MusiqueCritiques d'albums
Crédit photo : Béatrice Flynn
Âme et nostalgie
Les critiques sont promptes à parler d’âme et de soul en décrivant la musique ainsi que la voix de Ngabo Kiroko. En effet, il s’agit à la fois de cette soul, ce style musical bien présent chez lui (pensons ici à la poignante ballade légèrement gospel «Every Dream is a Good Dream»), mais d’abord et avant tout à cette incarnation forte qui domine chacune de ses compositions depuis le début. Prouesses vocales? Oui, en un sens, mais surtout une force de caractère et une sensibilité entièrement assumées qui transcendent la musique. Que ce soit dans «Every Dream» ou dans «Wanderlust», la nostalgie domine, mais l’âme lumineuse qui est à l’œuvre en arrière-plan laisse passer un rayon de soleil en toute fin de ses compositions qui échappent ainsi à la tristesse.
Rythme
Le groove très particulier de Dear Denizen nous entraîne parfois sur l’allée de la nostalgie. Que ce soit les élans shoegaze des années 90, ou encore le post-punk qui se pointe le bout du nez dans «Didi», l’auteur-compositeur-interprète jongle avec les rythmes et les riffs de guitare qui soutiennent des pièces à la teinte souvent douce. Les breaks et les bridges (comme celui de «Didi», justement), qu’il maîtrise aussi bien que la composition de ses spectacles, établissent un fil narratif musical d’où se détache une structure impeccable qui nous tient en haleine jusqu’à la dernière note.
Sentiers connus
Avec Now Here, Dear Denizen se montre plus mature et davantage assumé. Avançant sur un chemin connu où il s’aventure encore plus loin qu’il ne l’avait fait dans ses compositions précédentes, Kiroko peaufine son style, aiguise sa touche et vise juste. On sent l’assurance d’un artiste qui se connaît aussi bien qu’il connaît sa musique. Et il sait où il souhaite aller! Cet EP, qui nous le révèle plus fort, qui nous présente un enrobage plus abouti, ne nous montre encore que bien peu de nouveautés, en ce sens Now Here pourrait se concevoir comme un seul et même album, jumelé avec son précédent EP homonyme.
Exploration
«Monster Tamer» s’impose comme la pièce la plus réussie du mini-album (sans rien enlever au théâtral «Didi») et s’avère également celle où Dear Denizen s’écarte un peu de ces sentiers où il chemine si bien. Il n’y a aucun mal à savoir creuser un même filon, et Ngabo Kiroko exploite admirablement une même veine créative au fil de ses compositions. Cependant, c’est à l’écoute de «Monster Tamer» comme de «Suitcase Down», dans son premier EP, que l’on comprend combien cet artiste a du potentiel en ce qui a trait aux mélodies, aux textures et aux rythmes. Ici, on s’éloigne de la pièce d’ambiance évoquant des états d’âmes profond et l’on s’aventure sur une avenue plus exploratoire et «jouissivement» groovy.
Futur
Les idées de temporalité et de mouvements sont très présents dans les textes de Ngabo Kiroko. Le titre de cet EP Now Here [Ici maintenant] le voit s’incarner dans un présent qui demeure mélancolique comme le lyrique «Stones Are in My Bed». C’est au niveau des sonorités qu’on sent se pointer un futur qui s’écarte de ces allées nostalgiques. Que ce soit l’introduction au piano de cette dernière, ou le synthétiseur dans «Monster Tamer» et «Didi» (où l’on entend aussi les envolées de la trompette), on le voit s’émanciper musicalement même si l’univers des textes tourne autour des mêmes thèmes (l’amour, les attentes, l’espoir et la tristesse). «Mary Love», charmante ballade lancée pour la Saint-Valentin, nous montre que cette émancipation au niveau des textures et des sons se maintient. Dear Denizen nous gâte avec l’introduction de cuivres, ce qui augure bien.
En effet, le futur s’annonce radieux pour le tenace Ngabo Kiroko. Voilà plusieurs années qu’il roule sa bosse sur nos scènes, et 2016 fut pour lui une année charnière. Suite à ce mini-album lancé à la fin de l’année, on ne peut que lui souhaiter que 2017 soit l’année de sa révélation à un plus large public.
Voyez Dear Denizen sur les planches du Divan Orange dans le cadre de la Série «Divan Orange + Montréal en Lumière» à 21h30 ce vendredi 24 février 2017 avec Radiant Baby.
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Par Béatrice Flynn
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