«Walmart – Journal d’un associé» d’Hugo Meunier – Bible urbaine

LittératurePoésie et essais

«Walmart – Journal d’un associé» d’Hugo Meunier

«Walmart – Journal d’un associé» d’Hugo Meunier

Une incursion journalistique dans le ventre de la bête

Publié le 31 mai 2015 par Éric Dumais

Crédit photo : Lux Éditeur

Trois longs mois. C’est la durée du projet Walmart qu’a réussi à négocier Hugo Meunier, journaliste d’investigation à La Presse, lequel a le feu vert de sa boss Katia Gagnon pour aller jusqu’au bout de sa folle idée, à savoir celle d’infiltrer incognito, et à titre de nouvel associé, l’empire Walmart. Défi réussi, puisqu’on tient entre les mains le journal de celui qui a réussi, avec une détermination de fer, à percer le mystère autour de ce géant du commerce de détail, un ouvrage pertinent qui se déguste d’un trait, avec souvent le sourire aux lèvres, et un soupir de découragement.

«Le journalisme d’immersion est un travail de longue haleine, ingrat», clame d’entrée de jeu celui qui a infiltré, durant trois mois en 2012, la succursale Walmart de Saint-Léonard, réussissant à décrocher, après avoir envoyé sa candidature sur le Web, une longue et pénible entrevue de groupe, en plus d’avoir été sélectionné parmi quelques rares candidats pour faire partie de la grande famille. «Ça ne court pas les rues, les masochistes prêts à troquer le confort climatisé d’une salle de rédaction contre un emploi au salaire minimum, avec des horaires atypiques», ajoute-t-il comme pour se donner bonne conscience, ou pour bien démontrer qu’il faut être un sacré numéro pour aller jusqu’au bout d’une telle ambition. On a à peine lu dix pages qu’on ressent déjà une solide sympathie pour l’auteur. Mais vous l’aurez compris, ça en valait le coup.

Paru chez Lux Éditeur, Walmart – Journal d’un associé nous dévoile pratiquement tout ce qu’il y a à savoir sur l’entreprise qui vend des objets «beaux-bons-pas-chers», Hugo Meunier nous dressant, toujours avec cette plume accessible et bien vulgarisée, le portrait de l’entreprise, de sa création par l’Américain Sam Walton dans l’Arkansas à son développement d’aujourd’hui, de la journée typique d’un associé à la description de sa culture, de ses rouages. «Vivre Walmart. Le sentir, le voir, se frotter à ses clients, à ses patrons, l’éprouver, physiquement et psychologiquement, témoigner de cette réalité, voilà en gros ce qui motivait mon projet», affirme Hugo Meunier dans son avant-propos, désireux de bien expliquer les raisons qui ont motivé une telle galère.

Vous l’aurez deviné, il a quand même haï son expérience sur place. Haï certains clients malcommodes. Haï certains associés langues de vipères. Haï certains cadres qui se la pétaient aussi. Sans oublier les modules obligatoires et ennuyeux à suivre sur des ordinateurs datant de l’ère préhistorique, et les exercices de stimulation matinaux, également, dont fait partie les échauffements de groupe et le désormais célèbre cri de ralliement, ou pep talk: «Donnez-moi un W! Donnez-moi un A! Donnez-moi un L! » et alouette. Mais au-delà de toute cette mascarade, destinée à motiver les troupes, ces travailleurs (déguisés en associés) payés au salaire minimum, qui bossent dur pour pas grand-chose, voire des pinottes, se cache le portrait d’une entreprise prospère qui dissimule ses vices derrière ses promesses d’aubaines et d’expériences clients. Bien pire encore: une entreprise telle que Walmart, qui refuse net l’entrée du syndicalisme entre ses murs, oblige plusieurs entreprises locales à mettre la clé dans la porte, car un tel géant est impossible à terrasser.

Hélas, nous ne sommes pas tous des David affrontant Goliath.

Si vous désirez creuser le mystère autour de Walmart, comprendre un peu mieux sa culture, ses valeurs, ses rouages, l’ouvrage d’Hugo Meunier est en plein la source de lumière ce qu’il vous faut. Et ce qui est bien avec cet essai, c’est qu’il révèle des secrets habituellement bien gardés. Vous voici donc aux premières loges.

Vous serez à la fois mieux renseigné, tantôt amusé, tantôt exaspéré, bref, tout cela à la fois.

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