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Crédit photo : Republic
À l’instar du film, on réalise bien vite, à l’écoute de la trame sonore, qu’il y a bien peu de matériel ici pour passer l’épreuve du temps. Non seulement les pièces sont loin d’être mémorables, à défaut d’être écoutables, mais en plus d’éviter l’effet «Unchained Melody» de The Righteous Brothers dans Ghost, ou la tout aussi sirupeuse qu’irrésistible «Take My Breath Away» de Berlin dans Top Gun, il est loin d’être certain que l’on a envie de se remémorer la perte de la virginité d’Ana ou les séances de flagellation dans la salle de jeux (oui, c’est une façon gentille de dire donjon, finalement).
Sinon, à l’inverse, on pourrait encore moins conseiller le disque comme musique ambiante dans le but d’enflammer vos soirées collées et arrosées. Par exemple, si The Weeknd continue de nous livrer ses airs élégants et sensuels sur «Earned It» et «Where You Belong», il gâche rapidement la sauce avec sa voix plaintive et ses démultiplications d’effets démodés. De son côté, Annie Lennox, à défaut d’avoir la force de voix nécessaire pour s’y coller, fait du mieux qu’elle peut dans sa reprise peu inspirée de «I Put a Spell on You». De plus, au fur et à mesure que le disque avance, la sensualité prend le bord pour faire place peu à peu à ce qui s’apparente dramatiquement à une séance de sexe particulièrement triste et mélancolique… Pas génial donc!
Ainsi, difficile de prendre au sérieux ces remodelages ralentis et rapidement ridicules de «Haunted» et «Crazy In love», deux pièces de Beyoncé, où elle semble elle-même s’ennuyer et s’épuiser à force de pousser trop loin l’interprétation dite sensuelle. Même Sia, qui a l’habitude de se démarquer habilement du lot, impressionne bien peu avec la berceuse tristounette qu’est «Salted est».
Difficile de justifier également l’ajout des deux vieilles pièces «Beast of Burden» de The Rolling Stones et «Witchcraft» de Frank Sinatra, bonnes, mais qui cadrent difficilement dans le tout. Si au moins, on avait pris exemple sur la saga Twilight (après tout Fifty Shades of Grey en est dérivé!) et qu’en plus d’un lot sympathique de pièces originales d’artistes du moment, on avait profité de l’entreprise pour y inclure de jolies pièces de piano (comme Christian joue évidemment de cet instrument), mais il n’en est rien. Vous ne trouverez pas de Debussy ici. De quoi admettre que même les deux compositions instrumentales, modernes et aguichantes de Danny Elfman, entassées à la toute fin, redorent à peine le blason déjà fort souillé du projet d’ensemble.
Ainsi, dans les bons coups, on s’emportera à moitié avec l’entraînante, mais préfabriquée «Undiscovered» de Laura Welsh ou la volatile «One Last Night» de Vaults qui rappellera la scène de vol en avion dans le film. On aura également autant de plaisir que de rires à fredonner un peu malgré soi l’accrocheuse «Love me Like You Do» de Ellie Goulding, habituée au genre de tubes pop qui collent à la peau.
Enfin, s’il n’y avait qu’une pièce à écouter, c’est décidément la reprise inattendue de la pièce «I’m on Fire» de Bruce Springsteen. Celle-ci est interprétée avec fougue par le groupe Awolnation qui sort considérablement de ses sentiers habituels. Mais au-delà de cela, nos oreilles ne s’agitent que bien peu. De quoi s’en remettre au titre de la pièce instrumentale finale «Did That Hurt?». Question judicieuse qui pourra être posée à tous, le spectateur en premier.
La trame sonore de l’adaptation cinématographique de Fifty Shades of Grey est disponible en magasin dès maintenant.
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de la rédaction