«Indécence manifeste» de David Lagercrantz – Bible urbaine

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«Indécence manifeste» de David Lagercrantz

«Indécence manifeste» de David Lagercrantz

Complexes logiques mathématiques

Publié le 11 août 2016 par Alexandre Provencher

Crédit photo : Actes Sud

Indécence manifeste de David Lagercrantz arrive sur les tablettes francophones plus de sept ans après sa publication initiale en suédois. Lagercrantz expose ici un véritable travail de recherche et se plonge corps et âme dans la logique mathématique, la philosophie kantienne, la physique quantique et l’univers bien particulier du mathématicien britannique Alan Turing. Bien que l’intrigue soit brillamment ficelée et que l’on se demande s’il s’agit d’une uchronie ou d’une réalité, l’ouvrage n’a rien de reposant. C’est une lecture ardue si, Wikipédia ou, pour les plus conservateurs, un dictionnaire n’est pas continuellement consulté au fil des pages.

L’action est campée en 1954 dans une Angleterre bien conservatrice et encore blessée par la Deuxième Guerre mondiale. Au cœur du thriller, le suicide d’Alan Turing, un éminent mathématicien britannique ayant su développer une machine qui décrypte les codes secrets nazis lors de la guerre.

À ce chapitre, sa mort semble bien suspecte pour l’inspecteur Leonard Corell, qui décide d’enquêter sur la vie, les fréquentations et les théories de Turing, lequel fut reconnu homosexuel dans les années 1950 et condamné à la castration chimique peu de temps après. Corell est donc amené au fur et à mesure de l’enquête à soupçonner à la fois un homicide, un suicide, un assassinat politique ou encore un crime haineux à l’égard d’un homosexuel. On comprend donc que l’auteur penche parfois dans la fiction, mais s’appuie tout de même fortement sur des faits et personnalités historiques notoires. Cet amalgame entre la fiction et la réalité créé une atmosphère très intéressante.

Davantage connu par les lecteurs francophones pour le quatrième tome de Millénium, paru en 2015, David Lagercrantz s’avère une figure remarquée dans les médias et dans le monde universitaire suédois. Sa curiosité intellectuelle ainsi que sa fine habilité à la recherche documentaire et à la vulgarisation se font sentir dans Indécence manifeste.

Maîtrisant parfaitement les théories et logiques mathématiques ainsi que les postures épistémologiques de Russell, Wittgenstein, Turing et bien d’autres, Lagercrantz réussit à maintenir un rythme dans le thriller. Mais, sans volonté, les lecteurs peuvent décrocher rapidement. Par ailleurs, la vie et les circonstances réelles de la mort d’Alan Turing sont ordinairement bizarres, comme certains cinéphiles ont pu le découvrir dans The Imitation Game, avec Benedict Cumberbatch. Ainsi, il y avait déjà une tension, voire un mystère entourant tout cela, et Lagercrantz a su en tirer profit.

Le thriller de Lagercrantz est finement construit et extrêmement bien documenté. Plongez-y si vous êtes un intello désirant stimuler ses neurones durant l’été.

«Indécence manifeste» de David Lagercrantz, Éditions Actes Sud, collection Actes Noirs, 384 pages, 39,95 $.

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