«Sunset Park» de Paul Auster – Bible urbaine

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«Sunset Park» de Paul Auster

«Sunset Park» de Paul Auster

L'Amérique en état de crise

Publié le 5 mars 2012 par Éric Dumais

Crédit photo : Actes Sud

L’écrivain américain Paul Auster, après avoir livré les romans Seul dans le noir et Invisible en 2010 aux éditions Leméac, récidive avec Sunset Park, une œuvre réaliste d’une grande lucidité, au sein de laquelle se joue le destin d’un Américain amoureux d’une mineure cubaine.

Paul Auster, cette fois-ci, nous plonge au cœur d’une Amérique nouvellement gouvernée par le charismatique président Barack Obama, laquelle est doublement marquée par les crises économique et culturelle qui rongent les artistes et les travailleurs, plongeant ainsi le pays dans un état d’incertitude et de chômage de masse. Le récit, campé en Floride et à New York, et plus particulièrement à Brooklyn et à Sunset Park, met en scène le protagoniste Miles Heller, un photographe spécialisé dans la prise de photos d’objets abandonnés.

Un jour, Miles fait la connaissance de Pilar, une Cubaine âgée de 17 ans, rencontrée par hasard dans un parc lors d’un après-midi ensoleillé. Rencontre fortuite, puisqu’ils se sont rendus compte en même temps qu’ils lisaient le même roman, Gatsby le Magnifique de Francis Scott Fitzgerald. Caprice du destin, âmes sœurs? Va savoir! Une chose est sûre, Miles et Pilar vont tomber en amour, mais bientôt leur relation idyllique tournera vite au cauchemar, car Angela, la sœur cadette, fait chanter Miles en le menaçant de mettre au courant les autorités, en insistant sur le fait que leur relation est illégale, voire abjecte. Forcé de quitter la Floride le temps que la jeune Cubaine atteigne sa majorité, Miles Heller va donc, bien malgré lui, retrouver les traces d’un vieil ami, Bing, chez qui il squattera illégalement, en compagnie de ses colocataires, Alice et Ellen. Rongé par l’attente de sa dulcinée et par l’absence de ses parents qu’il n’a pas vus depuis sept ans, Miles devra trouver un sens à sa vie et peut-être, qui sait, reprendre contact avec eux.

Roman réaliste et miroir de la vie sociétale américaine, Sunset Park est une œuvre en apparence banale, au sein de laquelle se déploie une pléthore de personnages tous à la recherche de la même chose: le bonheur et la sécurité. Vivant tant bien que mal au sein d’une société rongée par la crise économique, Paul Auster a mis en scène des Américains ayant décidé de vivre en communauté afin de mieux accepter le destin noir et morose qui recouvre, tel un voile maléfique, le ciel glauque des États-Unis. Sans être un pur chef-d’œuvre de la littérature américaine contemporaine, Sunset Park est néanmoins un roman qui se démarque, d’emblée, par son contexte historique solide et par l’écriture remarquable de son auteur. Paul Auster possède une plume très poétique, capable de manier les mots et de leur donner une dimension métaphorique très imagée. En plus, les diverses voix qui se chevauchent au fil du récit apportent de la saveur à un roman parfois lourd à supporter. Autre bémol: l’auteur semble avoir une manie, voisine de l’obsession, lorsqu’il parle de sujets qui lui tiennent vraiment à cœur, comme le baseball, le cinéma, le théâtre ou la littérature. Ces domaines sont très intéressants, sauf que lorsque Paul Auster entre dans une analyse détaillée des meilleurs lanceurs de la ligue professionnelle de baseball ou dans une critique exhaustive d’un film américain, inutile de vous dire que le temps peut être parfois long, très long. Au final, Sunset Park, sans être un ouvrage banal et soporifique, aurait gagné à être un peu plus captivant.

«Sunset Park»
Éditions Leméac
317 pages

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