Le recueil de poésie «Écharpe» d'Aimée Verret – Bible urbaine

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Le recueil de poésie «Écharpe» d’Aimée Verret

Le recueil de poésie «Écharpe» d’Aimée Verret

Une prose poétique sensible

Publié le 19 février 2014 par Jean-Francois Lebel

Crédit photo : Éditions Triptyque

Après un détour du côté du roman jeunesse avec Inséparables (Éditions de Mortagne, 2013), Aimée Verret (Ce qui a brûlé, 2010) est de retour chez Triptyque pour un second recueil de poésie. C'est par la prose que l'auteure nous rappelle le destin tragique d'Isadora Duncan, cette danseuse américaine morte étranglée par son long foulard. Dans Écharpe, la vie personnelle de Verret est mise en parallèle avec ces évènements.

Le recueil compte soixante-trois pages et presque autant de courts paragraphes. Divisé en quatre parties, auxquelles il est facile de rattacher les quatre phrases constituant la quatrième de couverture, Écharpe fait des allers-retours entre la vie de Duncan et celle de Verret. La prose, fluide et accessible, empêche le lecteur de refermer le livre avant d’en être arrivé au bout, mais incite surtout à une relecture plus lente et attentive.

Le corps – «Le corps d’Isadora n’est plus

Déjà, le texte s’ouvre sur la mort de la danseuse. Il y a tout ce qui est de l’ordre du physique et de la matérialité dans le champ lexical de cette première partie, à l’image de son titre. Certes, on oppose la vie à la mort, mais on retrouve aussi la question de la mémoire et du souvenir, et donc de l’oubli. L’accident est mentionné, tout comme la mort par noyade des deux fils d’Isadora Duncan.

La route – «Si l’on peut survivre à un accident de la route, on n’échappe pas aux multiples deuils qui ponctuent l’existence, comme à ces nuits qu’il faut traverser, seul ou à deux

Ici, l’Autre apparaît dans ce mouvement entraînant la distance. L’écriture devient tourmentée, les contradictions et les conflits surgissent: «Je me suis cousu une robe qui me libère les jambes et m’enserre la gorge, montre mon corps et étouffe mes mots, pour m’assurer que ce ne sera pas de moi qu’on aura entendu la rumeur, celle qui veut que la vie soit la même pour tous.»

Dormir à deux – «On tire une ficelle, on se tricote sa propre écharpe, sa propre fin, éloignant ceux qui nous sont chers

Écharpe plonge dans une écriture de l’intime où se côtoient deux êtres seuls, bien qu’ensemble. Dans ce rapport au quotidien, il y a la crainte que le «nous» l’emporte sur le «je». Les pages de «Dormir à deux» sont touchantes et humaines, le lecteur s’y reconnaîtra, chacun à sa façon.

Le salon – «Et, quand on retourne au salon, ce sont tous ces morts que l’on salue, sans oublier celle par qui tout a commencé, celle qui a tant pris soin des corps des autres

Comme «tous les chemins mènent au salon», le recueil ne pouvait se terminer autrement que par ce passage obligé. Certes, il est difficile de fermer la porte sur le passé et d’accepter l’absence, mais il est nécessaire de dire au revoir.

Nous dirons donc d’Écharpe qu’il offre une prose sensible, en ce sens où la plume de Verret est accessible. Il est aisé de comprendre et de se retrouver dans le propos. L’oeuvre, bien que relevant certainement de la vie personnelle de l’auteure, n’est pas hermétique. En effet, il n’est pas rare que des lecteurs ne lisent que des romans, jamais de poésie. Nous n’osons pas toujours sortir de notre zone de confort, mais, une lecture comme celle-ci, permet de se rendre compte qu’ouvrir ses horizons littéraires peut nous mener à faire de belles découvertes.

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