sur son milieu et aux choix que doit prendre son protagoniste, notamment changer sa vision de la vie.

Il devient alors Kendrick Lamar et non plus le jeune K-Dot qui se cherchait dans un monde qui n’était pas fait pour lui.

Ce n’est pas pour rien que le magazine Rolling Stone a récemment nommé good kid, m.A.A.d city comme étant le meilleur album concept de tous les temps et que ce dernier est maintenant enseigné sur les bancs d’école.

C’est un tour réel tour de force, autant musicalement parlant qu’au niveau de l’écriture.

Les meilleurs albums concepts sont souvent ceux dont les chansons connaissent un succès sans qu’elles aient besoin d’être écoutées avec le reste de l’opus. On peut penser à «Ziggy Stardust» de David Bowie ou encore «Money» de Pink Floyd, par exemple.

C’est le cas ici avec les singles «Bitch, Don’t Kill My Vibe» et «Swimming Pool (Drank)», qui ont obtenu un succès retentissant.

C’est vraiment un parcours sans faute pour le jeune rappeur.

Et ce n’est pas son dernier.

Surveillez la prochaine chronique «Les albums sacrés» en novembre 2022. Consultez toutes nos chroniques précédentes au labibleurbaine.com/Les+albums+sacrés.

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