«Dans la peau de…» Annie Richard et Jean-Philippe Rousseau, deux passionnés d'enquêtes et d'histoires criminelles – Bible urbaine

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«Dans la peau de…» Annie Richard et Jean-Philippe Rousseau, deux passionnés d’enquêtes et d’histoires criminelles

«Dans la peau de…» Annie Richard et Jean-Philippe Rousseau, deux passionnés d’enquêtes et d’histoires criminelles

De podcasteurs à auteurs, ils retracent un versant sordide du Québec

Publié le 24 mars 2023 par Éric Dumais

Crédit photo : Annie Richard: Style Montréal; Jean-Philippe Rousseau: Tous droits réservés.

Chaque semaine, tous les vendredis, Bible urbaine pose 5 questions à un artiste ou à un artisan de la culture afin d’en connaître un peu plus sur la personne interviewée et de permettre au lecteur d’être dans sa peau, l’espace d’un instant. Aujourd'hui, on s'est glissé dans la peau d'Annie Richard et de Jean-Philippe Rousseau, les deux animateurs du balado «Rétro Crimes» qui viennent de faire paraître leur livre «Motel Mystère» aux Éditions de l'Homme. Si vous êtes avides de sensations fortes, ce livre, qui se concentre sur des événements insolites et effrayants ayant eu lieu au Québec, est fait pour vous!

Annie, nous sommes ravis de te retrouver ici, et Jean-Philippe, bienvenue parmi nous! Ensemble, vous animez le balado Rétro Crimes au sein duquel vous épluchez une variété de crimes commis à différentes époques. D’ailleurs, on doit mentionner qu’il se hisse parmi les plus écoutés dans les palmarès. Félicitations! Parlez-nous brièvement de ce «podcast d’enquêtes couleur sépia» qui fait tant vibrer nos cordes sensibles depuis sa création en 2020.

A.R.: «En 2019, Jean-Philippe a voulu m’aider dans ma quête de trouver des réponses au sujet d’un meurtre déjà résolu mais nébuleux afin d’aider un homme qui était à la fois le fils du meurtrier et de la victime. C’est en partageant nos recherches sous différentes formes que des réponses nous sont parvenues. Nous avons ensuite voulu poursuivre ce genre de travail via le podcast.»

«Le côté “sépia”, c’est parce que nous avons décidé de concentrer nos recherches sur des cas plus anciens: les archives sont surprenantes lorsqu’on creuse un vieux dossier. Se plonger dans le contexte historique nous permet de relever beaucoup d’indices qui permettent à l’auditeur de se faire conter une histoire qui requiert différentes analyses captivantes.»

J-P.R.: «Absolument! Rétro Crimes, c’est un peu comme notre machine à voyager dans le temps: on y découvre de vieilles affaires souvent totalement oubliées (mais pas moins intéressantes) et des personnages atypiques. Mais c’est aussi un plongeon dans l’histoire du Québec; celle que l’on ne raconte pas forcément dans les livres, mais qu’il faut comprendre afin de bien saisir certaines subtilités d’un événement.»

«Travailler sur ce projet à deux, c’est aussi une façon d’apporter chacun notre vision et notre expérience afin d’éviter cette fameuse “vision tunnel” qui nous empêche parfois de prendre en compte toutes les hypothèses d’une affaire.»

Lors de notre dernière discussion, Annie, tu nous révélais avoir été d’abord intervenante, et ce, avant de décider d’entreprendre un virage à 180 degrés pour devenir… détective privée et, ainsi, obtenir ton permis d’investigation! On se souvient que c’est ta curiosité pour les archives, couplée à ton intérêt pour les affaires d’enfants disparus et assassinés qui t’ont donné l’envie d’y consacrer temps et énergie. Quels sont les sujets qui titillent ta pulsion pour l’étrange et le mystérieux, aujourd’hui?

A.R.: «D’abord, j’ai mis l’enquête privée de côté pour mieux me consacrer à des changements professionnels et à l’écriture. J’aime beaucoup les dossiers anciens qui me plongent loin dans le passé. C’est moins sensible pour tout le monde, malgré tout mon respect pour ces affaires. Il y a une forme d’éloignement causé par le temps qui nous sépare de ces incidents.»

«Pour ce qui est du mystère et des phénomènes étranges, c’est parce que j’aime chercher le vrai et les choses objectives à travers ces légendes ou rumeurs. De plus, je fais partie de cette génération qui raffolait des histoires de peur et du paranormal. J’adorais écouter l’émission Dossier Mystère, je lisais les romans Frissons et, à l’instar de tous mes amis, j’avais ma planche de Ouija dans ma garde-robe.»

«Il y a donc une partie de moi fidèle à cet engouement que j’avais à cette époque, même si, aujourd’hui, je suis beaucoup plus sceptique.»

Tu as un parcours pour le moins surprenant, Jean-Philippe: pour faire (presque) court, tu es créateur de contenu sur le web depuis 1995, producteur et animateur de podcasts, mais pas que! Dans une autre vie, si on peut s’exprimer ainsi, tu as fait des études en droit et as été formé à l’École nationale de police de Draveil (en région parisienne) durant ton service militaire, en plus d’avoir travaillé pendant dix ans dans les milieux politiques français, et on en passe. C’est finalement en 2001 que tu as eu l’appel du Québec, cette terre promise où tu as travaillé en logistique, puis dans l’aéronautique… Dis-nous tout, d’où vient-elle cette flamme ardente pour les histoires criminelles?

J-P.R.: «J’ai eu la chance d’évoluer dans beaucoup de domaines, en effet. Pour ce qui est de cette flamme pour les histoires criminelles, je pense l’avoir eue depuis ma plus tendre enfance. D’abord dans la fiction, grâce à Agatha Christie, dont je dévorais les livres. Et ensuite, je me suis beaucoup plus intéressé aux crimes réels, parce que, comme le dit l’expression populaire, “la réalité est souvent bien pire que la fiction”, malheureusement.»

«Je dirais que ce qui me fascine le plus, c’est le processus et les techniques d’enquêtes, c’est-à-dire le chemin qui est parcouru entre la scène de crime et l’arrestation d’un suspect. En cela, les travaux d’Edmond Locard me fascinent… Pensez-y, dès le début du XXsiècle, des décennies avant la découverte de l’ADN, il avait établi le principe selon lequel un criminel laisse des traces de son passage et qu’il emporte avec lui des traces du lieu qu’il a visité. Aujourd’hui, c’est une évidence, mais à l’époque, il posait les bases de ce qui allait devenir la police scientifique.»

Motel-Mystere_couverture_Ed.Homme

Parce que votre collaboration est fructueuse et que votre chimie est tout simplement naturelle, vous avez décidé de publier un livre à deux cerveaux et quatre mains, Motel Mystère, une nouveauté des Éditions de l’Homme parue le 23 mars dernier. À travers ces pages, vous entraînez vos lecteurs et lectrices «dans une dizaine d’établissements québécois qui ont été le théâtre d’événements insolites…» Brrr! Est-ce que ça vous tente de nous donner un avant-goût des histoires que vous avez déterrées, juste pour piquer notre curiosité?

A.R.: «Nous parlons de plus d’une dizaine d’hôtels et motels dans lesquels il s’est passé plus d’un fait divers ayant attiré notre attention. Ce livre ne contient pas d’enquêtes en tant que telles sur des cas, mais plutôt une enquête d’archives sur ce qui a bien pu se passer dans ces endroits. On raconte leur passé.»

«Le plus étonnant, c’est que les histoires qui nous ont le plus surpris sont celles qui sont passées à la trappe et dont on n’a plus reparlé depuis. On raconte la traque d’un ancien employé d’un hôtel du Vieux-Montréal que l’on cherchait partout en Amérique du Nord pour un meurtre qui rappelle l’effroyable conte de Barbe bleue. Cet hôtel est ensuite devenu la morgue de Montréal durant plusieurs décennies.»

«Dans un hôtel plus contemporain, on raconte l’arrestation rocambolesque et l’emprisonnement d’un groupe rock populaire, alors que des milliers de fans les attendent à Boston. On se promène ainsi d’un établissement à l’autre à Montréal, à Québec, mais aussi à Drummondville, à Val-d’Or, à Grand-Mère…»

J-P.R.: «Comme le dit Annie, c’est aussi un voyage à travers le Québec. En parlant de Grand-Mère, d’ailleurs, l’histoire abominable du fossoyeur de la ville nous a donné froid dans le dos: il leurrait des jeunes filles afin de les attirer dans ses griffes, en plus de tuer sa maîtresse qu’il fréquentait régulièrement dans un hôtel de la ville.»

«Nous avons également découvert qu’un inquiétant tueur en série avait séjourné dans l’ancien hôtel Blanchard de Québec et que ce sombre individu a tué ou tenté de tuer partout où il est passé. Ah! Puis j’allais oublier, c’était un médecin!»

«Aussi, nous avons été surpris de découvrir qu’il planait une menace d’enlèvement sur nul autre que Guy Lafleur durant le séjour du Canadien à l’hôtel Bonaventure lors des séries éliminatoires de 1976. Il y est même question d’un gadget à la James Bond que le Démon blond devait porter sur lui.»

«Et aussi, qu’un fâcheux oubli au Château Frontenac aurait pu avoir des conséquences dramatiques sur l’issue du débarquement en Normandie de juin 1944… Rien que ça! Et ce n’est qu’un petit aperçu des quelque 35 histoires qu’on retrouve dans notre livre!»

Et si on vous annonçait qu’un astéroïde va frapper la Terre – comme TVA Nouvelles se plaît à nous effrayer à tout bout de champ! – et qu’il vous reste 48 heures pour vivre à fond – quel serait votre ultime projet, tous les deux, avant de fermer les yeux à jamais? Elle n’est pas évidente cette question, n’est-ce pas?

A.R.: «Évidemment, je passerais ce précieux temps avec mon fils. Mais s’il fallait mêler ma passion et les archives à ce dernier séjour sur terre, je me dépêcherais de faire un ménage dans ma paperasse. Je ferais tout un tas de petits cahiers contenant toutes les affaires qui me sont les plus chères dans les recherches que j’ai pu faire, histoire de m’assurer que quelqu’un puisse prendre le relais!»

J-P.R.: «…Recherches que l’on pourrait éventuellement enregistrer en audio, puis placer dans une capsule suffisamment résistante pour pouvoir être retrouvée après l’apocalypse! Mais oui, il faudrait rassembler toutes les recherches qu’on a pu faire pour que cela ne soit pas perdu à tout jamais. Je pense qu’il y aurait d’ailleurs beaucoup de travail à faire, alors autant commencer cela avant que le ciel ne nous tombe sur la tête!»

Pour découvrir nos précédentes chroniques «Dans la peau de…», visitez le labibleurbaine.com/nos-series/dans-la-peau-de.

*Cet article a été produit en collaboration avec les Éditions de l’Homme.

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