«Les albums sacrés»: le 30e anniversaire de Frizzle Fry de Primus – Bible urbaine

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«Les albums sacrés»: le 30e anniversaire de Frizzle Fry de Primus

«Les albums sacrés»: le 30e anniversaire de Frizzle Fry de Primus

Du bon rock bien frit (et bien fait)!

Publié le 24 février 2020 par Édouard Guay
Primus sucks! Primus sucks!, chantonnent les amateurs du groupe au début de chaque concert. Au premier abord, on pourrait s’en offusquer, mais les adeptes du trio, originaire de Californie, savent bien à quel point il s’agit du plus beau compliment qu’on peut leur faire. Bien plus qu’un groupe, Primus est devenu un véritable culte au courant des années 1990. Très théâtrale et dotée d’un sens de l’humour bien à elle, l’inclassable formation, menée par Les Claypool, allait amorcer le premier chapitre de sa légende avec Frizzle Fry, lancé en février, il y a de cela trois décennies.

Mais comment décrire le son de Primus à un non-initié (à celui qui pense que «Primus sucks» est une insulte)? Est-ce du funk-rock? Du rock progressif? Du funk-métal? On s’en fout un peu. Primus fait… du Primus, et c’est parfait comme ça. Décortiquons un peu le phénomène ensemble.

Donner à la basse ses lettres de noblesse

Dans un groupe rock dit «classique», le bassiste est souvent relégué au second plan et son instrument est enterré sous les guitares électriques. Mais ne comptez pas sur Primus pour reprendre une formule usée à la corde. Eh oui, ici, c’est la guitare qui suit les lignes de basse, et non l’inverse!

L’excentrique chanteur Les Claypool, probablement l’un des bassistes les plus uniques et badass au monde (mais tout de même refusé en audition par Metallica), met sa basse bien en évidence et la juxtapose avec sa voix si particulière. Ajoutez-y un son syncopé et déconstruit, rappelant Mr. Bungle sur l’acide ou Frank Zappa en révolte, et vous obtenez le son tout à fait «incopiable» de Primus.

Avec Frizzle Fry, leur premier album officiel, les trois comparses virtuoses de Primus nous invitent dans un univers étrange, peuplé de personnages colorés, comme John le pêcheur et Monsieur je-sais-tout. Enregistré en seulement deux semaines avec les moyens du bord (c’est-à-dire presque rien), l’album allait devenir un classique pour sa capacité à nous donner des claques, et qu’on en redemande ensuite!

Défier les lois de la tradition en 50 minutes top chrono

Frizzle Fry entame ce bal bizarroïde avec «To Defy the Laws of Tradition», un morceau qui définit si bien la mission musicale de Primus: envoyer promener les belles coutumes. C’est une chanson-manifeste qui met bien la table pour ce qui nous attend.

Cette volonté de ne pas se prendre au sérieux et de ne rien faire comme les autres n’enlève toutefois rien au propos du groupe. Sur la furieuse et contestataire «Too Many Puppies», le groupe se positionne contre la guerre: «Too many puppies being shot in the dark / Too many puppies are trained not to bark […] Too many puppies / With guns in their hands/ Too many puppies in foreign lands.» Ce morceau allait s’avérer tristement prophétique, puisque la guerre du Golfe allait s’amorcer six mois plus tard…

Malgré la basse omniprésente de Claypool, Frizzly Fry démontre bien également la virtuosité de l’ensemble des musiciens. Les amateurs de guitare ne seront pas en reste avec les riffs de Larry «Ler» Lalonde, notamment sur «Harold of the Rocks» (la pièce la plus sous-estimée de l’album) et l’accrocheuse «Groundhog Day». Idem avec la batterie de Tim «Herb» Alexander, qui démontre bien à quel point sa technique est impressionnante, entre autres sur «John the Fisherman», le premier succès radiophonique du groupe.

Après la friture, passons au fromage!

Si Frizzle Fry est un album marquant, c’est aussi parce qu’il préparait habilement le terrain à une autre œuvre marquante de Primus, le fabuleux Sailing on the Seas of Cheese, qui allait sortir un an plus tard, plus exactement en 1991. Le groupe allait aussi se faire connaître en 1997 en composant la chanson-thème de la célèbre émission South Park. Et encore aujourd’hui, le groupe roule sa bosse et continue de jouer plusieurs des morceaux de ce Frizzle Fry.

Et il faut voir ces compositions jouées sur une scène pour bien comprendre à quel point elles peuvent galvaniser une foule, en particulier les adeptes de métal et de headbanging. Disons qu’il faut faire attention à ses ménisques!

Derrière ses allures de disque technique, étrange et parfois un brin répétitif (non, ce n’est pas un album parfait) se cache un petit bijou d’inventivité qui constitue encore un défi pour tous les bassistes, même les plus aguerris.

Surveillez la prochaine chronique «Les albums sacrés» en mars 2020. Consultez toutes nos chroniques précédentes au labibleurbaine.com/Les+albums+sacrés.

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