LittératurePolars et romans policiers
Crédit photo : Gracieuseté Éditions Goélette et VLB Éditeur
Cet ex-footballeur, baraqué comme trois, est loin d’être aussi en forme qu’il l’était jadis. Devenu une larve humaine avec, de surcroît, des pensées suicidaires et un estomac qui ne tolère que des Coffee Crisp, Théodore Seaborn ne brille plus autant qu’avant à travers le regard de sa conjointe Alice et de sa fille chérie Jade, ce petit bout d’amour qui continue pourtant de s’accrocher à ce paternel qu’elle aime tant et qu’elle espère au mieux de sa forme.
Mais voilà où en sont les choses dans la vie de Seaborn; il est déprimé et déprimant, suicidaire et intoxiqué à la fois au chocolat et à la coke, et il accumule les échecs au rythme de ses réactions impulsives (il a perdu son emploi dans une boîte du pub, cela dit). Sa situation affective et familiale est bien entendu vacillante, mais s’il réussissait à se botter le derrière une bonne fois pour toutes, peut-être serait-il toujours le temps de sauver son ménage. Quoique… Sauf que, voilà, une situation hors du commun va s’occuper de remuer son quotidien morne à sa place: Théodore Seaborn va croiser son sosie (ou disons plutôt son double?) dans un Second Cup, et cette rencontre, bouleversante émotivement parlant, l’entraînera malgré lui, mais aussi par son entêtement jusqu’à Racca, où il devra combattre pour sa survie aux côtés de l’État islamiste.
«Conduisez-le en enfer…»
L’imagination de Martin Michaud n’a pas manqué d’ambition avec cette plus récente histoire d’un homme au seuil du désespoir à la recherche des motivations ayant poussé son double à s’envoler vers la Syrie. Ce que l’auteur réussit le mieux, avec cette intrigue dont on peine à comprendre l’enchaînement tellement les péripéties déboulent en catastrophe, c’est qu’il rend son lecteur aussi impuissant que son protagoniste devant la situation extraordinaire; d’ailleurs, comment venir en aide à Seaborn alors que lui-même n’a aucune idée de la façon dont il se sortira de cette aventure pour le moins abracadabrante?
À l’instar d’un Valentin Musso, Blake Crouch ou encore d’un Ryan David Jahn, Michaud retient notre attention dès le départ, avec cette plume efficace qui fait qu’on se laisse entraîner, coûte que coûte, dans ces aventures littéraires que sont les bons thrillers. Et on est quasiment content qu’il ait été incapable, lui aussi, de calmer son impulsion, car il nous réserve même une petite surprise, mi-parcours, en mettant en scène deux de ses créations qui nous sont chères. À vous de découvrir lesquelles!
Roman d’aventures, certainement, roman d’actualité, également, car vous retrouverez des références en lien avec les grandes violences qui se partagent la une depuis un long moment déjà. La guerre et les hostilités qui perdurent, à des milliers de kilomètres de chez nous, rendent cette histoire encore plus sensible. Ici, d’ailleurs, on salue le courage et l’audace de Martin Michaud, d’avoir réussi à aborder cette corde sensible, sans trop rentrer dans le trop délicat ni la bonne morale.
On s’accroche aux mots qui défilent alors que Théodore Seaborn s’accroche à sa bouée, et on arrive à la porte de sortie avant même d’avoir soufflé. Chapeau, Michaud.
«Quand j’étais Théodore Seaborn» de Martin Michaud, Éditions Goélette, 422 pages, 24,95 $.
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Par Gracieuseté Éditions Goélette et VLB Éditeur
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