«Have A Little Fun» d'Alex Pangman – Bible urbaine

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«Have A Little Fun» d’Alex Pangman

«Have A Little Fun» d’Alex Pangman

L'art d'incarner les années 20 et 30 avec authenticité!

Publié le 26 mars 2013 par Olivier Boivin

Crédit photo : Six Media

Avec des tubes à profusion depuis ses débuts en 1999 et surtout grâce à They Say..., son premier album réalisé avec le guitariste torontois Jeff Healy, la vocaliste d'origine canadienne Alex Pangman possède certes le goût, le talent et la connaissance musicale digne d'un collectionneur de disques désireux de donner un nouveau souffle aux normes solides du jazz classique. Non seulement elle n'en est pas à ses premiers élans, mais elle incarne parfaitement la femme fatale des années 20 et 30.

Pangman a le côté givré des divas lumineuses du monde du jazz. Elle a d’ailleurs fait frissonner le public lors de son passage au Festival international de Jazz de Montréal en 2011. Après avoir cessé toute activité artistique en 2008 à cause d’un problème de santé (double greffe pulmonaire), elle retourne à son véritable amour de jeune fille, celui du bluegrass et du country, puis, début 2011, elle a lancé, à l’âge de 33 ans, un disque intitulé 33, lequel se compose de pièces popularisées en… 1933.

Alors que les facettes d’Ella Fitzgerald, Connie Boswell et Ruth Etting lui ont souvent collées à la peau par son aspect piquant et sa voix extensible de haut calibre, elle se démarque tout de même et apporte une touche mielleuse bien à elle.

Le voyage dans le temps débute par la pièce plutôt swing «Some Of These Days», qui apporte systématiquement une pulsion en nous et qui donne l’envie de lever le son et de tasser les tables. Place à la frivolité et au lâcher-lousse, puisqu’elle semble vivre un détachement véridique dans ses propos: le fait que son chéri s’ennuiera d’elle la rassure et la réjouit presque (on ne sait trop pourquoi mais c’est contagieux) et elle se plaît à lui indiquer clairement qu’il va vivre des jours de solitudes loin d’elle…

C’est alors qu’on ressent une impression de vengeance douce (on imagine qu’elle s’occupe de lui comme un bébé gâté et qu’elle en a marre, ou c’est peut-être pire…). «You’ll miss your mama, some of these days, …when i’ll be away…», avec cet air de fille totalement au-dessus de ses affaires. C’est adorable. Notons aussi la présence d’un inconditionnel du jazz né en 1926, le guitariste (et joueur de banjo) américain Bucky Pizzarelli.

Loin d’avoir en elle l’idée de s’apitoyer sur son sort, on y voit pourtant quelques moments plus tendres et tristounets sans jamais trop d’exagération. La pièce titre du disque, «Have A Little Fun», nous raconte, toujours dans un air swing exquis, qu’il n’y a pas vraiment de raisons de vivre si nous ne possédons pas la capacité de se faire du plaisir soi-même, qu’il est bon pour le moral de rire un bon coup plus d’une fois par jour.

Le message de l’ensemble du disque demeure donc qu’il ne faut pas dramatiser les tracas que le cœur peut parfois nous faire ressentir. La clé qu’elle semble vouloir nous offrir est de garder le sourire, de prendre les choses comme elle viennent, et lorsqu’elles n’y sont pas, de chanter.

Une autre pièce bien surprenante et des plus attachantes est «It Felt So Good To Feel So Bad», encore là, dénudée de tout remord devant les petits péchés de la vie qui ne font pas de mal à personne. «Lonely, and now I’m lonely, like a fool should be, the guilt began while we were still int’wine».

Have a Little Fun ne prendra pas de temps à charmer tout bon amateur de jazz. Il s’écoute parfaitement lors d’un souper entre amis, en famille, ou lors d’une soirée romantique. C’est un incontournable en ce moment pour tout mélomane et c’est le 26 mars qu’il paraîtra en magasin.

Alex Pangman est la preuve vivante que le passé ne rime pas nécessairement avec désuet et poussiéreux, bien au contraire. On risque d’y découvrir beaucoup de subtilités et de prendre bonne note que, bien souvent, la formule classique est celle qui réussit finalement à traverser presque cent ans de courants musicaux bien diversifiés.

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