«L’entrevue éclair avec…» Ugo Monticone, globe-trotteur, auteur et conférencier

Ugo, tu viens tout juste de publier, aux Éditions XYZ, ton neuvième livre! Dis-nous tout: d’où t’est venue la piqûre pour l’écriture, et comment nourris-tu cette passion au fil du temps?

«Ma passion pour l’écriture est vraiment venue de mes voyages. Que ce soit par l’écriture de cartes postales, de correspondances avec une amoureuse à l’autre bout de la planète, ou par les pages des journaux de bord que je noircissais pour ne rien oublier. Moi qui me sentais à la bonne place au bon moment, qui me sentais transformé par le voyage, je voulais tout consigner. D’abord et avant tout pour moi.»

«C’est en lisant Jack Kerouac que j’ai découvert que les carnets de voyage peuvent aussi devenir des livres. Quand je suis revenu de l’Ouest canadien, mon premier manuscrit a été publié. Puis j’ai continué de voyager… et d’écrire. C’est ce que je fais depuis 20 ans maintenant.»

«Ce neuvième livre, que je publie chez XYZ, Tracés de voyage, c’est un survol de ces 20 ans d’écriture, en 20 chapitres sur 20 pays. C’est en quelque sort mon best of d’écrivain-voyageur, qui prend un peu la forme de cartes postales littéraires que je dédie à tous ceux et toutes celles qui ont envie de partir à l’aventure.»

Tu es également conférencier pour Les Grands Explorateurs et tu «parcoures le monde pour t’en inspirer». Comment les voyages entretiennent-ils ton inspiration d’écrivain, à proprement parler?

«Dans mes premiers voyages en solitaire, j’ai découvert qu’à l’autre bout de la planète, personne ne nous connait, alors on peut en quelque sorte devenir qui on veut. Et je devenais ce personnage qui n’est pas gêné de parler aux étrangers, qui ne se laisse pas freiner par ses limites, qui maximise ses capacités pour se débrouiller dans un pays où il ne comprend rien.»

«Tenter de me placer au cœur de l’extraordinaire pour vivre de nouvelles expériences, voilà ce qui me motive. Je pars en quête de cultures, à la rencontre des gens. J’ai souvent l’impression qu’un mois en voyage équivaut à des années d’expérience. Comme si on évoluait dans un autre espace-temps où la vie se déroule en concentrée, tout le contraire du train-train quotidien.»

«Alors tout ce que je découvre, les rencontres, les paysages, l’histoire et les inévitables anecdotes deviennent autant de matière pour écrire. De coucher mes expériences sur papier me permet de retourner en voyage, et d’y amener les lecteurs avec moi.»

Ce 28 octobre, ton livre Tracé de voyages. 20 ans d’allers-détours, a été publié aux Éditions XYZ. Il s’agit d’un «recueil intégrant pour la première fois des expériences de réalité augmentée» à propos de tes aventures aux quatre coins du globe. Qu’est-ce qui t’a donné l’envie d’adopter, pour cette nouvelle parution, cette forme innovante et, qu’on se le dise, plutôt singulière?

«Souvent en voyage, lorsque je vis quelque chose qui me semble extraordinaire, j’aimerais faire apparaître à mes côtés un ou une ami.e avec qui partager le moment. Malheureusement, mes pouvoirs de téléportation ne sont pas au point! Alors je tente d’explorer d’autres manières de partager ces moments, comme un billet d’avion pour un voyage instantané.»

«L’écrit est une forme que j’adore, qui permet déjà aux lecteurs de faire une bonne partie du chemin… mais je cherche toujours de nouvelles façons pour les immerger dans l’histoire, qu’ils vivent un maximum du dépaysement du voyage. C’est entre autres pour ça que j’ai voulu que les noms des pays, en ouverture de chapitre, figurent dans l’alphabet et la langue d’origine: c’est comme l’arrivée à l’aéroport, avec toute la signalisation dans une langue nouvelle. J’aime aussi, comme dans mes conférences, utiliser mes photos, illustrations, vidéos, trames sonores et autres artefacts…»

«J’ai tout d’abord expérimenté l’apport du multimédia avec des livres numériques immersifs. Avec Tracés de voyage, je reviens au livre papier, dans lequel il est si agréable de se plonger, mais j’ai trouvé intéressant de travailler avec des artistes du numérique pour que le livre donne accès à des contenus en réalité augmentée, comme une autre couche à explorer.»

Dans Tracé de voyages: 20 ans d’allers-détours, tes textes sont accompagnés d’illustrations créées par MissPixels à partir de tes propres photos de voyage. Dans quel contexte as-tu été amené à collaborer avec cette artiste, et qu’aimes-tu particulièrement au sujet de sa signature créative et artistique?

«MissPixels est considérée comme la pionnière de l’art mobile au Canada. C’est une artiste extraordinaire. Comme je voulais développer le premier récit de voyage avec réalité augmentée au monde, je devais travailler avec quelqu’un d’extrêmement créatif et de versatile. En partant de mes photos et vidéos de voyage, elle a créé des animations qui apportent une réflexion sur l’aspect fragmentaire de la mémoire: on a joué avec l’idée du glitch, du brouillage, ce qui s’efface et ce qui se superpose.»

«Comme le livre parcourt 20 ans de voyage, on s’est questionné à savoir: comment fonctionnent les souvenirs? Flashs, déformations temporelles… Ses animations deviennent une sorte de rêve où s’imbriquent des bribes de souvenirs liés aux textes.»

«La conception sonore a été réalisée par Marc Sauvageau, qui est parti de captations de conversations, de musiques et d’effets pour recréer l’ambiance de chaque expérience vécue.»

«C’est bel et bien un livre papier, mais l’ajout de ces animations en réalité augmentée vient ajouter une proposition artistique de plus – qu’on va éventuellement décliner sous forme de conférences et d’expositions. On peut dire que le voyage du livre lui-même se poursuit!»

Lorsque la pandémie de coronavirus sera derrière nous, quel endroit jamais exploré souhaiterais-tu visiter pour un prochain projet d’écriture, et par curiosité, poursuivrais-tu sur ta lancée de réalité augmentée, ou tu aurais envie de t’essayer à une nouvelle forme littéraire, elle aussi jamais explorée?

«J’aime les pays où la culture est riche, diversifiée et idéalement totalement différente de la nôtre. J’aime découvrir des peuples premiers, des circuits qui ne se retrouvent pas dans les guides de voyage, être déstabilisé. Je recherche un peu la même chose pour mon écriture. Sans perdre de perspective l’âme même du livre, je pense que les nouvelles technologies peuvent venir l’enrichir.»

«J’ai déjà expérimenté avec l’interactivité, la réalité virtuelle et des composantes du jeu vidéo. Mais je ne veux pas m’éloigner de mon but premier, qui est de partager un instantané de voyage avec le lecteur. Je suis écrivain avant tout, donc la valeur première de mes livres se trouve dans les textes. Alors je suis continuellement à l’affût de nouvelles idées pour faire vivre le voyage plus intensément au lecteur et transformer son expérience.»

«Je trouve trippante l’idée qu’il n’y ait qu’à ouvrir la couverture pour se retrouver instantanément dans un tuk-tuk en Thaïlande ou sur un volcan du Guatemala. Finalement, c’est en écrivant que je développe mes capacités de téléportation.»

Pour lire nos précédents articles «L’entrevue éclair avec» et faire le plein de découvertes, consultez le labibleurbaine.com/nos-series/lentrevue-eclair-avec.

*Cet article a été produit en collaboration avec les Éditions XYZ.