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Crédit photo : Albin Michel
Mais on ne peut pas dire que l’humanité inspire ici beaucoup de sympathie. Les humains y sont présentés comme des êtres épris du besoin de s’entretuer, pour d’obscures raisons idéologiques, et aveugles au génie félin qu’ils côtoient, traitant leurs chats, au mieux, comme des «peluches qui miaulent», selon les termes du chat Pythagore.
Mais, cela n’est que la première partie, celle où les humains ne sont pas encore parvenus à ravager leur civilisation et où les chats sont encore dans une posture qui permet de les observer, en même temps qu’ils subissent leur joug. C’est le moment choisi par Pythagore, le chat de laboratoire greffé d’une clé USB sur la tête, pour enivrer autant Bastet, sa partenaire féline, que les lecteurs, de ses références historiques sur les étapes de cette alliance millénaire entre les humains et les chats.
Dans cette première partie, Werber se révèle être un plus grand érudit qu’observateur de chats, mais qu’importe: devant un monde qui s’apprête à chavirer, le lecteur attend la suite. Et, en effet, tout chavire, au beau milieu de livre, lorsque Bastet, la chatte domestique d’autant plus dévouée et téméraire qu’elle est totalement éprise d’amour, se révèle être la véritable héroïne de cette épopée apocalyptique. À ce moment, la philosophie passe au second plan sous les scènes d’action ravageuses, menant à des solutions plutôt douteuses pour préserver le règne humain: entraîner toutes les espèces du monde, sauf les envahisseurs sur une île minuscule. Cela a un petit côté idyllique, mais peu fertile en espoir pour la suite.
Cette narration à partir d’un dialogue sur les hommes, entre les êtres qu’ils chérissent et maltraitent à la fois, représente une perspective, il est vrai, envoûtante. Dans ce contexte, la réflexion philosophique n’a pas besoin d’être bouleversante (et elle ne l’est pas) pour nous donner envie d’y revenir. La seconde partie offre, quant à elle, un rythme bien soutenu pour ceux qui aiment vivre l’action en des univers de plus en plus surréalistes, accompagnés de chats et d’humains médiums. Pourtant, la transition brutale entre les deux peut choquer. On a beau s’y attendre, cette rupture de style donne l’impression de lire deux romans différents.
Disons que pour les passionnés de chats, qui savourent ce qui se dit à leur propos à toutes les sauces, ce livre constitue un bon deux en un.
«Demain les chats» de Bernard Werber, Albin Michel, 306 pages, 29,95 $.
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