LittératureDans la peau de
Crédit photo : Julie Artacho
Delphie, nous avons cru comprendre que tu as eu une véritable piqûre pour l’illustration lors de tes études en graphisme au Cégep de Sherbrooke! À la base, qu’est-ce qui t’a motivée à suivre une voie davantage axée sur la création visuelle durant ton parcours?
«J’ai découvert l’illustration en faisant des recherches d’inspiration pour mes projets de graphisme. Je ne savais pas que ça existait avant, ce métier-là, qui se tient un peu à cheval entre le graphisme et les beaux-arts.»
«De un, je trouvais ça simplement magnifique. Il me semblait que c’était de l’art accessible, sans prétention. Le message porté était clair, et les médiums, souvent des magazines ou des affiches (et plus tard, des livres), étaient accessibles à un grand nombre de personnes – plus qu’une toile dans un musée, par exemple.»
«De deux, je trouvais que l’illustration offrait une grande liberté. Qu’on n’avait pas les contraintes de la photographie, par exemple. On n’était pas prisonnier du réel, on pouvait explorer l’imaginaire, facilement exprimer des concepts abstraits en combinant différents éléments.»
«Ensuite, j’ai eu la piqûre pour le monde littéraire. J’ai commencé en illustrant deux recueils de poésie, puis j’ai eu la chance d’illustrer mon premier album jeunesse. Je trouve qu’en littérature, on a encore moins de contraintes. On te choisit parce qu’on aime déjà ce que tu fais, et ensuite, ton seul client, c’est le texte, à qui tu dois rendre justice.»
Tu es maintenant illustratrice, et tes dessins apparaissent notamment dans divers livres et magazines. D’ailleurs, tu as remporté un Prix littéraire du Gouverneur général en 2019 pour les illustrations qui accompagnent le livre Jack et le temps perdu de l’autrice et chanteuse Stéphanie Lapointe. Raconte-nous donc comment te vient l’inspiration et à quoi ressemble ton processus de création!
«J’adore travailler avec les textes des autres. Je trouve que c’est tout un honneur qu’on me fasse confiance pour mettre en image les mots d’un autre artiste. Je lis d’abord le texte sans prendre de notes et sans penser aux dessins, pour bien comprendre le propos, bien saisir l’atmosphère.»
«Ensuite, je laisse reposer quelques jours et j’y retourne avec un crayon et un surligneur (façon de parler, je prends toutes mes notes directement dans Acrobat!) Je note les passages qui m’inspirent, ce que je vois comme mise en scène. Normalement à cette étape-ci, je valide avec l’éditeur et l’auteur pour être certains qu’on a la même vision du projet.»
«Puis, je commence les esquisses. Je fais des recherches de références, parce que, par exemple, je ne me rappelle plus de quoi a l’air une cafétéria d’école secondaire, ou pour valider la position du corps humain dans telle posture.»
«Une fois les esquisses approuvées, je peux commencer la réalisation des illustrations finales. J’adore choisir la palette de couleurs, et jouer avec les textures. Ensuite, c’est juste magique quand on reçoit les copies imprimées et qu’on peut tenir le résultat dans nos mains.»
Ce 27 novembre, la bande dessinée Simone Simoneau: Chronique d’une femme en politique est parue aux Éditions XYZ (collection Quai n° 5). Il s’agit là d’une collaboration avec la mairesse de Montréal, Valérie Plante. Comment en êtes-vous venues à vous rencontrer et à travailler ensemble, elle et toi? On est curieux de savoir comment s’est déroulé ce projet commun!
«Valérie mijotait ce projet de BD depuis quelque temps déjà. Quand il est venu le temps de choisir une artiste avec qui travailler, elle est tombée sur mon portfolio, puis son adjointe m’a contactée pour me demander si je serais intéressée à venir rencontrer Valérie – sans me dire pourquoi!»
«Sur place, Valérie m’a expliqué qu’elle avait pris des notes depuis ses débuts dans le monde politique et qu’elle souhaitait en faire une BD. L’idée m’a immédiatement plu, car je savais qu’en racontant son parcours, on offrirait un message fort aux femmes et aux citoyens en général: que la politique, c’est accessible pour ceux qui souhaitent s’impliquer dans leurs communautés.»
«On s’est alors rencontrées périodiquement pour construire une histoire à partir des notes qu’elle avait prises. Quand on s’entendait sur les scènes qu’on voulait inclure dans la BD, elle partait de son côté et m’envoyait le texte, les dialogues. Avec ça, je faisais un découpage sommaire pour déterminer le rythme et la longueur des scènes, puis les esquisses et, enfin, les dessins finaux.»
Nos lecteurs sont friands de savoir: de quoi parle cette histoire, exactement? En fait, on aimerait savoir qui est cette Simone Simoneau, au juste, et à quoi on doit s’attendre en suivant ses péripéties au cœur de tes dessins!
«Simone Simoneau, c’est l’alter ego de Valérie Plante. Dans la BD, on raconte ses débuts en politique, ce qui l’a motivée à s’impliquer, puis comment s’est déroulée sa première campagne électorale.»
«Bien que le ton soit léger et ludique, on met en lumière les difficultés que peut rencontrer une femme qui essaie de faire sa place dans un milieu d’hommes.»
«Au fil des histoires, on en apprend sur les rouages de la politique municipale; mais cette BD, c’est surtout un éloge à l’engagement citoyen.»
Toi qui as collaboré avec nulle autre que la mairesse de Montréal, s’cusez pardon!, avec qui rêverais-tu de travailler pour un prochain projet d’illustration? On jase là…
«Bonne question! C’est certain que je trouve que la bande dessinée peut rendre accessible des messages et des causes qui me tiennent à cœur. Je serais ravie de pouvoir porter, à travers mes illustrations, des histoires qui incitent les lecteurs à se questionner, à s’émerveiller, à prendre action. Je n’ai pas encore fait de liste de collaborateurs potentiels, je suis ouverte aux suggestions!»