«J’haïs les Anglais» de François Barcelo – Bible urbaine

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«J’haïs les Anglais» de François Barcelo

«J’haïs les Anglais» de François Barcelo

Une autre histoire farfelue qui vire mal, très mal

Publié le 29 avril 2014 par Éric Dumais

Crédit photo : Coups de tête

L’auteur québécois et pince-sans-rire François Barcelo a finalement mis le point final à son court roman J’haïs les Anglais, quatrième et meilleur tome de la série «J’haïs», paru aux éditions Coups de tête.

«Plus j’y pense, plus je constate que je déteste tous les Anglais. Sans faire de distinction entre les Britanniques, les Ontariens, les Texans ou les Australiens. S’ils parlent anglais sans être capables de s’exprimer dans un français compréhensible, je les haïs tous également. Sauf, bien entendu, lorsqu’ils restent chez eux». Il n’y a donc, vous l’aurez deviné, aucune place à la négociation; le protagoniste déteste tous les Anglais. Un peu comme Antoine Vachon détestait le hockey, Viviane Montour-Dubois les bébés et Armand Lafleur, les vieux.

Dans ce nouveau tome, François Barcelo a imaginé un protagoniste complètement «viré sul’ top», pour reprendre une expression québécoise fort à-propos, qui est prêt à tout pour alimenter sa détestation des Anglais. «Et je dois reconnaître que j’ai la rancœur tenace, puisque la plupart des évènements se sont produits bien avant ma naissance», s’exprime-t-il, haineux et aigri, se remémorant les Plaines d’Abraham, le rapport Durham, les rébellions de 1837 et 1838, Stephen Harper, Rob Ford, la déportation des Acadiens, et alouette.

Piqué au vif, surtout depuis que la Trans-Colonial Bank of Canada (TCBC) a ouvert ses portes à Sainte-Cécile-de-Bougainville et fidélisé 16 % de leurs clients, le protagoniste, qui est directeur adjoint de la succursale de la BQ, a tout simplement décidé, un beau jour, de braquer «cette damnée TCBC» afin de combattre les Anglais là où ça va faire mal: en allant piquer leur fortune. Il va donc mettre son plan à exécution au jour J, à 14:47 exactement, et braquer la banque ennemie sur son heure de lunch. Évidemment, son plan étant «infaillible», il va réussir à dégoter une importante somme, mais avait-il pensé à sa fuite? Pas vraiment, non.

À la manière d’un scénario risible et déjanté des frères Coen, ce quatrième tome de la série «J’haïs…» présente une succession de péripéties qui vont s’ajouter, à la manière d’imprévus, dans les pattes du protagoniste pour qu’il soit forcé de prendre des décisions rapidement, mais toujours stupidement. Vraisemblablement sur les nerfs, il va opter pour monter dans un autobus rempli d’Australiens, certain qu’il va pouvoir se cacher des policiers. Oui, vous avez bien entendu: un autobus rempli d’Anglais. Imaginez la suite.

Lorsqu’on détient une formule gagnante, il est facile de se laisser entraîner par le piège de la facilité et de livrer des histoires originales mais sans saveur. Après J’haïs le hockey, qui a cassé la glace de belle façon en 2011, on a accueilli J’haïs les bébés et J’haïs les vieux comme de bons essais, mais sans plus. L’humour noir et grinçant de Barcelo étant moins efficace et les coups de théâtre pas aussi fulgurants qu’on se l’imaginait. Mais avec J’haïs les Anglais, l’auteur revient à la charge avec une courte histoire improbable mais ô combien savoureuse, avec son lot de scènes gores qui en étonnera plusieurs, tellement la violence est gratuite et surprenante.

L’histoire se déroule en une heure exactement, de 14 :45 à 15 :45, et force est d’admettre que l’antihéros de Barcelo va en voir de toutes les couleurs. La narration a été tissée consciencieusement pour que le lecteur ait un accès direct à la conscience du protagoniste, connaissant en même temps que lui ses pensées, ses émotions et la moindre de ses décisions. Nul besoin de dire que son inconscience le poussera dans des situations complexes desquelles il devra se déprendre coûte que coûte, mais pour ceux qui ont dévoré les tomes précédents, vous savez d’ores et déjà que les protagonistes de Barcelo se retrouvent toujours au coeur d’histoires farfelues qui vire mal, très mal.

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