«Dits et inédits» d'Hubert Nyssen – Bible urbaine

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«Dits et inédits» d’Hubert Nyssen

«Dits et inédits» d’Hubert Nyssen

Un recueil posthume de nouvelles écrites dans le plus délicat des langages

Publié le 4 avril 2013 par Annie Lafrenière

Crédit photo : Actes Sud

Français d’origine belge, Hubert Nyssen est l’auteur de plus de quarante ouvrages, et a porté fièrement, jusqu’à sa mort en 2011, les chapeaux de romancier, diariste, essayiste, poète, enseignant et éditeur (il est en effet le fondateur de la réputée maison d’édition Actes Sud). Recueil posthume de nouvelles pour la plupart inédites, Dits et inédits nous démontre avec grand bonheur, tel que le dira avec justesse son ami l’écrivain Argentin Alberto Manguel, qu’Hubert Nyssen «n’était pas un homme de lettres, mais bien un homme de mots».

Le recueil s’ouvre sur cette dédicace, douce comme une caresse sur la joue: «Ce livre est aussi celui de mes amis. Je l’ai composé au retour d’après-midi et de soirées passés à évoquer une enfance que nous voulions belle. Je leur offre ces croquis, cette imagerie.» Générosité. Simplicité. Humilité. Qualités qui représentaient bien l’homme derrière l’œuvre et que l’on retrouve également dans ces textes délicats, poétiques et rieurs, écrits entre 1946 et 2010.

Son «imagerie délicieuse» raconte dans une langue savante, qu’il maîtrise si bien qu’on croirait qu’il l’ait inventée, le souvenir des premières rentrées de classe, les premiers émois amoureux, la famille, les voyages, les désirs, la guerre, les amis. Fins dialogues, échanges désinvoltes exquis, personnages dignes de contes fantastiques: une émouvante fille de joie, un trapéziste rêveur, un capitaine de corsaires, Julie, Antoine, Alexandre, Sarah, Moïse, Petit Louis, son cheval, les autres.

«J’éprouvai soudain la peur et la fatigue de cette image. À l’éclat du regard, je venais de découvrir tout un monde que je n’avais pas encore discerné. Je venais de découvrir que Marianne était, non pas un être dont on dispose après l’avoir maté, mais le livre qui vous attire dans la bibliothèque d’un ami. On examine ce livre, il plaît, on le tourne, on le caresse, on le lit par-ci et par-là. On peut l’emprunter mais il faut le rendre tôt ou tard. Si l’on pousse le désir jusqu’au vol, le détachement pour l’objet ravi est rapide à venir et l’on conserve devant les yeux l’éternelle image d’un ex-libris qui vous nargue et vous méprise. Marianne, échappée, me narguait. Je venais de découvrir que Marianne ne m’avait plus appartenu dès l’instant que le premier baiser s’était échangé.»

À lire si vous éprouvez du respect et une sorte d’admiration pour la parole des sages derrière laquelle se cache toujours un sourire en coin, une grimace enfantine. À lire également si vous savez apprécier la générosité d’un auteur, et ne demandez rien de mieux que de vous prélasser dans une fontaine de mots aux accents de vérité simple et poétique.

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