LittératurePolars et romans policiers
Crédit photo : Albin Michel
Ambitieux est l’un des meilleurs qualificatifs pour caractériser Stephen Edwin King, cet écrivain américain aujourd’hui âgé de 65 ans et couronné de succès à presque chacun de ses romans. Après la démesure (Le Dôme, tomes 1 et 2) et l’horreur (Nuit noire, étoiles mortes), King revient en force avec un roman dont il caressait l‘écriture depuis 1973 (qu’il avait anciennement intitulé «Split Track»), dix ans après la tragédie, mais qu’il avait préféré abandonner à cause de son travail d’enseignant à plein temps et de la blessure qui était encore trop fraîche dans le cœur des Américains. Maintenant, après 50 ans, l’occasion était bien choisie.
N’allez pas croire que l’horreur est à tout coup la marque de commerce de Stephen King. Certes, il excelle toujours dans son genre de prédilection, comme en font foi ses récentes nouvelles 1922 et Grand chauffeur, publiées en 2012 et à travers lesquelles le macabre côtoyait l’angoisse dans des moments de tension frôlant la démesure, mais son plus récent 22/11/63 n’est pas réellement effrayant; le suspense réside plutôt dans l’installation du climat et dans l’épopée vieillotte du protagoniste, qui se retrouve catapulté cinquante-trois ans en arrière, dans une époque qu’il n’a même pas connue, enfant.
Évidemment, les pages ont souvent tendance à s’étirer au cours de la lecture, expérience parfois pénible que l’on avait déjà vécue avec Dreamcatcher et à travers lequel Stephen King prenait ses aises afin de bien nous faire comprendre l’enfance de ses personnages. Mais, qu’on le veuille ou non, ce long détour était nécessaire pour que l’on s’identifie bien à eux. Avec 22/11/63, l’attente ne réside pas dans la mise en contexte de ces derniers, mais plutôt dans l’installation du suspense, qui prend plusieurs centaines de pages à prendre enfin son envol. Cela dit, le roman aurait compté au final une centaine de pages en moins que l’on n’aurait certainement jamais vu la différence.
Il faut dire que le trentenaire Jake Epping, enseignant à temps complet d’anglais, n’avait pas nécessairement prévu d’attendre cinq longues années dans une époque qui n’est pas la sienne, afin d’empêcher Lee Harvey Oswald, le présumé tueur de JFK, de commettre son assassinat du cinquième étage de la School Book Depository, dont les fenêtres donnaient précisément sur Elm et Houston Street, à Dallas, ii de d’emprunter une nouvelle identité sous le nom de Georges Aberson, et ni de se trouver un emploi et de tomber amoureux de la séduisante et élancée Sadie Dunhill.
C’est donc au rythme des hits des 50’s et 60’s «Sugartime» des McGuire Sisters, «Bird Dog» des Everly Brothers et «Purple People Eater» de Sheb Wooley, qui passaient tous sur la station radiophonique WJAB, que le lecteur accompagne le protagoniste dans un univers où le protagoniste n’a pas le droit à l’erreur ni au moindre faux pas s’il ne veut pas attirer les soupçons des citoyens du Maine et de Dallas. Nul besoin de dire qu’évidemment Georges Amberson ne filera pas toujours le parfait bonheur, car sa présence dans les années 50 et 60 est bel et bien de mettre le grappin sur l’assassin de John F. Kennedy, qui a changé le cours de l’Histoire pour quelques secondes de gloire, et non de faire la fête ou d’aller au ciné-parc pour un programme double, à 30 cents la veillée.
Mais son vieux pote Al Templeton, décédé du cancer avant d’avoir pu lui-même empêché l’assassinat contre Kennedy, avait-il prévu les conséquences d’un tel changement? Assurément non. Car le passé s’harmonise toujours et il fait tout en son possible pour demeurer inchangé. Et si Lee Harvey Oswald n’assassine pas John F. Kennedy, quelles répercussions cela aura-t-il sur le cours de l’Histoire des États-Unis? Peut-on changer le passé? Êtes-vous tenté de le découvrir, cher lecteur?
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de la rédaction