«Le gardien de l’orchidée» de l'auteure canadienne Camilla Gibb: de la délicatesse – Bible urbaine

Littérature

«Le gardien de l’orchidée» de l’auteure canadienne Camilla Gibb: de la délicatesse

«Le gardien de l’orchidée» de l’auteure canadienne Camilla Gibb: de la délicatesse

Publié le 28 mars 2013 par Catherine Groleau

Grande auteure canadienne née à Toronto, Camilla Gibb a écrit quatre romans, dont la traduction française de son petit dernier, Le gardien de l’orchidée, a été publiée chez Leméac l’été dernier. Diplômée d’Oxford, écrivaine, animatrice d’ateliers de création littéraire et psychothérapeute à ses heures, Gibb nous livre une œuvre que nous pourrions qualifier de beau paradoxe: dure, nostalgique et aérienne.

Le gardien de l’orchidée nous présente d’intéressants personnages. Il y a d’abord le vieux Hung qui porte le lourd fardeau – qu’il s’est lui-même imposé – de faire vivre le petit ghetto qui l’entoure à coup de louches de pho, une soupe vietnamienne qui semble miraculeuse dans Le Gardien de l’orchidée. Son pho, il le fait pour l’amour des aromates, mais surtout pour le bonheur de participer à la survie de ses semblables. Gibb parvient parfaitement à nous faire sentir, par l’écriture, des bouquets d’odeurs, de la citronnelle et de l’humanité. Sous la protection du vieux Hung grandit Tu, jeune homme déchiré entre la tradition et une modernité à la vietnamienne. Maladroit et peu doué, il parvient mal à s’affirmer, mais il continue son petit chemin et il se questionne. Enfin, Maggie, jeune vietnamienne des États-Unis, tout ce qu’il y a de plus séduisant, revient au pays à la recherche de son père, poète charcuté par la réforme agraire (et le musellement intellectuel) du parti communiste d’Oncle Ho.

Ce qui les réunit? Le hasard. Et un hasard qui s’en permet parfois un peu trop. Amnésie, fausses pistes et revirements de situation mènent la vie dure à Maggie qui se fatigue dans la quête de ses origines. Mais la quête hasardeuse de la jeune femme nous permet d’en apprendre beaucoup sur le Vietnam et c’est là, fort probablement, la plus grande force de ce roman. Une histoire méconnue du Vietnam nous est livrée, articulée autour de l’histoire d’un groupe de révolutionnaires, La Beauté de l’Humanité. C’est ici que s’articule le propos du roman. Le père de Maggie, le grand-père de Tu, l’ami de Hung, Hung lui-même, tous ont été amputés d’un membre ou de leur vie pendant cette période. Ainsi, nous avons accès à un visage méconnu du Vietnam, celui de l’art rebelle et des idées qui sont comme des bombes et qui tentent de contrer une vague terrorisante, une famine de la liberté qui ronge tout un peuple. Les souvenirs et les souffrances des personnages nous permettent de le revivre ou de le vivre tout simplement, car ce n’est pas de ces héritages qui se font oublier.

L’écriture de Camilla Gibb a ce pouvoir de nous imprégner des sensations et des mémoires qu’elle veut véhiculer, de toucher à tous nos sens par l’action des mots. La traduction n’a d’ailleurs pas trop altéré l’émotion de son texte, ce qui en fait une lecture riche, qui célèbre le Vietnam d’une façon renouvelée, loin des airs de CCR.

Appréciation: ***

Crédit photo: Leméac Éditeur

Écrit par: Catherine Groleau

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