MusiqueLa petite anecdote de
Crédit photo : Patrick Kelly
Petites leçons de fxmmes à fxmmes en musique
Il est 15 h 30, Marie commence à rentrer son drum, Élizabeth installe sa basse, et Jeff étale ses pédales. On vient d’arriver en Communauto pour une gig au 228, rue Saint-Joseph. C’est pour le Festival d’Été de Québec et on est un band très féministe en lineup avant Black Taboo et Le Roi Heenok.
Je dépose ma guitare et j’entends: «Votre soundcheck n’était pas à 16 h?»
Je m’apprête à répondre, mais je me rends compte qu’il ne s’adresse pas à moi, mais à Jeff.
Première petite leçon de femme en musique: les gens vont souvent avoir tendance à s’adresser au plus barbu de la gang. Il faut donc soit se laisser pousser le pinch, soit apprendre à insérer sa dominance. Pas besoin de pisser nulle part; d’habitude, une petite poignée de main en se présentant devrait suffire. Garde-toi quand même de l’urine au cas où ça ne fonctionne pas.
Justement, là, ça ne fonctionne pas.
Deuxième petite leçon: Apprendre à parler le langage du tech.
Ça les met en confiance et ça les empêche de commencer à t’expliquer des choses comme:
- Comment fonctionne un ampli de basse;
- Qu’est-ce qu’un feed-back;
- Le classique de te faire demander tu es la blonde à qui.
Tous ces exemples proviennent d’’expériences vécues en 2020.
Par exemple, dans la situation présente, le soundman s’entête depuis vingt-cinq minutes à essayer de faire fonctionner un vieux micro avec du duvet autour qui sent le fond de futon. Personne ne m’entend sur la scène, et ça feed tellement que tous les chiens du voisinage doivent pleurer.
Alors, j’utilise la technique numéro 2.
«Est-ce qu’on pourrait juste mettre un SM58 svp?»
…aucune réponse.
Finalement, tandis que je lui demande un SM58 pour la quatrième fois, je l’entends murmurer dans sa barbe: «sti…c’est juste des débutantes…»
Éli aussi l’entend. On se regarde. Impossible.
Première option qui m’est passée par la tête: si tu as encore l’urine de la leçon 1 sous la main: pitch-lui dessus.
Troisième petite leçon: Respire, you’re a boss ass queen pis c’est pas eux qui font le show, c’est toi. Sois la plus Dalaï Lama des deux.
Donc, j’opte pour un safe mais sévère: «Quoi?»
«Mffhmhffhmhfmhh», fut sa réponse. J’ai finalement eu mon SM58, et on a fait une titi de bonne première partie à Black Taboo.
La semaine d’après, j’ai parlé de mon expérience avec ce soundman à un de mes potes tech de scène. Il m’a dit: «Ouais, je sais comment il est. Mais t’sais, Mélo, c’t’un gars de la vieille école».
Le truc, c’est qu’honnêtement, qu’il vienne de la vieille école, qu’il vienne de finir son cours à Montmagny ou qu’il vienne de Poudlard, l’important, c’est de traiter de façon respectueuse et égalitaire tout.E.s celles et ceux avec qui il travaille.
On n’est pas resté pour bouncer avec Black Taboo et le Roi Heenok. Mon interaction la plus mémorable avec Black Taboo a été quand l’un d’eux est sorti des toilettes alors que je rapatriais mes affaires.
Mon imposant 5’2 parmi ces armoires à glace m’apostrophait pratiquement d’un statut de fantôme.
Alors, quand l’un d’eux est sorti du petit coin en élaborant sur la taille du trésor qu’il venait de libérer dans les toilettes et qu’une petite touffe de cheveux roux, sous lui, lui a dit: «Bye, bon show là», il s’est senti un peu gêné.
C’était drôle.