LittératurePoésie et essais
Crédit photo : Québec Amérique
Dans ces 150 pages, Jean-François Roberge parle abondamment de ses propres expériences, en tant qu’élève, puis comme enseignant durant 17 ans. Avant de devenir député de Chambly avec la Coalition Avenir Québec, celui-ci s’est impliqué dans le mouvement étudiant, dans Force Jeunesse ainsi que dans l’Association de défense des jeunes enseignants du Québec.
Il propose plusieurs solutions pour réparer la machine brisée de l’éducation au Québec: l’école obligatoire de 4 à 18 ans, davantage d’autonomie aux écoles par rapport aux commissions scolaires, la création d’un ordre professionnel des enseignants, un resserrement des critères d’admission au baccalauréat en enseignement, une valorisation de la profession et un meilleur salaire à 50 000 $ par année en moyenne, plus de spécialistes dans les écoles, avec des contrats de trois ans, pour créer de la stabilité et du suivi avec les élèves en difficulté. Il ratisse large aussi: le développement des activités parascolaires dans toutes les écoles devrait être favorisé pour inciter les jeunes à s’impliquer et à avoir une raison d’aimer l’école.
Rassembler pour réparer
Au fil des chapitres qui couvrent chacun un aspect du système scolaire, de très nombreux exemples de sa propre expérience en tant qu’élève et enseignant au primaire viennent illustrer les réussites et les échecs du système. La majorité est éloquente, mais certains semblent un peu trop instrumentalisés.
Jean-François Roberge garde un ton relativement neutre et rassembleur qui sert bien son propos. Tout au long, il ne jette pas le blâme à une seule entité, malgré quelques flèches décochées au Parti libéral en toute fin. Sans que cela soit mentionné directement, mais on s’en doute, ses propositions correspondent toutes à celles défendues par son parti, la Coalition Avenir Québec, dirigée par François Legault. La publication coïncide avec le colloque «Objectif réussite Québec» que Roberge organise, pour bonifier la position de la CAQ en matière d’éducation. Exit cependant les idées évoquées par le passées comme l’abolition des commissions scolaires.
En général, le discours est posé, assez nuancé, mais il y a parfois des passages qui font sursauter. Par exemple, il met en garde contre la marchandisation de l’éducation et de la difficulté à chiffrer la rentabilité de certains programmes d’études, en sciences sociales notamment, puis affirme: «Au milieu de ce questionnement, il y a une certitude: admettre des étudiants dans des programmes où les perspectives d’emploi sont nulles équivaut à diriger des cohortes tout entières des culs-de-sac professionnels. Ce genre de décision diminue la valeur des diplômes, dévalorise l’éducation et brise des rêves de carrière.» Est-ce à dire qu’il faudrait les abolir? La réponse est loin d’être claire.
Jean-François Roberge est peut-être idéaliste de penser qu’il sera possible de mettre en place toutes les réformes qu’il propose au Québec, mais elles ne sont pas si révolutionnaires. La création d’un ordre professionnel pourrait être accueillie comme une menace dans le milieu syndiqué de l’enseignement, mais l’Ontario a son propre ordre professionnel et ses taux de diplomation sont en général meilleurs qu’au Québec. Les écoles publiques peuvent s’inspirer des écoles privées pour gérer leur établissement de manière plus autonome, de nombreuses écoles offrent quantité d’activités parascolaires ayant beaucoup de succès et la France offre même la maternelle dès 3 ans.
Il est à noter que toutes les redevances du livre sont remises au Regroupement des associations PANDA, un organisme sans but lucratif qui vient en aide aux parents d’enfants ayant un trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH).
Avec Et si on réinventait l’école? Chroniques d’un prof idéaliste, Jean-François Roberge a le mérite d’avoir le courage de prendre la plume et d’ouvrir la discussion sur la valeur de l’éducation, lui qui conclut que «notre survivance comme peuple dépend de notre capacité à réinventer l’école et à valoriser l’éducation».
Reste à voir si le milieu scolaire et le gouvernement l’écouteront.
L'avis
de la rédaction