«Accro au malheur» de Marie-Ève Potvin – Bible urbaine

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«Accro au malheur» de Marie-Ève Potvin

«Accro au malheur» de Marie-Ève Potvin

Une thérapie de groupe, really?

Publié le 27 mai 2014 par Éric Dumais

Crédit photo : Éditions Stanké

L’auteure d’origine sherbrookoise Marie-Ève Potvin, qui a depuis établi ses quartiers à Montréal, nous livre avec son roman Accro au malheur (Stanké) un témoignage à la fois poignant et ludique d’une jeune femme de 27 ans aux prises avec des problèmes d’anorexie, qui devra piler à deux pieds sur son orgueil pour suivre jusqu’au bout une thérapie de groupe, elle qui est passée maître dans l’art d’être antisociale.

Malika Poitier-Després est, selon toute apparence, ce genre de fille qui ne s’apitoie jamais sur son sort, et encore moins sur celui des autres!, parce que c’est niaiseux de se plaindre à qui mieux mieux de ses problèmes personnels. Mais elle est consciente que sa vie ne tourne pas rond et elle s’est tout de même obligée à s’inscrire à une thérapie de groupe, et ce, malgré le fait que son inconscient lui répète, tel un mantra qui n’en finit plus de finir, de ne pas y aller: «Oh my God. Mais qu’est-ce que je fais ici? Je n’aime pas les gens, encore moins les groupes de gens réunis pour un bon grattage collectif de bobos!», s’exclame-t-elle d’entrée de jeu, ce qui prouve au lecteur qu’elle n’est pas prête de trouver sa porte de sortie.

Rapidement, le style dans le vent de Marie-Ève Potvin nous permet de réaliser, peut-être avec une certaine pointe de soulagement, que nous n’allons pas être confronté à une version revisitée du roman Les mots pour le dire de Marie Cardinal, dans lequel le protagoniste s’inscrivait à de longues, très longues séances de psychanalyse pour trouver la source de son mal-être, et encore moins au minuscule mais ô combien touchant Ça ira (Stanké) d’Annie Loiselle, qui abordait le thème de l’anorexie avec honnêteté et réalisme. Avec son vocabulaire urbain très à la mode, chicklit sur les bords, Potvin offre à ses lecteurs un livre divertissant qui traite pourtant de sujets qui le sont un peu moins: l’anorexie, certes, mais aussi la déprime morale, le mauvais caractère, et l’«écoeurantite» aigüe de son personnage à l’égard des gens.

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Bref, c’est tout un travail que Malika doit entreprendre, et sa thérapie de groupe, menée de main de maître par la pédagogue Karen, semble être la meilleure avenue, malgré le fait qu’elle préférait disparaître six pieds sous terre plutôt que d’entendre des ex-alcooliques ou dépendants sexuels parler de leurs tares. Après la thérapie s’ouvre une seconde dimension plus personnelle encore où le protagoniste devra s’envoler pour les Philippines afin d’aller accomplir un acte qu’il n’aurait jamais pensé réaliser un jour: revoir son père. Si cette partie a tendance à s’étirer, le voyage prenant une tournure de chasse aux indices, elle demeure néanmoins touchante et permettra à Malika de prendre conscience de ses nouvelles valeurs, qui changeront sa perception de la vie à jamais.

Oscillant entre le rire, les remises en question et les larmes, Accro au malheur reste un petit ouvrage bien tricoté qui permettra autant aux gars, comme aux filles, de passer un moment privilégié avec une jeune femme qui n’a pas la langue dans sa poche et qui est prête à tout pour trouver son bonheur. Et la couverture du livre rend bien cette volonté de fer d’être heureuse dans la vie, avec cette ancre d’un navire s’accrochant à la lettre «o» du mot «accro», une belle image d’un retour à la surface.

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