«Indien», le troisième opus de Clément Jacques – Bible urbaine

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«Indien», le troisième opus de Clément Jacques

«Indien», le troisième opus de Clément Jacques

Se découvrir d’autres racines

Publié le 29 avril 2014 par Alice Côté Dupuis

Crédit photo : Music Mansion

C’est en s’isolant pendant un mois dans un camp de chasse que l’auteur-compositeur-interprète saguenéen Clement Jacques a confirmé s’il possédait, quelque part au fond de lui, les mêmes racines autochtones que son défunt grand-père. Si ce voyage introspectif ne l’a pas sorti complètement de ses tourments amoureux qui sont reflétés dans ses paroles, il lui aura à tout le moins fait découvrir un tout autre artiste qui sommeillait en lui. Exit les ballades folk du Maréographe: sur son troisième opus, intitulé Indien, place au rock alternatif à tendance grunge!

Dès l’introduction, «Ushket», où distorsion et sons électroniques s’entremêlent de façon chaotique, jusqu’à la percutante et animale conclusion, «Ushpik», l’oreille est captivée par le troisième projet de Clement Jacques. Réelle surprise, le tournant électrique pesant d’Indien détonne d’avec ses albums précédents (Consumed and Guilty, 2009; Le Maréographe, 2011). D’ailleurs, il avertit lui-même ses auditeurs dans son message d’introduction du livret: «Pour ceux et celles qui sont fans du Maréographe, je m’excuse. Pour les autres, bienvenue dans une autre moitié de moi, une partie déchirée, en rupture avec le confort et l’aisance».

«Le vent est tombé, le feu est mort / Y’a pu rien autour, mon ancienne vie s’évapore», chante à ce sujet l’artiste nouveau sur «L’homme que j’étais», une chanson à la fois sensible et à tendance grunge. Les thématiques de l’opus sont claires: le renouveau, la découverte d’un nouveau soi, d’un nouveau mode de vie. Sur «Le chat», l’un des morceaux les plus électriques et pesants de l’album, il confie d’ailleurs: «Prendre le bord, jamais revenir jamais / Aller mourir au Tibet pour se refaire une vie / La où y’a personne qui t’connait».

À croire les paroles de chansons comme «Tiroir», Clement Jacques avait bien besoin de se retrouver et de faire du changement dans sa vie. Entre les «Mes doigts sentent la smoke, mon tiroir, la dope», et les «J’me saoule encore vu que l’amour est rare / Dans le même vieux bar à dépenser tout mon or», l’artiste démontre non seulement le désordre et le chaos qui régnaient dans son ancienne vie, mais aussi le fait qu’il est de ceux qui produisent des albums et jouent de la musique pour eux-mêmes, avant tout. Véritables exutoires, ses textes l’aident sans doute à démêler sa vie et à l’organiser, mais sont souvent très personnels et sans réel attrait ni intérêt pour l’auditeur.

C’est d’ailleurs peut-être ce chaos intérieur qui a poussé Clement Jacques à vouloir jouer fort sur Indien. Les basses et les guitares électriques à la forte distorsion sur toutes les pièces, les voix dédoublées sur près de la moitié des chansons et, parfois, des sonorités électroniques créent des ambiances très lourdes et percutantes. Parsemé de solos énergiques, électriques et de finales instrumentales assez longues, l’album pourrait certainement être qualifié de «bruyant». Heureusement, il est bien dosé, et autant on apprécie la démarche artistique du créateur qui s’est incliné vers le rock, autant on apprécie les quelques accalmies plus acoustiques ou au piano.

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La deuxième moitié de l’opus est d’ailleurs moins agressive que la première, comportant quelques pièces sans artifice, comme «Dauphin», un surnom affectueux donné à une amoureuse à qui il chante «On se fera des enfants / Des p’tits dauphins dans l’eau / Qui nous ressemblent parce qu’on est beaux» d’une douce voix qui se révèle plus sensible, s’accompagnant uniquement d’une guitare un peu désaccordée. «Soldat», une autre ballade d’amour, se démarque aussi du reste du disque par sa douceur et sa belle finale en chœur.

C’est cette même seconde portion de l’album qui offre la chance d’entendre un amusant récit de chasse. Sur doux fond de guitare électrique, un homme à l’accent charmant raconte: «C’est ça un voyage de chasse. La gravure que t’as dans ta mémoire est plus profonde qu’un voyage», tout en imitant cris d’orignaux et en jurant allègrement. À la fois comique et charmante, cette histoire est un apport intéressant à Indien, tout comme la pièce-titre, qui laisse entendre un témoignage sur l’importance de la nature, de la culture et des traditions pour les nations autochtones. D’une simplicité et d’une authenticité agréables, ces morceaux prouvent qu’il n’est pas nécessaire de trop en mettre pour saisir et captiver l’attention.

C’est tout de même un beau voyage dans le bois qu’a dû faire Clement Jacques avec son acolyte Greg Bonnier (co-réalisateur de l’album avec lui), puisqu’il réussit, avec Indien, à nous faire voyager à notre tour, dans des contrées où on ne pensait pas aller avec sa musique.

«Indien», le troisième album de Clement Jacques, est en magasin depuis aujourd’hui sous l’étiquette Music Mansion. Son spectacle-lancement a lieu ce soir au Divan Orange dès 17h et il est ouvert au public. Pour connaître les détails de ses autres dates de spectacles, visitez son site officiel au www.clementjacques.com.

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