«Joseph Morneau: la pinte est en spécial», un roman engagé signé Danny Plourde – Bible urbaine

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«Joseph Morneau: la pinte est en spécial», un roman engagé signé Danny Plourde

«Joseph Morneau: la pinte est en spécial», un roman engagé signé Danny Plourde

Publié le 30 mai 2011 par Éric Dumais

«Ce bouquin est une œuvre de fiction, les noms, personnages, lieux et incidents sont le fruit de l’imagination de l’auteur. Toutes ressemblances avec le réel, ses composantes ou ses acteurs ne sont que le résultat d’un vulgaire hasard», nous avertit d’entrée de jeu Danny Plourde, dans la page de garde de son roman. Intitulé Joseph Morneau : La pinte est en spécial, ce quatrième livre est son premier ouvrage à paraître sous les presses de VLB Éditeur.

«Un héros canadien! Le ministre Sam Hamlin n’aura que de bons mots à l’endroit de Joseph Morneau qui l’aura si miraculeusement sauvé de la noyade certaine. Un sauveur! Un exemple pour la jeunesse canadienne-française, elle qui en avait tant besoin! De son côté, recevant de viriles poignées de main des nombreux policiers présents sur place, le principal intéressé, timide, repoussant du revers de la main un café offert, s’exprimant peu à cause de sa gueule endolorie, refusera tous les honneurs, ce qui fera de lui un bienfaiteur aussi humble que courageux.»

Joseph Morneau est-il réellement un héros canadien? Il faut avouer que l’écrivain Danny Plourde s’est imposé une lourde tâche en inventant un personnage aussi complexe et sensé que Joseph Morneau, ce jeune trentenaire, serveur au bar Le Port des Vagues à Montréal, qui n’a de cesse de tout critiquer, notamment les femmes, la société, la politique et les langues. Est-il vraiment un exemple pour la jeunesse canadienne-française? Certes, il désire par-dessus tout protéger la langue française au Québec, laquelle, en raison de l’arrivage massif de nombreux immigrants et anglophones de Westmount est en train de tranquillement disparaître. Mais n’oublions pas que ce dernier est avant tout un être désaxé, révolté, impulsif et agressif, c’est un tueur, un agresseur, un malade. Donc, Joseph Morneau, un héros canadien? Ce ne sont que des sottises, des balivernes!

C’est un récit fictionnel mais fort réaliste que Danny Plourde nous a concocté avec ce quatrième roman bien cru et, oserais-je dire, salement vulgaire. Joseph Morneau : La pinte est en spécial, s’avère une histoire contemporaine, un roman engagé et moderne, à saveur d’alcools et de lendemains de veille, bref, une vision sombre de notre société québécoise, minée par la corruption et le cynisme.

L’histoire, en quelques phrases, met en scène un Joseph Morneau désabusé et un peu écœuré de la vie sale de Montréal. Désirant s’occuper avant que sa peau ne devienne flasque et molle, le gaillard se déniche un emploi au bar le Port des Vagues, où il s’amusera à noyer l’ensemble de la population dans l’alcool et la désillusion. Lui-même un peu désillusionné par la modernité et le capitalisme montant, Joseph Morneau tentera de survivre dans un monde sauvage où les bourgeois sont les maîtres du monde et où les «trous de cul de son espèce» ne sont que des prolétaires de bas niveau. Mais la folie a souvent raison des plus faibles et bientôt Joseph Morneau, en homme courtois et gentil qu’il est, ne saura plus comment gérer ses émotions.

Le roman de Danny Plourde s’avère une belle critique de notre société moderne. L’auteur utilise un style d’écriture moderne, sans fioritures, sans grande métaphore, mais toujours avec un ton juste et concis. L’écriture, souvent vulgaire mais toujours d’une justesse presque poétique, s’agence bien avec le récit un peu crasse auquel Danny Plourde nous confronte.  En somme, c’est une belle réflexion sur la société d’aujourd’hui, mais avant tout un magnifique clin d’œil à l’idée maîtresse du philosophe français Jean-Jacques Rousseau : «l’homme est bon, c’est la société qui le corrompt».

Danny Plourde est né à St-Jean-sur-Richelieu et réside aujourd’hui à Montréal. En plus d’être écrivain, il est aussi musicien et membre du groupe rock Les Fidel Castrol. Il a publié Vers quelque (sommes nombreux à être seul) aux éditions l’Hexagone en 2004, suite à la parution duquel il a reçu le Prix Félix-Leclerc de la poésie 2005. Lors d’un voyage de trois mois en Corée du Sud, Danny Plourde a écrit un deuxième recueil, Calme aurore (s’unir ailleurs, du napalm plein l’œil), qui a remporté le Prix Émile-Nelligan en 2007. Cellule esperanza (n’existe pas sans nous), est sorti au printemps 2009.

Appréciation générale: ***1/2

Crédit photo: VLB Éditeur

Écrit par: Éric Dumais

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