LittératureRomans québécois
Bleu comme la lune est le premier roman de l’auteur montréalais Phillippe Collard. Petit roman introspectif, Collard nous propose un défi de taille: entrer dans la tête d’une jeune femme soumise aux aléas émotionnels que génère la lune bleue du mois de mars 1999.
Blagues à part, Bleu comme la lune est avant tout une œuvre d’une grande poésie. Écrit au «je», ce roman se situe essentiellement dans l’esprit de Nadia Soulard, la narratrice. Jeune femme que la vie n’a pas toujours choyée, Nadia se prête à une profonde introspection qui prend la forme d’un dialogue soutenu entre elle et elle-même. Le roman s’amorce alors que Nadia prend le train pour se rendre à Québec où elle doit donner une conférence sur l’architecture et les espaces imaginaires. Mais Nadia est, depuis quelque temps, incapable de se concentrer. Elle repousse continuellement la rédaction de sa présentation, car la conférence ne lui dit plus rien. Alors qu’elle se trouvait dans une période d’immortalité lorsqu’elle a proposé sa participation au colloque, depuis quelques jours, elle se sent sombrer dans une période de mortalité et elle sait qu’elle ne peut rien pour y échapper.
Nous sommes au mois de mars 1999, à la veille de l’inauguration du Nunavut comme nouveau territoire autonome du Canada. Cet événement est symboliquement chargé, car il coïncide avec une lune bleue, ce qui s’avère être, en fait, l’avènement d’une seconde pleine lune au cours d’un même mois. Nadia, dont la vie semble à la dérive depuis quelques temps, est frappée de plein fouet par les tumultes (astronomiques, ésotériques, oniriques…) qu’occasionne cette lune bleue. Le lecteur devient donc prisonnier de l’esprit de Nadia, tout comme elle l’est de sa propre tête. «Le monde est dans ma tête, ma tête est dans le monde.» Nadia se répète sans cesse ces mots – qu’elle croit de Paul Auster – et qui deviennent, dans un certain sens, le mobile de son existence. Car la narratrice se replie de plus en plus sur elle-même, jusqu’à ce qu’elle fasse l’heureuse rencontre d’Elyza. Femme fascinante et impulsive, celle-ci lui fait prendre conscience qu’elle est peut-être en train de passer à côté de sa vie.
Petit roman agréablement construit, on s’accroche rapidement au personnage de Nadia Soulard qui nous emporte dans le tourbillon de ses réflexions. Petit bémol cependant qui va à l’enchaînement des dialogues avec autrui qui perdent parfois de leur naturel. Mais la très forte symbolique mise en place dans le roman et au centre de laquelle gravite le motif de la lune offre une lecture philosophique très intéressante des deux visages de l’humain.
Pour lire notre entrevue avec Philippe Collard, réalisée par Catherine Groleau, cliquez sur le lien suivant: https://labibleurbaine.com/wp/?p=7672.
Appréciation: ***
Crédit photo: Leméac Éditeur
Écrit par: Catherine Groleau