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Crédit photo : Gracieuseté Mémoires d'encrier
Marguerite Duras a lu Manhattan Blues en l’espace d’une nuit. L’intrigue amoureuse l’a bouleversée. Dany Laferrière y voit l’histoire d’amour que Woody Allen et Spike Lee auraient dû réaliser ensemble. En effet, le roman de Jean-Claude Charles a marqué l’imaginaire de bien des lecteurs durant les trente dernières années, sûrement parce que son histoire est d’une simplicité désarmante.
Ferdinand, jeune écrivain haïtien vagabondant entre Paris et New York, rencontre Fran, traductrice de bonne famille élevée à Brooklyn. Le premier soigne une idylle ratée, la deuxième tente d’oublier la violence de son amoureux. Lui délaisse son manuscrit, elle, l’homme qui l’attend le temps de quelques jours de répit. Sur fond de blues, le couple impromptu arpente les rues de Manhattan en quête de plaisir, de la perte des sens et de la chimère de leur liberté.
Le style de Jean-Claude Charles est aussi empressé que le rythme new-yorkais. Les phrases courtes ne lésinent pas sur le double sens. Les mots prennent toute la place et forment parfois une phrase à eux seuls. Les toiles que sont les chapitres oscillent entre le surréalisme de la cité endormie et le glauque de la banalité urbaine. Le duel entre la folie et le sens du devoir des personnages tourmente aussi bien ceux-ci que le lecteur, attaché malgré lui au spleen qui les accable. L’ironie allège tout de même les moments plus émouvants, parsemée dans le livre comme les taxis jaunes dans la jungle citadine.
Même si les mots d’amour s’échangent par voie de téléphones à ligne et lettres laissées sur le coin du comptoir, Manhattan Blues préserve une saveur à l’épreuve du temps dans son écriture urgente, son envie pressante de peindre une ville en noir et blanc. Jean-Claude Charles fait part d’une pulsion de vivre impétueuse qui à la fois gagnera un lectorat plus jeune et rappellera aux plus vieux l’emballement de la première lecture.
«Manhattan Blues» de Jean-Claude Charles, Éditions Mémoires d’encrier, 21,95 $.
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