«L’entrevue éclair avec…» Daniel Castillo Durante, finaliste du Prix littéraire Trillium en Ontario – Bible urbaine

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«L’entrevue éclair avec…» Daniel Castillo Durante, finaliste du Prix littéraire Trillium en Ontario

«L’entrevue éclair avec…» Daniel Castillo Durante, finaliste du Prix littéraire Trillium en Ontario

Traduire le ressenti d'un écrivain-voyageur

Publié le 8 juin 2021 par Mathilde Recly

Crédit photo : Martine Doyon

Du 7 au 10 juin, Bible urbaine présente une série d’entrevues éclairs ayant pour but de faire découvrir des auteurs finalistes au Prix littéraire Trillium, récompense la plus prestigieuse en Ontario. On poursuit cette série découverte avec l'auteur Daniel Castillo Durante, dont le plus récent recueil de nouvelles Tango est paru aux Éditions L’interligne en novembre dernier. Découvrez-en plus sur le parcours d'un écrivain-voyageur qui, au sein de ses microfictions, aborde les sujets du déracinement et du choc culturel vécus par les immigrants.

Daniel, tu es professeur de littérature française et comparée, et aussi écrivain. Peux-tu nous raconter d’où t’est venue la passion pour l’agencement des mots, ainsi que le plaisir de lire et de raconter des histoires?

«Très jeune, alors que maman et moi étions à l’étranger, mon père nous a quittés. J’ai alors compris que le réel n’était qu’une fiction. Je pense que cela m’a aidé à surmonter cette épreuve, car voir le monde comme une fiction voulait dire pour moi que, grâce à mon imagination, il m’était possible de “réparer” l’abandon de mon père.»

Tu as déjà écrit des essais, des romans, des nouvelles et des microrécits tels que Du stéréotype à la littérature (1994), Les foires du Pacifique (1998) et La passion des nomades (2006). Qu’est-ce qui t’a donné l’envie de créer des œuvres qui s’inscrivent dans des genres littéraires aussi diversifiés?

«Le réel, insaisissable et multiple – irreprésentable aussi à bien des égards – exige de moi une multiplication de perspectives. Je cherche à voir le monde à partir de plusieurs points de vue. Mon idéal serait d’écrire à bord d’une montgolfière. Mon ressenti est essentiellement celui d’un écrivain-voyageur, quelqu’un comme moi ne peut écrire qu’avec les pieds.»

Ton plus récent recueil de nouvelles, Tango, est paru en novembre dernier aux Éditions L’interligne. Au sein des microfictions qui le composent, le lecteur y découvre des personnages «en proie au déchirement d’un mal-être» et prenant «le chemin de l’exil, autant par-delà les frontières géographiques qu’en traversant des limites intérieures». Comment en es-tu venu à vouloir aborder les sujets du déracinement et du choc culturel que connaissent les immigrants?

«Pour moi, le premier exil a été celui de quitter l’Argentine, le pays où je suis né, pour aller au Pérou. À partir de là, d’autres pays se sont inscrits sur une longue liste que je nomme “fictions”. En effet, un pays est comme un livre qui se découvre en plusieurs chapitres: son histoire, sa langue, sa géographie, son économie socio-politique, les différents registres de ses champs culturels…» 

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On sait que tu aimes beaucoup voyager! Dans un sens, tes périples ont-ils contribué à faire naître les personnages qui peuplent ces nouvelles? Et, si oui, de quelle façon? On aimerait beaucoup savoir si tu t’es inspiré de rencontres ou de réflexions nées de tes expéditions.

«Grâce à mes rencontres dans les pays lointains, j’ai compris que l’étranger était devenu mon interlocuteur préféré. Mon goût – je dirais même, ma passion pour la langue de l’autre – vient de là.»

«L’abandon de mon père, je m’en rends compte à présent, a également signifié pour moi à ce moment-là l’abandon de l’espagnol, ma langue natale. Même dans une langue, il y a différentes variantes (l’espagnol argentin, péruvien, colombien, mexicain, castillan, andalou…) qui exigent un apprentissage approfondi si l’on veut parvenir à exprimer les multiples nuances lexicales et phonologiques moyennant lesquelles s’expriment les différentes couches d’une population. Le même phénomène affecte les autres langues. Piéton des langues, je ne me contente pas seulement de les apprendre, car encore faut-il que je parvienne à les faire jouer comme des instruments de musique.»

Tango fait partie des œuvres en lice pour le Prix littéraire Trillium en langue française 2021, qui vise à récompenser les écrivaines et écrivains francophones de l’Ontario et leurs éditeurs. Toutes nos félicitations et la meilleure des chances! Comment as-tu accueilli la nouvelle et, selon toi, qu’est-ce que cela peut t’apporter pour la poursuite de ta carrière d’auteur?

«Je souhaite que le Prix Trillium suscite un intérêt pour une œuvre, Tango, qui nous fait découvrir le monde à partir de l’exil. Mais c’est aussi le monde à partir de ses restes, c’est-à-dire les dépouilles qui – comme dans un palimpseste – révèlent ce que la vie a ravagé lorsqu’il nous a été impossible de fuir avec le feu.»

Tous les jours jusqu’au 10 juin, on vous fait découvrir un.e auteur.e finaliste au Prix Trillium, dans les catégories Prix du livre d’enfant et Prix littéraire en langue française. Bonnes découvertes et à demain!

*Cet article a été produit en collaboration avec Les Éditions L’interligne.

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