Entrevue avec Marcel Jean, l'auteur de l'ouvrage «Dictionnaire des films québécois» – Bible urbaine

Littérature

Entrevue avec Marcel Jean, l’auteur de l’ouvrage «Dictionnaire des films québécois»

Entrevue avec Marcel Jean, l’auteur de l’ouvrage «Dictionnaire des films québécois»

Un ouvrage papier audacieux à l'ère du numérique

Publié le 6 janvier 2015 par Ariane Thibault-Vanasse

Crédit photo : G. Piel et Les Éditions Somme toute

Une surabondance de la vidéo sur demande au détriment des clubs vidéos, des films disponibles sur le web avant la sortie officielle en salle, des visionnements privilégiés sur des écrans de plus en plus petits... Le virage numérique que prend le cinéma est irrévocable. À l'ère de l'omniprésence du web dans nos vies, le sort des ouvrages de référence papier semble être chose du passé. Or, le réalisateur et producteur Marcel Jean fait un pied de nez à la société hypermoderne (et technologique), et sort son Dictionnaire des films québécois. Entrevue avec l'auteur de cette Bible de notre patrimoine.

Marcel Jean a toujours piloté plusieurs projets de front. Engagé au quotidien Le Devoir comme critique alors qu’il avait tout juste 21 ans, le multi-instrumentiste a ben su saisir les opportunités qui l’ont mené aujourd’hui à chapeauter la direction artistique du prestigieux Festival international du film d’animation d’Annecy, en France.

À la fois réalisateur et producteur, l’homme à tout faire a étudié le cinéma à l’Université de Montréal (dans la même cohorte qu’André Forcier et Jean-Marc Vallée, souligne-t-il) pour mieux y enseigner dans les années 90. En 1988, il publie le Dictionnaire du cinéma québécois, premier ouvrage de référence en la matière. La cinématographie québécoise recensée sous une même table des matières. L’exercice était nécessaire, tant et si bien que Marcel Jean récidive avec un second dictionnaire, destiné cette fois à répertorier les films, courts et longs métrages, qui ont enrichi le paysage cinématographique québécois.

Le Dictionnaire des films québécois s’adresse avant tout aux amoureux du cinéma québécois, qu’ils fassent partie de l’intelligencia ou du grand public. Se voulant un ouvrage avant tout critique, le second opus du genre de l’auteur contient 1300 entrées de films résumés et analysés. «Je suis parti du principe de ne rien écrire de mémoire», énonce Marcel Jean. «J’ai vu et revu près de 2 500 films en 9 ans, sur lesquels je n’ai conservé que 1300 titres». Par manque de temps, certes, mais aussi pour des raisons éditoriales, son livre fait une impasse volontaire sur certains opus. «Je n’ai pas mis des films comme Café de Flore de Jean-Marc Vallée, ou le Marais de Kim Nguyen, car je trouvais que ce n’était pas des oeuvres assez fortes, poursuit-il. Cela dit, avec le succès de Dallas Buyers Club et de Rebelle, que l’on connaît aujourd’hui, je me demande si ces films n’auraient pas eu leur place, finalement.» Peut-être à la seconde édition? «Oui, le dictionnaire est voué à une perspective de réédition, comme celui sur le cinéma québécois. Mais celui-ci aura une prochaine vie qui sera numérique, nous n’avons pas le choix». 

Ainsi, le dictionnaire se verrait mis à jour aux deux ans environ sur le web, et les différentes versions papier suivront aux 6-7 ans. La raison de la production d’un livre de référence matériel est questionnable, surtout lorsque l’accès à l’information cinématographique n’a jamais été aussi facile sur la toile. «C’est beau Wikipédia, mais le problème avec cette encyclopédie en ligne, c’est qu’on peut y naviguer, mais on ne peut pas la feuilleter. Dans une telle structure encyclopédique, si vous ne googlez pas le bon mot, le bon titre, vous ne le retrouverez jamais, explique le réalisateur et producteur. Dans un livre, en le feuilletant, on va y retrouver un film connu, et l’entrée qui est juste après sera un film que vous ne connaissez pas!» Ouvrage de références, donc, mais également outil de découvertes qui est grandement propulsé par l’usage du livre papier, croit Marcel Jean. Il cite d’ailleurs une étude sur les habitudes des Québécois, laquelle stipule que, malgré l’avènement des nouvelles technologies, les gens préfèrent encore lire sur le traditionnel papier.

Le dictionnaire se distingue par le très grand espace dédié aux courts-métrages. «Il y a une véritable communauté qui s’intéresse aux courts-métrages, évoque-t-il, en spécifiant que l’on assiste à l’âge d’or de cette branche cinématographique depuis 1999. Le mouvement Kino amène de jeunes réalisateurs à être très décomplexés dans leur façon de faire. Le cinéma électronique arrive, donc ils ont du matériel accessible. Moi quand j’étais jeune cinéaste, j’ai tourné mon premier court-métrage, un court de 9 minutes, qui a nécessité deux jours de tournage, avec de la pellicule qui, à elle seule, m’a coûté 2000 $

Cette grande accessibilité peut aussi être un couteau à double tranchant. Certes, elle avantage les créateurs, mais peut aussi engendrer une surabondance de productions qui ne sont pas toutes considérées comme des oeuvres sérieuses. Un tri (pouvant s’avérer fastidieux) s’impose pour pallier à cette situation. À cet égard, le Dictionnaire des films québécois est le résultat du défrichement extraordinaire de Marcel Jean. 

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