LittératureRomans québécois
Jean-Louis Fleury ne le cache pas. Les personnages de son dernier roman, Retraites à Bedford, sont inspirés de célébrités québécoises bien connues. L’auteur nous plonge donc au cœur de la maison de retraite Aux talents d’Antan où règne l’harmonie, avant qu’un ancien policier, accusé de trafic de drogues et sortant à peine de prison, ne vienne s’y installer. L’arrivée d’Hervé Maréchal puis sa disparition viendront troubler les habitants de la maison, et plus particulièrement Albert Lesigne, personnage principal de l’histoire.
La première partie du roman est en fait le journal d’Albert, dans lequel il parle de sa vie passée et présente, de la maison et de ses habitants, de son amie Nathalie, et d’Hervé Maréchal, entre autres. On comprend rapidement qu’Albert fut autrefois quelqu’un de très important dans le domaine des lettres, qu’il est encore très en forme pour son âge, et surtout, très intelligent. Le jour de la disparition d’Hervé Maréchal, il sera celui qui aidera la policière Aglaé Boisjoli à résoudre l’énigme, par ses observations et ses suppositions.
La deuxième partie est constituée des rapports des policiers, ainsi que du script complet de l’interrogatoire du suspect principal.
L’histoire, bien que peu originale, semblait tout de même intéressante. Malheureusement, plusieurs détails agacent plus qu’ils ne plaisent. Premièrement, la disparition d’Hervé Maréchal survient à la page 123 (le roman en compte 285 au total), donc vers la moitié de l’histoire. Avant cela, il ne se passe rien. Albert raconte des histoires sans intérêt, commentant au passage l’actualité de cette fin d’année 2010 – le sauvetage des mineurs chiliens, la nomination (au grand dam du narrateur) de Jean-Marc Fournier à titre de ministre de la Justice, la fin de l’épidémie de grippe aviaire, etc. Il raconte les parties de cartes jouées avec ses co-pensionnaires et ses balades à vélo dans les Cantons-de-l’est, s’interrompant trop souvent pour expliquer son vocabulaire parfois argotique.
Puis, en lisant les suppositions et les propos rapportés par Albert, on comprend rapidement qui est le coupable. Par contre, on s’explique mal comment l’enquêtrice Boisjoli arrive à la même conclusion. Il semble manquer plusieurs éléments dans son histoire, qui, au final ne tient qu’à un fil. Finalement, l’enquête ne semble durer qu’une soixantaine de pages au total, la première partie étant consacrée à la présentation de la maison et de ses habitants, et la deuxième à la confrontation entre la policière et le coupable.
Le trop gros égo d’Albert et le ton hautain qu’il emploie finissent par agacer à la longue, ce qui n’est pas négatif en soi, puisque cela cache en fait une très belle plume de la part de l’auteur, malgré quelques phrases parfois trop lourdes. Si l’histoire est fictive, Jean-Louis Fleury fait tout de même plusieurs références très réelles, souvent à l’actualité du moment, parfois à certaines personnes dont Guy A. Lepage, Andrée Lachapelle et Jeannette Bertrand.
Malheureusement, Retraites à Bedford déçoit. Les amateurs de polars n’apprécieront pas, puisque l’histoire ne renferme ni suspense ni véritable énigme, tournant sans cesse autour du pot, avant de tout déballer d’un coup. Il est plus amusant d’essayer de trouver de quelles personnalités sont inspirés les personnages (l’auteur donne quelques indices qui permettent de supposer les noms de Jacques Godin, Fernand Gignac et Paul Buissonneau, entre autres), que de découvrir le coupable. Dommage.
Appréciation: **
Crédit photo: LivresQuébécois.com
Écrit par: Camille Masbourian