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Crédit photo : Flammarion Québec
«Ce qui fait de Léonard un génie, ce qui le distingue de ceux qui ne sont qu’extraordinairement intelligents, c’est sa créativité, sa capacité d’appliquer l’imagination à l’intellect.»
Découvrez l’histoire de l’homme derrière le maître
Si De Vinci possédait bien un trait de caractère en commun avec l’auteur québécois Réjean Ducharme – véritable génie discret préférant l’ombre à la lumière –, c’est qu’il n’existe pas une tonne d’images à son effigie. Qu’une poignée d’autoportraits présumés de lui nous présentant un homme vieillissant et arborant la longue barbe blanche typique des grands penseurs et savants. That’s it, that’s all, comme on dit.
Au fil de cet ouvrage, qui s’ouvre sur une magnifique ligne du temps illustrée dévoilant les moments charnières de sa carrière artistique, on apprend que Léonard de Vinci a vu le jour le 15 avril 1452, en Toscane, dans une région appelée Vinci (!), située à une trentaine de kilomètres à l’ouest de Florence. Né fils illégitime d’une union hors mariage entre son père, Piero, notaire de métier, et une paysanne célibataire, Caterina, de Vinci, de son vivant, ne jouira jamais, et à son grand désarroi, d’une vraie légitimité au sens de la loi.
Au XVe siècle, un historien de la culture, Jacob Burckhardt, s’est permis de qualifier la renaissance italienne «d’âge d’or pour les bâtards!» Ainsi soit-il on dirait bien. Léonard vivra d’ailleurs de nombreux différends avec ses demi-frères, fils légitimes pour leur part, tout en étant même écarté du testament de son père au décès de ce dernier. Heureusement que, de son vivant, Piero de Vinci a eu la décence d’aider son «fils» à dénicher quelques commandes auprès des mécènes en vue de l’époque.
«Là où certains ne voient que folie, nous voyons du génie. Car seuls ceux qui sont assez fous pour penser qu’ils peuvent changer le monde y parviennent.»
Léonard de Vinci: bien plus qu’un peintre
À mon humble avis, c’est là l’élément qui vous étonnera le plus à la lecture de cette biographie: Léonard, en plus d’être un homme «d’une grande humanité – excentrique, obsessif, joueur et facilement distrait –» était un esprit insatiable sans cesse alimenté par le feu de ses motivations à tout connaître sur tout, tout, tout. Personnellement, j’ai longtemps cru à tort qu’il avait peint toute sa vie durant, alors que la peinture n’occupait, en vérité, qu’une infime parcelle de ses multiples champs d’intérêt.
Léonard de Vinci a en effet passé plus de temps à coucher sur papier les résultats de ses expérimentations plutôt qu’à tenir un pinceau! Et tout cela, dans l’unique but d’assouvir sa soif de vérité sur les fondements de la vie. «Sa curiosité le pousse à figurer parmi la poignée des personnages qui, dans l’histoire de l’humanité, ont tenté de savoir tout ce qu’il y a à savoir sur tout ce qui peut être su.»
Touche-à-tout, c’est le mot qui convient lorsque l’on pense à de Vinci. Entre ses années de folies comme amuseur à la cour des Sforza – Léonard a noirci 300 carnets de «fables, histoires drôles prophéties, facéties et devinettes» – son intérêt marqué pour la construction d’églises et la perspective, ses études anatomiques – qui l’ont poussé à disséquer près d’une trentaine de cadavres pour mieux comprendre la mécanique du corps humain, du crâne aux pieds! – ses observations des oiseaux en vol, sa passion pour les arts mécaniques, son intérêt marqué pour l’hydraulique ou encore les machines – roue à spirale, machine à aiguiser les aiguilles, vérin avec roulements à billes, machines volantes… tout, absolument tout passionnait Léonard.
Il y a fort à parier que vous sourcillerez d’étonnement lorsque vous apprendrez que de Vinci était l’un des plus grands procrastinateurs de son siècle! Si vous saviez le nombre de projets qu’il a mis de côté pour la seule et unique raison qu’une œuvre achevée, ça n’existe tout simplement pas pour lui.
«S’il avait vécu 10 ans de plus, il aurait probablement mis ces années à profit pour améliorer La Joconde. Pour Léonard, abandonner un travail ou le déclarer achevé compromet son évolution, et cela ne lui plaît pas. Il y a toujours quelque chose de plus à apprendre de la nature, un autre coup de pinceau à glaner qui pourrait rapprocher une image de la perfection».
S’il n’y a qu’un seul détail qui m’a gêné – outre ces quelques chapitres trop techniques pour un lecteur non scientifique – c’est quand l’auteur, Walter Isaacson, établit, à deux ou trois reprises, certaines similitudes entre Steve Jobs, l’inventeur de la marque Apple, sur lequel il a déjà écrit une biographie, et Léonard de Vinci… Disons qu’il n’était pas nécessaire d’établir ces liens, à mon avis, superflus, entre deux hommes qui absolument rien en commun, si ce n’est leur flair, surtout qu’ils n’ont pas vécu aux mêmes valeurs aux mêmes époques.
En définitive, je vous invite à plonger dans l’univers passionnant de Léonard de Vinci, un véritable génie de son siècle, dont les travaux ont révélé qu’il était doté d’une extraordinaire intelligence et d’un sens de l’observation hors pair. À ce stade-ci, il aurait très bien pu devenir consultant en gestion de projet agile, tellement il touchait à tout! Et vous, avez-vous déjà tenté de comprendre comment les oiseaux se maintiennent en vol? Non, bien sûr que non. Léonard de Vinci, si.