«Le sourire de la petite juive» d'Abla Farhoud: une fresque humaine de la rue Hutchison – Bible urbaine

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«Le sourire de la petite juive» d’Abla Farhoud: une fresque humaine de la rue Hutchison

«Le sourire de la petite juive» d’Abla Farhoud: une fresque humaine de la rue Hutchison

Publié le 10 janvier 2012 par Éric Dumais

C’est sous l’angle de l’écrivain-voyeur que l’auteure Abla Farhoud, native du Liban et Canadienne depuis 1951, nous convie, avec Le sourire de la petite juive, à une fresque vivante de la rue Hutchison, à Montréal.

Après avoir exploré l’univers des femmes dans ses romans Le bonheur a la queue glissante et Splendide solitude, puis celui des hommes dans Le fou d’Omar, à la suite duquel l’écrivaine de 66 ans a remporté le Prix du roman francophone, voilà qu’elle récidive avec Le sourire de la petite juive, un roman-fresque d’une grande lucidité.

Françoise Camirand est écrivaine. Elle s’est donnée comme défi de peindre la réalité d’une vingtaine de personnes ayant toutes habitées dans le Mile End à la même époque. Parmi celles-ci, on retrouve deux voix pour le moins singulières, d’abord celle de la romancière, qui s’occupe de donner une âme fictionnelle à ses voisins qu’elle a côtoyé ou non dans les quarante dernières années, puis celle de Hinda Rochel, une jeune juive hassidique rêvant d’étudier et d’écrire un roman un jour, mais qui se réfugie, pour l’instant, dans les pages de son journal intime.

«Depuis plusieurs nuits, elle rêve aux gens de sa rue, surtout aux hassidim. Pas des cauchemars, pas encore. Pourquoi les hassidim? Ça fait trente-neuf ans qu’elle habite le quartier, qu’elle les voit tous les jours, et jamais elle n’a rêvé à eux.».

Les juifs hassidiques sont en général des gens froids en apparence peu bavards et c’est la raison pour laquelle Abla Farhoud a décidé, grâce à l’écriture, de mettre enfin le pied dans leur univers intouchable, ne serait-ce que pour y pointer le bout du nez. L’auteure a certes voulu, avec Le sourire de la petite juive, créer un roman réaliste grâce auquel elle serait en mesure d’en apprendre davantage sur son voisinage qu’elle a longtemps côtoyé sans pour autant l’avoir apprivoisé. Le récit progresse donc au rythme de courts fragments d’histoires qui représentent tous une anecdote spéciale sur une personne ayant habité la rue Hutchison. L’attention est bien entendu portée sur la jeune juive hassidique et la romancière, afin de donner une progression constante à ce roman tantôt épistolaire, tantôt fictif. Les autres personnages, pour leur part, ne servent qu’à étoffer cette grande fresque humaine. Inutile de dire que dans ces circonstances l’attachement aux personnages n’est pas aussi fort et intense qu’à l’accoutumée, puisque l’exercice n’est que de courte durée, mais pour un roman où le voyeurisme n’interfère pas dans la vie intime des gens, l’effort est assez appréciable.

«Le sourire de la petite juive»
VLB Éditeur
210 pages

Appréciation: *** 1/2

Crédit photo: VLB Éditeur

Écrit par: Éric Dumais

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