L’essai «Démocratie.com» d’Astra Taylor publié chez Lux Éditeur

Vingt ans après l’avènement du Web, la révolution sociale promise par les nouvelles technologies n’a pas eu lieu. Bien qu’elle ne tombe pas dans le scepticisme à outrance, Astra Taylor n’hésite pas à tirer à boulets rouges sur les géants de l’industrie et les apôtres des nouvelles technologies. Selon elle, ceux-ci entretiennent un discours techno-utopique qui masque les lacunes démocratiques du web. Celles-ci engendrent des problèmes préoccupants: hégémonie culturelle, protection des renseignements personnels, mort du journalisme et montée en force de l’information fast food.

Le sujet est large, certes. Astra Taylor s’engage toutefois dans cette vaste critique sans sembler avoir une ligne directrice claire et précise. On a l’impression de sauter un peu du coq à l’âne: mort du journalisme, propriété intellectuelle, piratage informatique, filtrage des contenus. Bien que ces problèmes soient liés, le passage de l’un à l’autre n’est pas toujours clair et facile à suivre.

Les explorer tous en profondeur est une tâche titanesque pour l’auteure. On y livre cependant une réflexion qui mérite une attention certaine. Pointer les projecteurs sur les géants des nouvelles technologies qui sont en train de sculpter l’espace démocratique et la liberté d’expression, en fonction de leurs intérêts commerciaux et monopolistiques, demande une longue démarche journalistique et un courage certain.

À la fin de ce long discours, on n’est toutefois pas aussi touché ou critique que l’auteure le souhaiterait. Les titres de Lux Éditeur frappent habituellement beaucoup plus fort. On s’attendait à une démonstration critique plus marquante. La confusion qui règne autour du fil conducteur y est certainement pour quelque chose, mais peut-être aussi les géants de la Silicon Valley ont trop bien réussi leur mission tentaculaire de gagner les citoyens à leur cause. Astra Taylor a peut-être bien raison.